Histoire du Japon
politiques.
Il y avait dans cette accusation une part de vérité, mais les mariages des enfants de Ieyasu ne pouvaient manquer d’exercer une certaine influence politique. En fait, si Ieyasu s’en était tenu strictement à la politique négative de Hideyoshi, il aurait perdu sa propre autorité et encouragé une désunion qui ne pouvait guère être à l’avantage de Hideyori et de la maison de Toyotomi. Ieyasu s’en tint donc à ses intentions personnelles, et les deux partis – les régents vexés à Osaka et Ieyasu à Fushimi – furent à deux doigts de s’affronter. Des préparatifs de guerre furent faits de part et d’autre, mais on en arriva une fois encore à un arrangement pacifique. Les commissaires, Ishida Mitsunari en tête, reconnurent leur erreur et déclarèrent s’en repentir.
Les intrigues de Mitsunari prirent désormais un autre cours. Sa méthode consistait à stimuler des plaintes contre Ieyasu, et il décida de susciter une querelle entre Ieyasu et Maeda Toshiie, le tuteur de Hideyori, qui était sincèrement dévoué à la cause de son pupille. Mais une épreuve de force entre eux ne pouvait que causer leur déconfiture à tous deux, car elle diviserait les grands feudataires en deux camps et finirait par un désastre. Heureusement, Ieyasu et Toshiie étaient tous les deux des hommes sages, qui savaient voir plus loin que la surface des événements. Ils parvinrent à un arrangement grâce aux bons offices de Hosokawa Tadaoki, homme doué de bon sens qui perça rapidement à jour les stratagèmes d’Ishida Mitsunari. Toshiie alla à Fushimi rendre visite à Ieyasu en mars 1599 et Ieyasu lui rendit la pareille à Osaka quelques jours plus tard. Épuisé par des années de bataille, Toshiie se trouvait alors dans un triste état de santé. Il mourut en mai dans sa soixante et unième année, et ses partisans passèrent ensuite au service de Ieyasu, au grand dépit de Mitsunari, qui s’était imaginé qu’il pourrait profiter d’un antagonisme durable entre deux membres du conseil de régence.
Le prestige de Toshiie était grand, et en fait de sagesse, il pouvait rivaliser avec Ieyasu. Des membres du conseil après la mort de Toshiie, Môri n’était pas sûr, et l’on savait qu’en Aizu Uesugi avait de grandes ambitions que Mitsunari prenait soin d’encourager. Ukita également était d’une loyauté douteuse.
Les perspectives d’une révolte réussie contre Ieyasu semblaient donc bonnes, mais Mitsunari était impatient, et il fit contre lui deux tentatives d’assassinat : la première, au début de 1599, lorsque Ieyasu se rendit au château d’Osaka avec Hideyori ; la seconde trois mois plus tard, lorsqu’il alla voir Maeda Toshiie. Les desseins de Mitsunari furent découverts par Katô et d’autres généraux, qui décidèrent de le tuer. Mais Mitsunari parvint à s’échapper à Fushimi, où il chercha la protection de Ieyasu. Les généraux le poursuivirent, mais Ieyasu les persuada qu’il valait mieux garder ce conspirateur fugitif en réclusion. C’est ainsi qu’il fut envoyé dans sa propre forteresse de Sawayama (Hikone), dans la province d’Omi, avec ordre de s’y tenir tranquille.
On ne sait au juste pourquoi Ieyasu se montra si indulgent, mais il sentait probablement que Mitsunari pouvait être utile. Il s’occupa ensuite des collègues commissaires de Mitsunari et chassa de Fushimi Maeda Geni et Natsuka Masaie, les gouverneurs qu’on y avait nommés selon le désir de Hideyoshi, les remplaçant par son fils Hideyasu et s’installant lui-même au château d’Osaka, qui avait été la place forte de Hideyoshi et le siège du gouvernement.
La place de Maeda Toshiie au conseil de régence fut reprise par son fils Toshinaga, qui regagna son fief. Parmi les autres membres (Uesugi, Kagekatsu, Môri Terumoto et Ukita Hideie), Uesugi, sans démissionner, retourna dans son fief d’Aizu, où il avait récemment été déplacé. Le conseil ne comptait plus ainsi que trois membres actifs, Ieyasu, Terumoto et Hideie, et le pouvoir de décision appartenait en fait au seul Ieyasu. Il faisait parfois mine de consulter les Tairô, mais en pratique il comptait avant tout sur le soutien des généraux, dont des fiefs de valeur entretenaient la loyauté. Par ailleurs, il avait renoué avec le système des otages, notamment en détenant la veuve de Hideyoshi, Kita Mandokoro, en guise de protection contre les représailles de ses parents.
En cela comme en
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