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Et Dieu donnera la victoire

Et Dieu donnera la victoire

Titel: Et Dieu donnera la victoire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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n’y es pas allée de main morte. Ce discours que tu leur as tenu est dangereux : il ne faudra pas s’étonner si demain quelques-uns de nos capitaines manquent à l’appel.
    – Il n’y aura de défections, dit fermement la Pucelle, que de ribaudes.
    Le frère Pasquerel fulminait :
    – Nous allons devoir passer la nuit à fabriquer des hosties, alors, Dieu m’en est témoin, que je tombe de sommeil !
     
    À l’aube, Jeanne fit sonner la diane et commanda le rassemblement dans une prairie des bords de la Loire. Le frère Pasquerel avait fait travailler ses moines, si bien qu’ils arrivèrent avec de grandes pannetées d’hosties. Après la messe qui se déroula en plein air, confessions et communions débutèrent sans un murmure. Jeanne ayant donné l’exemple, tous suivirent. À midi sonnant au clocher de Muides, la cérémonie était terminée. Restait pour Jeanne à s’occuper des ribaudes.
    Elle les trouva rassemblées sur une grave du fleuve, en train de jaboter comme un troupeau d’oies, lavant leur linge ou faisant leur toilette. Elles avaient été informées de la menace d’éviction proférée par la Pucelle, car elles lui tournèrent le dos avec un bel ensemble. Elle s’avança hardiment au milieu d’elles.
    – Nous allons partir, dit-elle, mais vous resterez. Si l’une de vous désobéit, je la ferai jeter dans la Loire. Sachez que je ne vous en veux pas. La plupart d’entre vous sont sûrement de bonnes filles qui ont eu la vie dure et ont été abusées par des brigands. Dieu les accueillera dans Son sein, mais votre place n’est pas dans l’armée.
    Une catin dépoitraillée, au visage rubescent sous ses cheveux dénoués, s’avança vers Jeanne, les poings au creux des hanches, avec un air de défi.
    – Ce n’est pas toi, la soi-disant pucelle, qui vas nous priver de nos hommes. Même sous la menace d’une noyade, nous ne quitterons pas l’armée.
    – C’est bien ce que nous allons voir ! s’écria Jeanne.
    Elle sortit son épée, en porta la pointe entre les mamelles de la fille, qui recula dans le fleuve jusqu’à ce que l’eau lui montât à la ceinture.
    – Quant à vous, mes belles, s’écria Jeanne, partez avant que je me fâche !
    Du plat de la lame, sans y mettre trop de vigueur, elle frappa l’arrière-train de quelques garces qui regimbaient. Elle s’amusa de les voir ramasser leurs frusques et s’enfuir à demi nues.
    Lorsque Jeanne rejoignit l’avant-garde, elle trouva La Hire qui l’attendait, un coffret à la main.
    – Cadeau du prince des Écorcheurs ! dit-il. Tu trouveras là-dedans les clochettes que j’ai arrachées de mon pourpoint. Quand tu seras de retour à Domrémy, tu pourras les attacher au cou de tes moutons...
     
    Le dernier jour d’avril, au pas des boeufs, l’avant-garde arriva en vue d’Orléans.
    Dressée sur ses étriers, Jeanne se demanda si elle rêvait ou si elle était victime d’une hallucination : elle pensait se trouver rive droite, sous les murs de la ville ; on venait d’arriver par la rive gauche, en pleine campagne.
    – Ah ça, dit-elle en sautant de cheval, il semble qu’on se soit moqué de moi ! Jean, qu’est-ce que ça signifie ? Pourquoi avons-nous pris la route de Sologne et nous trouvons-nous devant ce fleuve à franchir ? On s’est joué de moi !
    – Jeanne, dit Gilles, calmez-vous. Nous n’avons fait, en suivant cette route, qu’obéir aux consignes du lieutenant général d’Orléans, messire le Bâtard...
    – ... et nous sommes d’accord avec lui, ajouta d’Alençon. Je sais qu’il te tarde de mettre la main à ton épée, mais dis-toi bien que si nous avions emprunté la rive droite, celle de la Beauce, nous serions à l’heure présente en train d’assiéger Beaugency ou Meung. La rive droite est anglaise et celle-ci française. Si nous voulions arriver dans les meilleurs délais, c’est bien par-là que nous devions passer.
    Jeanne se retourna brusquement et, le front contre sa selle, la frappa de ses poings. Elle se refusait à entendre de tels arguments : elle était venue pour se battre et elle se trouvait comme paralysée. Elle se dit qu’on avait abusé de son innocence et de son ignorance, alors qu’elle ne pouvait se prévaloir que de sa foi et de son crédit auprès du ciel.
    Gilles de Rais ajouta qu’afin d’éviter d’alerter les Anglais installés aux Tourelles, au monastère Saint-Augustin et à la bastille Saint-Jean-le-Blanc qui défendait la rive du côté de

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