Histoire du Japon
les provinces centrales et le littoral oriental. Il paraît certain que Hideyoshi (qui avait alors moins de soixante ans) envisageait de mener une vie retirée une fois la campagne de Chine terminée.
Depuis quelque temps, il se souciait beaucoup de la question de la succession, car son fils unique, Tsurumatsu, était mort au berceau deux ans auparavant, et il jugeait peu vraisemblable d’avoir un autre enfant. Après bien des hésitations, il s’était senti obligé de choisir son neveu Hidetsugu pour héritier, et au début de 1592 il installa ce dernier au Jûrakudai. Alors que Hideyoshi s’occupait des affaires étrangères, Hidetsugu devenu régent profita de son absence de Nagoya pour mener une vie indigne, et sa réputation ne tarda pas à s’en ressentir. Hideyoshi en était conscient et disait en badinant qu’il souhaitait pouvoir nommer une de ses nièces favorites à la charge suprême.
En septembre 1593, alors qu’il avait remis le Jûrakudai à Hidetsugu, pensant qu’il deviendrait son successeur, au commencement de l’année précédente, il appr t à Nagoya que sa maîtresse Yodogimi (alors à Osaka) avait donné le jour à un fils, Hiroi, qui prendrait plus tard le nom de Hideyori. Il avait toujours voulu que son héritier vécût au château d’Osaka, et cela avait été sa principale raison de construire à Fushimi, à quelque distance du centre de Kyoto. Il voulait que son nouveau palais fût de construction massive mais intérieurement élégant, et tandis qu’on le construisait il fit savoir qu’il souhaitait que ses appartements et leur décoration fussent « d’un style plaisant à Rikyû ». C’était là un curieux propos, car Rikyû, son conseiller en matière esthétique, avait été contraint de se suicider par Hideyoshi près d’un an plus tôt. Il regrettait maintenant cette cruauté gratuite, acte inconsidéré qu’il n’aurait pas commis dans sa jeunesse.
Le 10 février 1593, toujours à Nagoya, il écrit aux membres de sa famille, notamment au mari de sa sœur aînée Tomo, en manifestant un souci presque excessif pour leur santé, leur recommandant de prendre des bains thermaux et de mener une vie sans soucis. Peu de temps après – en avril –, pour rompre la monotonie de sa vie qu’il passe dans des états-majors à attendre des nouvelles de Corée, il se prit d’un vif intérêt pour la danse et le théâtre nô, auxquels l’initia un acteur qui avait été invité à Nagoya pour les fêtes de la nouvelle année. Il travailla avec acharnement, et dans une lettre adressée à sa femme il apprend à celle-ci qu’il a mémorisé dix pièces. Dans un autre message, il annonce qu’il ira en Corée dans le courant du mois (avril ?). Des envoyés sont venus de Chine demander grâce et attendent à Pusan un vent favorable.
Pendant toute cette période, la question d’adoption le tracassait, car il n’était pas satisfait de Hidetsugu. Il avait aussi adopté Hidetoshi, un autre neveu *. La femme de Hideyoshi ne s’intéressait guère à ce jeune homme, ce que Hideyoshi lui reprochait sévèrement dans une lettre, disant : « Vous êtes sans enfant. Vous devriez le traiter comme votre fils. » Hidetoshi fut envoyé chercher et arriva à Nagoya au printemps 1593, où il fit une bonne impression sur le Taikô, qui déclara que lorsqu’il prendrait sa retraite le jeune homme ferait un excellent remplaçant.
Mais le tableau ne tarda pas à changer, car à la fin de juin Hideyoshi écrit à sa femme que les envoyés de la cour des Ming sont arrivés et qu’il leur a transmis ses conditions. Il parle comme un vainqueur imposant sa paix à un ennemi vaincu, et dit que si les Chinois tiennent leurs promesses il leur pardonnera et fera chez lui un retour triomphal. L’épisode se situe, rappelons-le, après que Konishi a été chassé de Pyongyang et qu’une défaite désastreuse a été évitée grâce à l’habileté de Kobayakawa.
Plus tard dans l’année, il parle dans une lettre de la bonne nouvelle qu’il a reçue avec l’annonce de la mise au monde par Yodogimi de son fils, « Hiroi », « l’enfant trouvé », venu remplacer son fils perdu Tsurumatsu. Il fait mine d’être indifférent**. Il ne peut donc encore quitter Nagoya, où il reste du travail à faire, mais il espère être à Osaka à la fin d’octobre. Il écrit dans des termes similaires à « Fuku », mère de Hideie et femme de son général favori Ukita. Le messager,
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