Chronique de mon erreur judiciaire
évidemment convaincus d’avoir subi ce qu’ils racontaient. Ils ne mentaient donc pas au sens strict du terme. Ce qui ne signifie pas qu’ils l’avaient réellement vécu. Et l’interprétation à la lettre de leur récit aurait pu conduire à des conclusions erronées. » Des propos d’une acuité exceptionnelle qui me frappent parce que, en les découvrant, je les ai crus écrits pour moi. J’ai même eu le sentiment que cet auteur connaissait mon intimité, était entré au sein de ma famille et me décrivait. Le récit de Sébastien, dans un premier temps spontané, fut à mon sens, quand on le reconsidère avec le prisme d’explications de cet expert, induit par un environnement hostile. Odile, qui comme moi a eu besoin de comprendre, l’a interrogé un jour et, face à ses affirmations, a pu constater que rien n’était vrai dans ses accusations contre moi. Et elle a eu la franchise comme l’honnêteté de me le rapporter. Mais Sébastien pourra-t-il un jour comprendre que rien de tout cela n’est vrai ? Je l’espère encore.
*
Jeudi. 10 heures passées. Et l’audience n’a toujours pas commencé ! On attend Myriam Badaoui. Aux dires des avocats, personne ne sait où elle et son escorte se trouvent. En fait, elle arrive peu après, les gendarmes ayant oublié d’aller la chercher à la maison d’arrêt. Décidément, ce procès réserve chaque jour sa surprise.
Myriam Badaoui refait soudain surface, et l’audience peut reprendre à midi, par une nouvelle audition de son mari. Qui reconnaît le viol de ses enfants, entre 1995 et 2000, mais réfute toute autre agression. Il précise à nouveau que seuls quatre adultes sont impliqués : lui, son épouse, et le couple voisin David Delplanque – Aurélie Grenon. Ce qu’il décrit est odieux, lui-même en est honteux, mais au moins a-t-il l’air sincère quand il s’exprime, à la différence de sa femme sous la coupe de laquelle il se recroqueville.
Pour bien imprégner l’esprit des jurés, mon avocat le supplie, en mon nom et en celui de mon épouse, de redire la vérité, cette vérité qu’il a déjà affirmée dans une lettre du 17 novembre 2001 adressée au juge d’instruction où, trois jours après l’arrestation de six des accusés, il avait écrit : « Je peux vous affirmer que ces personnes n’ont rien fait. » Et là, à nouveau, il nous innocente.
Mais cela suffira-t-il ?
Chapitre 47
Le procès, Acte V, scène 3
ou
Le tribunal des parties civiles
Le long procès d’Outreau approche de ses conclusions. Et, en ce jour de juin 2004, donne la parole aux représentants des nombreuses parties civiles, pour la plupart organismes ou associations de lutte contre la pédophilie. Une parole qui va vite se charger d’aigreur, voire de colère, confondre la défense des enfants et la dénonciation d’innocents, devenir une sorte de supplétif de l’accusation au grand dam de la défense. Avec des éclats et des tumultes à la clef.
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Premier à monter au front, le conseil de l’association Enfance et Partage. Sur un ton vif, cette femme estime que la parole de l’enfant dérange et remet en cause la prudence recommandée dans les ouvrages de Paul Bensussan. Elle s’interroge sur le recueil de cette parole et s’étonne du laps de temps pouvant exister entre les déclarations d’un enfant reçues par une assistante maternelle et une audition par un juge d’instruction. Autant de questions légitimes mais un peu limites qui la conduisent à un nouvel éclat. En effet, à un moment, elle dérape et assène que les parties civiles ont subi la dictature de la défense accrochée à la thèse que « les adultes ne mentent jamais », avant d’accorder à Myriam Badaoui le prix de la première girouette de France. Emportée par sa passion, cette juriste verse dans le militantisme exacerbé, en arrivant à pleurer, larmes relevant à mon avis du jeu de scène.
Le conseil de l’association de Défense de l’Enfance et des Parents séparés est encore plus outrancière quand elle proclame que « tous les adultes ici présents sont coupables, les personnes ici ayant été triées ». Recherche-t-elle la vindicte ou la vérité ?
Tout aussi emportée, voilà désormais au micro celle qui représente l’association Enfance majuscule. Se demandant comment il est possible dans un pays comme le nôtre de voir des enfants violés, battus, humiliés pendant des années au nez et à la barbe des services sociaux
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