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Et Dieu donnera la victoire

Et Dieu donnera la victoire

Titel: Et Dieu donnera la victoire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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qui n’était pas menacée par la même chaîne de bastilles que le côté opposé.
    La nuit était presque tombée, mais le centre de la cité scintillait de milliers de feux : chandelles placées aux fenêtres, torches, pots à feu plantés de part et d’autre de la chaussée. Aussi loin que portait le regard le long des rues tortueuses, la foule se pressait et délirait dans un vacarme de musique, d’ovations, de chansons et de noëls. Tous voulaient voir la Pucelle, l’approcher, toucher ses vêtements, son épée. Des femmes lui présentaient leur nourrisson, des gamines s’accrochaient à sa selle et lui tendaient la main. On lui envoyait à pleines fenêtres des baisers, des rires de bonheur, des chansons d’amour et des confettis. Elle devait s’arrêter pour laisser les sergents à baguette lui ouvrir un passage. Un homme portant une torche s’était approché de si près qu’il mit le feu à sa bannière ; elle l’éteignit elle-même en un tournemain et elle se tourna vers Dunois.
    – Conduisez-moi à la cathédrale Sainte-Croix. Je dois remercier Dieu de m’avoir guidée sans encombre jusqu’à vous.
    Il fallut céder à sa requête alors qu’elle était attendue chez le trésorier général, maître Jacques Boucher, qui demeurait rue du Tambour, de l’autre côté de la ville, près de la porte Regnard. Elle se prosterna devant l’autel, les bras en croix.
    – Jeanne, dit maître Boucher, vous êtes ici chez vous. C’est un grand honneur de vous recevoir. Voici ma femme et ma fille Charlotte qui se mouraient d’impatience. J’ai fait préparer un souper pour vous et votre suite.
    Alors que ses compagnons faisaient honneur à la table dressée dans la grande salle, Jeanne se contenta d’une soupe de pain qu’elle noya d’une large rasade de vin.
    – Comment fais-tu, lui demanda La Hire, pour tenir le coup ? La fatigue ne semble pas avoir de prise sur toi et tu as autant d’appétit qu’un pinson. Par mon bâton, si j’observais un tel régime j’en crèverais !
    Elle passa cette première nuit dans le lit de Charlotte, une gamine de dix ans environ, qui avait exigé cet honneur de sa famille. Avant de gagner sa couche, Jeanne s’attarda à la fenêtre pour observer la chaîne de bastilles dressées sur un horizon encore barbouillé de strates violâtres, ponctuées de quelques feux tremblotants. Combien de jours allait-on attendre, se demandait-elle, l’arrivée de l’armée de Blois qui donnerait le signal des opérations ? Combien de jours à se morfondre ?
     
    Le premier soin de la Pucelle en se levant fut de demander à son hôte de la conduire sur les remparts de la porte Renart donnant sur la route de Blois. Il la guida jusqu’au châtelet à travers une foule qui criait ses noëls. Du dernier étage, on avait une vue large et profonde sur l’arrière-pays.
    – La première bastille, là, sur votre droite et sur l’autre rive, dans le faubourg du Portereau, dit maître Boucher, est celle du Champ-Privé. Au milieu de la Loire, sur cette île plantée de saules, vous pouvez voir le boulevard de l’île Charlemagne. Rive droite, voici la forteresse de Saint-Laurent-des-Orgerils, flanquée de la bastille de la Croix-Boisée. Un peu plus à droite, en arc de cercle, les bastilles de Londres, de Rouen et de Paris. Au-delà, cette masse de verdure est la grande forêt d’Orléans où l’on va chasser en temps de paix.
    Ils se portèrent vers l’ouverture méridionale d’où la vue embrassait l’immensité du fleuve.
    – Le pont dont nous avons fait sauter quelques arches, poursuivit le trésorier, s’appuie sur l’île Saint-Laurent où les Anglais ont bâti un petit retranchement. Après la Belle-Croix dressée sur le pont, cette imposante forteresse est le fort des Tourelles avec son boulevard qui en fait le tour. Plus au sud, c’est la bastille des Augustins. Enfin, derrière cette île étirée en longueur, on distingue la bastille de Jean-le-Blanc qui, avec celle de Saint-Loup, sur l’autre rive, constitue le terme du dispositif de défense... Mais qu’avez-vous, mon enfant ?
    Appuyée au mur, livide, Jeanne paraissait sur le point de rendre l’âme.
    – Ce n’est rien... balbutia-t-elle. Une sorte de vertige. Je n’imaginais pas... toutes ces fortifications... Jamais nous n’en viendrons à bout ! Jamais...
    – J’avoue que cela fait impression, mais la tâche sera moins ardue que vous ne l’imaginez. Les Anglais ont six mille hommes, c’est

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