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Azteca

Azteca

Titel: Azteca Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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mi-longueur.
    « Tu as entendu, dis-je au malheureux page. Il va avoir besoin de
toi pour retourner en ville. Va t’occuper de lui. »
    « Ainsi Chimali vit toujours, me dit Ahuizotl sur un ton glacé. Si
on peut appeler ça vivre. Tu t’es conformé à notre interdiction de ne pas le
tuer, en ne le tuant pas tout à fait et tu as cru qu’ainsi nous ne serions pas
offensé et que nous ne mettrions pas notre menace à exécution ? »
    Je gardai prudemment le silence. « Nous reconnaissons que tu as
respecté nos ordres à la lettre, mais tu en avais également très bien compris
l’esprit. Et maintenant, à quoi peut nous servir un homme dans cet
état ? »
    Toutes les fois que j’étais reçu par le Uey tlatoani, j’étais résigné à
être le point de mire de son regard fulminant. Certains tremblaient et
blêmissaient sous ses yeux terribles mais moi, j’avais fini par m’y habituer.
    « Si l’Orateur Vénéré consentait à écouter les raisons qui m’ont
poussé à défier l’artiste du palais, mon Seigneur considérerait peut-être avec
plus d’indulgence l’issue tragique de ce duel. »
    Il se contenta de pousser un grognement que je pris pour un
encouragement. Je lui fis alors à peu près le même récit qu’à Zyanya, en ne
mentionnant bien entendu aucun des événements de Texcoco, car ils touchaient de
trop près sa défunte fille. Je terminai en lui rapportant comment Chimali s’y
était pris pour assassiner mon fils nouveau-né, d’où mon angoisse au sujet de
ma jeune épouse. Ahuizotl grogna une nouvelle fois, puis il se mit à
réfléchir ; du moins c’est ce que je crus d’après son silence renfrogné.
Il me dit enfin :
    « Nous n’avons pas pris Chimali à notre service à cause ou en
dépit de sa moralité abjecte, de ses penchants sexuels, de sa nature
vindicative ou de ses tendances à la fourberie. Nous l’avons uniquement engagé
pour peindre ce en quoi il surpasse nettement tous les artistes présents et
passés. Peut-être n’as-tu pas tué l’homme, mais tu as tué l’artiste. Maintenant
qu’on lui a arraché les yeux, il ne peut plus peindre. Maintenant qu’on lui a
coupé la langue, il n’est même plus en mesure de communiquer à d’autres
artistes le secret de ses mélanges de couleurs. »
    Je ne disais rien, mais je pensais à part moi et avec une certaine
satisfaction, que cet homme aveugle et muet ne pourrait jamais révéler à
l’Orateur Vénéré que j’étais la cause première de la disgrâce publique et de
l’exécution de sa fille aînée.
    Il reprit ensuite la parole en se faisant à la fois l’avocat et le
procureur de mon procès : « Nous sommes toujours irrité envers toi,
mais il nous faut admettre tes raisons comme des circonstances atténuantes.
Nous devons considérer toute cette histoire comme une affaire d’honneur. Nous
devons également tenir compte du fait que tu as obéi à nos paroles en laissant
la vie à Chimali ; nous tiendrons nous aussi notre parole, tu seras
exempté de tout châtiment.
    — Merci, Seigneur, lui dis-je avec une sincère reconnaissance.
    — Cependant, comme nous t’avons menacé publiquement et que toute
la population est maintenant au courant, il faut que quelqu’un paye pour la
perte de notre peintre. » Je retins mon souffle, pensant qu’il ne pouvait
que désigner Zyanya. Mais il ajouta d’une voix indifférente : « Nous
y réfléchirons. La faute en sera rejetée sur un quelconque individu, mais tout
le monde verra que nos menaces ne sont jamais vaines. »
    Je poussai un soupir intérieur. Au risque de paraître sans cœur, je
dois dire que je n’éprouvais guère de remords ou de tristesse vis-à-vis de
cette victime inconnue, un esclave gênant, sans doute, qui allait périr par le
caprice de ce tyran.
    « Ton vieil ennemi sera chassé du palais aussitôt que les médecins
auront fini de panser ses blessures. A partir de ce moment, Chimali devra
essayer de survivre comme un vulgaire mendiant. Tu as eu ta vengeance, Mixtli.
Tout le monde préférerait la mort à ce que tu as fait de lui. Et maintenant,
va-t’en loin de notre vue, de peur que nous ne changions d’avis. Va retrouver
ta femme. Elle doit se faire du souci pour toi. »
    Elle s’en faisait, sans aucun doute, autant pour elle que pour moi.
Mais Zyanya était fille du Peuple Nuage et elle n’aurait jamais laissé voir son
inquiétude à des employés du palais. Lorsque je pénétrai dans la chambre,

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