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Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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une victoire aux prochaines législatives, Giscard prend date. Il n’entend sans doute pas voir Chirac s’installer une fois encore à Matignon dans une douillette cohabitation. Il abat ses cartes : « Je suis, dit-il, pour l’alternance franche. Nous n’accepterons pas de compromis autre que le choix politique voulu par les Français en 1993. »
    Contrairement à ce qu’avait dit Mitterrand à propos de Giscard avant 1981, j’en conclus que si l’opposition gagne, et surtout si l’UDF précède à cette occasion le RPR, Giscard n’entend pas « garder » Mitterrand.

    7 décembre
    Roland Dumas m’explique comment il a réparé une bévue – ou semi-bévue – de Mitterrand. À Bonn, la semaine dernière, interrogé sur la réaction des pays occidentaux au terrorisme libyen, le Président a répondu d’une phrase sibylline : « Nous en saurons peut-être plus lundi. » Tout le monde comprend que les États-Unis enverront quelques avions sur Tripoli pendant le week-end.
    « C’est que Mitterrand le croyait. Rien ne s’étant passé pendant le week-end, j’ai dû, précise Roland Dumas, donner une autre version aux journalistes. J’ai raconté que j’avais reçu l’ambassadeur libyen dimanche pour lui tirer les oreilles, et que c’était à cette visite que Mitterrand faisait référence lorsqu’il avait dit imprudemment : attendez lundi ! »

    9 décembre
    Mitterrand annonce qu’il participera à « 7 sur 7 » sur TF1. Édith Cresson ayant royalement été entendue, dans une émission précédente sur la Cinq, par 3,6 % des téléspectateurs, autrement dit par très peu de monde, Mitterrand a jugé plus efficace, pour se fairemieux entendre, d’effacer le contentieux avec TF1 – contentieux nourri, depuis la guerre du Golfe et mes conversations avec l’ambassadeur d’Irak, par l’interview d’Édith Cresson par Giesbert et Carreyrou, l’été dernier. Le président de la République pouvait-il longtemps refuser d’apparaître sur la première des chaînes françaises ? Réponse : non.

    10 décembre
    Déjeuné avec Jean-Pierre Soisson. Il me dit que Mitterrand se plaint de ce que la vie politique « s’écoule entre ses doigts comme du sable ».
    Depuis quelques semaines, le Président ne parle plus que de Maastricht. Au point de planter là tout le monde en plein Conseil des ministres pour s’en aller parler à Kohl.
    Maastricht suffira-t-il à faire oublier tout le reste aux Français ? Soisson en doute : l’Europe, pour les Français, demeure lointaine. Le concret n’est pas là. Quant à la ratification du traité européen, ce n’est pas une mince affaire. Si le Parlement est consulté, il est à craindre que des députés de l’opposition (Pierre Mazeaud est de ceux-là, selon Jean-Pierre Soisson) crient à l’anticonstitutionnalité du projet et ne réclament un référendum que le Conseil constitutionnel leur accordera.
    « Mieux vaut prendre les devants, me dit-il. Un référendum sur les accords européens serait préférable, à tout prendre, à un référendum sur le passage au quinquennat, qui tournerait à l’obligation, pour Mitterrand, de se démettre en 1993 ! »
    Curieux homme que ce Soisson ! Comment a-t-il fait pour trouver son chemin, de Giscard à Mitterrand, ministre de l’ouverture du second, compagnon de route du premier ? Présent dans le gouvernement Chirac de 1974 à 1976, il l’a été également dans les gouvernements Barre I, II, et III, pour enchaîner, après une brève interruption, dans le gouvernement de Michel Rocard. Et encore, j’oubliais d’écrire qu’il avait commencé sa carrière comme conseiller d’Edgar Faure avant 1974 !
    Une grande continuité dans les méandres de la vie politique, dont je me demande à quoi il la doit : obédience philosophique ou habileté politique ? Les deux, peut-être, après tout.
    Il y a quelques années, il m’avait invitée à venir le voir chez lui, àAuxerre dont il était (est toujours) le maire. Il y connaissait tout le monde, tenait meeting à tous les coins de rue, sans négliger de goûter les bourgognes dont il est un des meilleurs connaisseurs. Il avait été au lycée avec Guy Roux, l’entraîneur du club de foot d’Auxerre, et avait gardé avec lui des rapports de potache. À aucun moment de sa vie politique, à aucun de ses changements de cap les Auxerrois n’ont manifesté d’étonnement : il est maire sans interruption depuis 1971 46

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