Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Et Dieu donnera la victoire

Et Dieu donnera la victoire

Titel: Et Dieu donnera la victoire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
Vom Netzwerk:
numitris.
    – Ça suffit ! protesta Colet. Depuis trois heures tu me promènes au milieu de ces vieilles pierres. Rentrons !
    Elle le bouscula, lui reprocha d’être un homme de peu de foi. De retour à l’auberge, ils constatèrent avec dépit que le dauphin n’avait pas donné signe de vie. Ils passèrent l’après-midi à faire quelques voltes à cheval le long de la Vienne, sur la route de Bourgueil.
    – Demain, dit Jeanne, si nous n’avons toujours pas de nouvelles, nous irons pêcher à la ligne. J’y allais parfois avec mes compagnes, sur le bord de la Meuse, mais je m’y prenais mal et je revenais toujours bredouille.
    Le lendemain, aucun messager du château ne s’étant présenté, Jeanne et Colet empruntèrent des cannes à pêche aux deux colombes et, sous la garde de Richard qui passa son temps à somnoler à l’ombre d’un saule, ils prirent place dans une barque amarrée à une branche et rapportèrent une modeste friture pour le dîner.
    Avant de sauter hors de la barque pour regagner l’auberge, Jeanne avait eu l’heureuse surprise de voir se former sur la rivière, à quelques pas de la berge, le petit nuage qui, d’ordinaire, annonçait la venue de ses frères du Paradis. C’était saint Michel : il lui recommanda seulement de se montrer patiente et lui annonça que son heure allait sonner.
    Éperdue de bonheur, elle envoya un coup de pied dans les côtes de Richard pour le réveiller.
    Bertrand de Poulengy les attendait, en compagnie des frères de Honnecourt, devant une cruche de vin et un jeu de cartes.
    – C’est pour demain, dit-il, en fin d’après-midi.
    – Il faut que je trouve des vêtements de femme ! s’exclama Jeanne.
    – Je te le déconseille, dit Colet. Tu te présenteras dans ta tenue de voyage que tu feras laver et repasser par les servantes. Tu éviteras de manger de la frotte à l’ail comme ce matin.
    Il lui fit d’autres recommandations : observer une allure digne mais modeste, éviter dans ses propos les expressions vulgaires et les mots du patois lorrain qu’elle employait fréquemment, attendre qu’on l’interroge pour parler.
    – Voyons si tu sais faire la révérence. Plus lentement, avec plus de grâce, moins de raideur. Et ne plonge pas si bas : on dirait que tu vas cueillir des pissenlits !
     
    Le petit groupe s’avança sur la pente raide menant à la tour de l’Horloge plantée droit comme une pierre levée à l’avant du château. Colet précédait Jeanne. Suivaient Jean de Metz et Bertrand de Poulengy.
    En voyant paraître la Pucelle, l’un des gardes qui formaient la haie eut un mauvais rire et ricana :
    – Tudieu, la fière garce ! Si le dauphin ne la trouve pas à son goût, je lui ferais bien voir la feuille à l’envers !
    L’ayant entendu, Jeanne descendit de cheval, se planta devant le garde et, d’un air apitoyé, lui dit :
    – Mon pauvre garçon, tu as tort de parler ainsi du dauphin et de moi. Il te reste si peu de temps à vivre que tu ferais mieux de prier.
    Le ciel crépusculaire déployait ses bannières de feu au-dessus du Grand Logis dont les fenêtres scintillaient déjà de lueurs de torches et de chandelles, et d’où sortaient des rumeurs de voix et des rires.
    Un page s’avança vers Jeanne, s’inclina, lui tendit la main sur laquelle elle posa la sienne comme le lui avait montré Colet. Il la confia, à quelques pas de l’entrée, à un jeune et beau seigneur qui, d’une voix rauque et déplaisante qui contrastait avec son allure élégante, lui dit :
    – Je suis le duc Jean d’Alençon. Monseigneur le dauphin m’a chargé de vous conduire auprès de lui et de Madame Yolande, ma belle-mère.
    La grande salle brillamment illuminée grouillait de monde. Toute la cour, semblait-il, était présente, dans une débauche de vêtements aux couleurs vives, de fourrures et de joyaux qui, songea la Pucelle, faisaient insulte à la misère du royaume. Jeanne, éblouie, s’avança d’une allure incertaine dans cette foule qui s’était massée vers le fond de la salle occupé par une grande cheminée, et qui se taisait comme sur le passage du saint sacrement.
    – Je ne vois pas monseigneur le dauphin, dit Jeanne. Serait-il absent ?
    – À vous de le trouver ! dit le duc Jean. C’est une épreuve, mais je suis persuadé que vous en viendrez à bout.
    Jeanne vit s’avancer vers elle la haute stature d’un personnage au regard pétillant de malice, gras et vêtu comme un satrape, qui lui dit :
    – Bonsoir,

Weitere Kostenlose Bücher