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Et Dieu donnera la victoire

Et Dieu donnera la victoire

Titel: Et Dieu donnera la victoire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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allure ? Moi, je ne sens plus mes os, ils sont comme de la pierre. Et si tu voyais mon arrière-train...
    Elle lui bourra la poitrine de coups de poing, lui lâcha une bordée de rire au visage. Elle était comme les autres lasse et moulue mais, soutenue, disait-elle, par ses frères du Paradis, elle aurait pu chevaucher jusqu’au bout du monde.
    – Moi aussi, dit-elle, j’ai mal au fondement, mais tu ne le verras pas, brigand !
    Lorsque l’escorte arriva en vue de Sainte-Catherine-de-Fierbois dont les toits mouillés de pluie étincelaient sous la lune du printemps, Jeanne dit à Colet de Vienne :
    – Puisque nous avons un peu d’avance, permets que je m’arrête dans ce village. Si près de Chinon, il ne doit pas y avoir d’Anglais ni de Bourguignons dans les parages. Je ne t’importunerai plus, mais laisse-moi adresser une prière à Catherine : c’est une de mes saintes.
    Il dut bien lui accorder cette faveur, conscient qu’il ne ferait pas bon lui résister.
    – Je te donne une heure, pas plus. Tu partiras à pied pour ne pas attirer l’attention. Les deux frères de Honnecourt garderont la porte de l’église.
    Lorsque Jeanne pénétra dans le sanctuaire, le prêtre était en train d’enlever des vases des bouquets fanés de primevères. Il resta bouche bée quand surgit ce soldat qui avait la démarche et les traits d’une fille. Il la vit rejeter son chaperon sur les épaules, s’agenouiller devant l’effigie de sainte Catherine appuyée à la roue de son supplice, et se mettre à marmonner une prière, avant de lui demander de l’entendre en confession.
    – Si nous voulons coucher ce soir dans de bons lits moelleux, dit Colet en remontant en selle, il va falloir chevaucher toute la journée. Je suis content de vous, mes amis : en onze jours, nous avons effectué un trajet de cent cinquante lieues. Les meilleurs courriers n’auraient pas fait mieux.
    Ils longèrent la Vienne grossie par les premières crues du printemps. Le soleil caressait les vignes dont les dernières feuilles rousses étincelaient des averses de la nuit. Soudain, à un détour du chemin, Colet arrêta son cheval, se découvrit et se signa. L’index pointé vers un bouquet d’arbres qui laissaient apercevoir un amas de toitures, il dit simplement :
    – Voici Chinon, mes amis, nous sommes arrivés. Dieu était avec nous...
    1 - Environ quatre cents kilomètres.

Chinon, février 1429
    Le dauphin sortait de son oratoire la mine longue, des traces de larmes sur ses joues hâves et blêmes, une goutte de rhume en suspension au bout du nez. Il n’éprouvait pas plus de réconfort à ces prières qu’à ses confrontations avec lui-même.
    En apprenant la défaite infligée à l’armée d’Orléans par les Anglais, à Rouvray, il avait cru toucher le fond du désespoir. Que les Écossais se fussent mal conduits, qu’ils aient fait preuve de cette indiscipline qui était leur vice rédhibitoire, ce n’était pas pour le surprendre car il les avait vus à l’oeuvre à Verneuil, cinq ans auparavant, mais que le Bâtard, en qui il avait mis toute sa confiance, se fût conduit d’une manière aussi pusillanime le révoltait. Quant au comte de Clermont, un jeune étourdi incapable de s’imposer à ses Auvergnats, il devrait s’attendre à des représailles.
    Charles n’avait pas touché le fond du désespoir.
    Il avait appris peu après que les meilleurs capitaines rassemblés par Dunois avaient déserté, persuadés que la cause était perdue et que la ville n’avait rien de plus raisonnable à faire que de capituler.
    Comme naguère dans la salle de l’évêché à La Rochelle, des craquements précurseurs d’un effondrement imminent résonnaient de toutes parts.
    Du haut de sa morgue, le Gros Georges lui dispensait des conseils dont il se méfiait :
    – Monseigneur, il semble que les jeux soient faits. La seule résolution à prendre est de mettre, comme on dit, la clé sous la porte. Partez donc pour le Dauphiné. Vous y avez de fidèles sujets, ou pour l’Écosse où l’on vous vénère.
    Un sourire en coin, Charles lisait sans peine dans le jeu de cette outre de vanité, de lucre et de fourberie.
    – Merci de vous soucier de ma sécurité, mon bon ami, répondait-il, mais si je décide de m’exiler il faudra me suivre, et je doute que vous puissiez renoncer à vos biens.
    – Monseigneur, protestait l’hypocrite, je vous suivrais au bout du monde, nu comme Job ! Mais, si vous me l’ordonniez, je

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