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Gauvain

Gauvain

Titel: Gauvain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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après avoir entendu la messe, s’éloigna-t-il avec ses dix compagnons.
    Tout en chevauchant, ils plaisantaient et échangeaient d’aimables propos pour se distraire et se détendre. Ils atteignirent de la sorte les bords d’un grand fleuve et s’inquiétèrent de trouver quelqu’un qui les fît passer sur l’autre rive. Ils suivirent le chemin qui longeait les flots, très profonds et si larges que le projectile lancé par une fronde n’en aurait pas même franchi le quart. « Ce passage nous est interdit à ce qu’il me semble », dit le roi.
    D’un même geste, ils firent alors obliquer leurs montures à gauche vers le pied d’une colline qu’ils longèrent une bonne lieue en montant graduellement. Or, une fois parvenus à mi-pente, ils aperçurent au loin, mouillée près de la rive, une embarcation. « Voilà ce qu’il nous faut ! » s’écria joyeusement le roi. Ils s’ébranlèrent de ce côté, mais Arthur, en homme avisé, pria Kaï de prendre les devants et d’aller aux nouvelles. Le sénéchal s’élança au galop et ne tarda guère à atteindre l’endroit où la barque était amarrée. Deux mariniers étaient en train d’y embarquer un chevalier et son destrier.
    « Au nom du roi Arthur, attendez-nous ! » leur cria-t-il, mais ils ne parurent seulement pas l’entendre. Ils venaient de larguer les amarres et, à grands coups de perche, ils s’éloignèrent de la berge. Kaï y demeura seul et, bouillant de colère, accablait d’imprécations les mariniers. Cependant, en examinant plus attentivement le chevalier qui se trouvait à bord, il crut reconnaître Gauvain et se mit à crier très fort : « Gauvain ! Gauvain ! reviens vers nous ! Le roi est ici, qui veut traverser pour aller à ta recherche ! Attends-nous ! » Mais il n’obtint aucune réponse. La barque glissait sur l’eau et, bientôt, elle aborda en face. Kaï vit alors le chevalier mettre pied à terre, enfourcher sa monture et disparaître derrière un bosquet. Il en fut tout étonné. Pourquoi Gauvain n’avait-il pas répondu à son appel ? Entre-temps, la barque avait entrepris de revenir vers lui. Une fois qu’elle eut accosté, il se précipita vers les nautoniers. « Qui était le chevalier ? demanda-t-il. – Nous l’ignorons, répondirent-ils. Il nous a demandé de le conduire au-delà du fleuve, et nous l’avons fait. – Mais pourquoi ne pas m’avoir attendu ? » L’un des hommes répondit simplement : « Telle est la coutume. »
    Sur ces entrefaites, le roi Arthur survint avec ses compagnons. Kaï eut tôt fait de les mettre au courant : il avait vu et hélé Gauvain, mais celui-ci n’avait pas daigné répondre. Arthur dit : « Je suis bien soulagé d’apprendre qu’il est en vie, mais que peut bien signifier son étrange comportement ? Eh bien ! nous allons traverser, nous aussi, puis nous le suivrons à la trace. » Sur ce, il dit aux mariniers : « Faites-nous passer et nous vous récompenserons tous les deux. »
    L’un des hommes répondit : « Il est une coutume que doivent respecter tous ceux qui désirent utiliser cette embarcation. – Quelle coutume ? demanda le roi. – Voici, reprit l’autre marinier. Cette barque devient si lourde quand ses passagers sont en nombre pair qu’elle chavire et coule sans recours, sitôt parvenue au milieu du fleuve. J’en sais quelque chose, mon père et mon grand-père se sont noyés ! Au surplus, nous avons vu tant de gens engloutis que nous en sommes obsédés. Aussi faisons-nous très attention. Si elle emmenait douze, dix, huit ou seulement deux passagers, cette barque serait bientôt vide. Et aucun n’en réchapperait. Enfin, ne vous méprenez pas sur mes paroles, la barque est toujours à la disposition de ceux qui veulent traverser, mais ils ne doivent être à aucun prix ni six, ni douze, ni seize, ni vingt.
    — Vit-on jamais pareil prodige ! s’écria le sénéchal. Et s’il s’agit d’un groupe de treize ou dix-neuf ? – Dans ce cas, nous n’avons nul sujet de crainte : si les passagers sont en nombre impair, la barque ne chavire pas. – Par Dieu tout-puissant ! dit le roi, nous avons été bien inspirés : nous sommes onze, sans compter vous deux, nous serons donc tous en sécurité, puisque cela fait treize. »
    Sans plus tarder, les nautoniers les embarquèrent donc, et la traversée se fit sans encombre jusqu’à l’autre rive. Bientôt, ils débarquèrent dans une grande prairie que

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