Histoire du Japon
d’autres choses, il ne respectait pas sa promesse à Hideyoshi, mais on ne peut guère lui reprocher de ne pas avoir maintenu le conseil de régence. Ne serait-ce que pour sa défense personnelle, il fallait bien qu’il prenne des mesures contre les conspirations auxquelles il était confronté. Pendant un temps, il ne se préoccupa pas de Mitsunari, car il savait que, pour lui, le véritable danger ne résidait pas dans ses intrigues mais dans les ambitions des grands daimyô. Ces hommes n’avaient pas besoin de l’encouragement de conspirateurs : que le pouvoir passât de main en main et que chacun d’eux prit ce dont il pouvait s’emparer faisait partie de la tradition de leur classe. L’histoire féodale du Japon est tout entière faite de l’essor et de la chute des grandes maisons. Il n’y a rien qui ressemble à la stabilité dans le pays dans son ensemble ou dans les seigneuries qui le composaient jusqu’aux jours de Hideyoshi, où l’on parvint à une paix difficile, ou plutôt à une trêve, qui dura tout au long de la guerre coréenne et prit fin au moment du retrait.
Sekigahara
Le premier à se révolter ouvertement contre Ieyasu fut Uesugi Kagekatsu. Il se préparait à agir depuis quelques mois lorsque, en mai 1600, le vigilant Ieyasu le fit venir à Osaka afin d’expliquer sa conduite. Recevant une réponse insolente, Ieyasu imagina un plan de campagne qui consistait à marcher directement contre lui à partir du sud avec une armée de 50000 hommes, cependant que trois autres armées approcheraient par l’ouest, le nord et l’est. Il quitta Osaka le 26 juillet, et, le lendemain, il s’arrêta à Fushimi, dont le gouverneur, Torii Mototada, était un ancien camarade. Les deux vétérans passèrent la nuit à évoquer des souvenirs et se quittèrent à l’aube, chacun sachant que le château pourrait être attaqué et que Torii mourrait à sa défense.
Ieyasu ne se pressa pas. Il suivit à petites étapes la route du Tôkaidô, arrivant à Edo le 10 août. Il y demeura jusqu’au 1er septembre, où il partit en direction du nord afin d’établir son quartier général à Oyama, dans le Shimotsuke. S’il avançait aussi lentement, c’était pour voir comment évoluaient les plans de Mitsunari. Sa campagne contre Uesugi n’avait qu’une importance mineur, car après avoir essuyé quelques revers, Date et Mogami, qui avait approché l’Aizu à partir du nord-est, purent arrêter Uesugi et le maintenir sur la défensive.
Peu après son arrivée à Oyama, Ieyasu apprit, comme il s’y attendait, que les intrigues de Mitsunari avaient progressé et portaient leurs fruits. Il avait quitté son château de Sawayama, et il était en pleine révolte à la tête d’une puissante coalition. C’était une situation à laquelle Ieyasu était tout préparé, car il n’avait jamais envisagé de poursuivre sa campagne en Aizu. Ce n’était qu’une feinte pour tromper Mitsunari.
On peut être certain que Ieyasu était bien informé des activités de son ennemi. Le 8 septembre, à l’issue d’un siège de dix jours, une forte armée aux ordres de Mitsunari avait réussi à prendre le château de Fushimi après un combat désespéré dans lequel Torii avait perdu la vie. Mitsunari avait désormais l’intention de réunir tout ce qu’il pourrait de partisans de sa cause, qu’il présentait comme la cause de Hideyori, et de pousser à travers le Mino jusque dans l’Owari, puis d’attaquer Ieyasu dans le Mikawa. Son plan était fondé sur l’hypothèse hardie mais erronée que Ieyasu serait bloqué par Uesugi et ne pourrait utiliser l’ensemble de ses troupes contre un autre ennemi.
Ces idées en tête, Mitsunari se dirigea sur Gifu, où Oda Hidenobu lui fit un bon accueil. De là, il marcha sur ögaki, pénétrant dans le château le 18 septembre. Mais il rencontra une forte opposition de la part de guerriers hostiles dans le Tango, l’Ise et l’Omi, et il fut obligé de disposer d’une part considérable de son armée pour en venir à bout. Par ailleurs, d’importants daimyô sur lesquels il avait compté répugnaient à défier Ieyasu et refusèrent alors d’entrer en campagne. Parmi eux se trouvait Môri Terumoto, qui avait la garde de Hideyori et ne voulait pas faire un geste. En l’absence d’un grand général, Mitsunari dut prendre lui-même le commandement de l’armée occidentale. Il était courageux et avait une certaine expérience de la guerre, mais il n’était
Weitere Kostenlose Bücher