Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Joséphine, l'obsession de Napoléon

Joséphine, l'obsession de Napoléon

Titel: Joséphine, l'obsession de Napoléon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gérald Messadié
Vom Netzwerk:
d’« excellentes choses », mais que les dernières pages étaient « d’un fou ». Lucien prit feu : il menaça son frère « de le renverser comme il l’avait élevé ». Puis il jeta son portefeuille sur le bureau du Premier consul.
    C’était là une victoire dont Joséphine se serait passée ; elle plongea Bonaparte dans une humeur exécrable.
    Mais le pire était à venir.
    Le 24 décembre, veille de Noël et 3 nivôse de l’an IX, Joséphine persuada Bonaparte d’aller à l’Opéra, où l’on donnait La Création du monde, oratorio de Joseph Haydn. Il eût préféré passer la soirée au coin du feu, mais il céda à ses prières. Peut-être aussi ne voulait-il pas décevoir sa soeur Caroline, ainsi qu’Hortense, à laquelle il portait de l’affection. Mais il était également sensible à la voix humaine et à la musique.
    Le groupe constitué pour la soirée se rendrait à l’Opéra dans deux voitures.
    Joséphine s’attardait à sa toilette ; quand elle descendit enfin, Bonaparte observa que son châle, un cadeau envoyé de Constantinople, n’était pas assorti à sa robe, puis il gagna sa voiture avec les généraux Lannes et Bessières, laissant le général Jean Rapp, son aide de camp, accompagner les dames dans une autre voiture. Joséphine retourna dans sa chambre changer donc de châle. Puis on entendit la voiture de Bonaparte qui s’ébranlait et Caroline pressa sa belle-soeur. Ces dames montèrent dans leur voiture, suivant celle du Premier consul à brève distance.
    Quand la deuxième voiture arriva rue Nicaise, anciennement Saint-Nicaise, une explosion formidable la secoua. Les vitres éclatèrent, les femmes crièrent, Hortense saignait au bras, touchée par un éclat de verre. On voyait par les fenêtres des portières l’effroyable dévastation causée par la bombe. Des cadavres et des corps de blessés jonchaient la rue. Des enfants terrifiés pleuraient, des gémissements s’élevaient de partout.
    — C’est contre Bonaparte ! cria Joséphine.
    Hortense était égarée. Seule Caroline, alors enceinte de huit mois, semblait avoir gardé le contrôle de ses nerfs. Personne ne savait si le Premier consul avait été touché. Un cheval de la voiture de Joséphine était tombé. Rapp aida le cocher à le dételer, puis lui ordonna de poursuivre son chemin vers l’Opéra. Une ordonnance parvint alors à hauteur de la voiture pour annoncer que Bonaparte était sain et sauf.
    Quand Joséphine entra dans la loge, suivie d’Hortense dans sa robe ensanglantée, elle était spectrale. Bonaparte lui prit le bras pour la raffermir. Une ovation s’éleva de la salle, déjà informée de l’attentat, à en croire le témoignage de Laure Permon, duchesse d’Abrantès, épouse de Junot :
    Ce que je rapporte ici, je l’ai vu, et je ne l’ai pas vu seule. J’ai vu cette foule, dont la fureur pour un attentat si noir ne peut être exprimée par des mots. On voyait des femmes pleurer à sanglots, des hommes frémissant d’indignation.
    Je regardais pendant ce temps dans la loge du Premier consul ; il était calme et paraissait seulement ému toutes les fois que le mouvement lui apportait quelques paroles fortement expressives… […] Madame Bonaparte n’était pas aussi maîtresse d’elle-même. Sa figure était bouleversée ; son attitude même, toujours si gracieuse, n’était pas la même. Elle semblait frissonner sous son châle comme sous un abri ; et dans le fait, c’était ce châle qui avait été la cause de son salut personnel. Elle pleurait : quelque effort qu’elle fît pour retenir ses larmes, on les voyait le long de ses joues pâles, et lorsqu’elle regardait le Premier consul, elle frissonnait de nouveau. Sa fille aussi était fort troublée. Quant à Mme Murat, le caractère de la famille paraissait en elle ; elle fut parfaitement maîtresse d’elle-même dans toute cette cruelle soirée.
    Dès le retour aux Tuileries, Bonaparte convoqua Fouché ; pour lui, c’étaient les jacobins qui avaient fomenté l’attentat ; Fouché objecta que c’étaient les royalistes et qu’il pouvait le prouver. Il le prouva, en effet : trois officiers vendéens furent arrêtés ; l’un d’eux réussit à s’enfuir en Amérique, les deux autres furent guillotinés. Ce n’était pas cher payé pour les cinquante-deux morts de la rue Nicaise et les dizaines de blessés. Mais l’occasion était trop belle pour Bonaparte : il fit arrêter cent trente

Weitere Kostenlose Bücher