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Et Dieu donnera la victoire

Et Dieu donnera la victoire

Titel: Et Dieu donnera la victoire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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subsistances, l’afflux des gens des faubourgs et des villages proches qui avaient fui devant l’armée anglaise ayant presque doublé le chiffre de la population.
     
    Les Anglais avaient à leur tête, avec Salisbury, un des meilleurs capitaines d’Angleterre : jeune, beau, courageux, agressif et, de surcroît, excellent organisateur. Orléans ne pouvait compter pour assurer sa défense que sur le gouverneur, M. de Gaucourt, que l’on disait timoré, et maître Jacques Boucher, trésorier du duc Charles d’Orléans, qui n’avait rien d’un chef de guerre. Le capitaine qui manquait à la ville se présenta en la personne d’un fils illégitime du duc Louis : celui qu’on appelait le Bâtard d’Orléans, puis Dunois ; il était le demi-frère de Charles, prisonnier à Azincourt depuis huit ans, et qui, dans la Tour de Londres, prenait son mal en patience, en attendant que l’on eût payé sa rançon, à composer des poèmes où s’épanchait sa nostalgie de la terre natale.
    Dunois parvint sans encombre à pénétrer dans la ville accompagné d’une solide escorte, au nez et à la barbe des Anglais occupés à bûcheronner, à terrasser et à bâtir leurs fortifications. Il se libéra d’une grande colère et annonça une bonne nouvelle :
    – Les Anglais ont failli à leur parole ! s’écria-t-il. Ils avaient fait serment de ne pas attaquer cette ville dont le seigneur est leur prisonnier et donc incapable de la défendre. Et les voilà qui nous assiègent ! En revanche, il leur faudra des mois pour contourner entièrement Orléans avec leurs bastilles. D’ici là, j’espère, nous aurons reçu du secours. Les États généraux du royaume se sont tenus récemment à Chinon et ont décidé de nous venir en aide. Patience et haut les coeurs !
    C’était un discours optimiste. Trop peut-être : il sentait la bravade. On fêta néanmoins le Bâtard comme le Messie, mais sans grande conviction : l’armée de secours, on l’attendait déjà depuis des semaines...
     
    La dauphine Marie venait d’accoucher, d’une petite Catherine. Elle vint en compagnie de sa mère, Madame Yolande, la présenter à son époux qui s’en trouva tout ragaillardi, encore qu’il eût préféré qu’elle lui donnât un garçon. Elle amenait avec elle son premier fils, Louis, qui, âgé de cinq ans, n’avait rien d’un Hercule et d’un Adonis : il avait hérité les traits ingrats de sa mère dont on disait qu’il suffirait de la montrer aux Anglais pour les faire fuir, et la complexion malingre de son père, mais avec, dans le regard, une étincelle de malice.
    Au soir de cette présentation, Charles dit à Marie :
    – Ma mie, nous avons fait de si beaux enfants qu’il ne faut pas en rester là. Je vous rendrai visite ce soir dans votre chambre.
    Il prenait cette décision à la fois comme un hommage dû à son épouse et une corvée incontournable. La Louvette partie rejoindre son père exilé en Provence, Mme de Bothéon revenue dans sa famille, il s’ébattait dans un gynécée de jeunes concubines dont la moins appétissante était plus agréable à regarder que ce laideron dont on avait fait son épouse. Expulsé de la cour de par la volonté de Richemont, le premier médecin Cadart avait été avantageusement remplacé dans ses fonctions de pourvoyeur de chair fraîche par deux acolytes qui tenaient le dauphin sous leur coupe : le grand chambellan Georges de La Trémoille et le chancelier Regnault de Chartres, archevêque et duc de Reims, un grigou dont on disait : « Il ne sert ni Dieu ni personne, il se sert. »
    Grâce à ces deux complices, le dauphin ne se trouvait jamais seul au moment de gagner sa chambre. La venue de son épouse ne troublait guère ces aimables habitudes : il l’honora fort convenablement à plusieurs reprises, pour la bonne cause, puis, sans le moindre scrupule, revint à ses favorites.

6
    Va, Fille Dieu, va !

Vaucouleurs, début 1429
    Jeannette était occupée à seller son cheval et à lier son bagage sur le troussequin lorsque Bertrand de Poulengy survint et lui annonça que le capitaine Robert de Baudricourt l’attendait dans la citadelle. Il ajouta, d’un air mystérieux :
    – Tu peux défaire tes bagages. Il y a du nouveau.
    Il ne la conduisit pas directement au capitaine mais dans une salle basse où se tenait assis le cavalier de Lorraine qu’elle avait croisé la veille, à côté d’un autre garçon qui, l’ayant aidée à se défaire de son manteau, lui dit

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