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La Collection Kledermann

La Collection Kledermann

Titel: La Collection Kledermann Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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doute pas au courant, hasarda Adalbert. Si vous voulez mon opinion…
    La voix froide d’Aldo lui coupa la parole :
    — Si elle veut le divorce, elle l’aura. Je ne m’opposerai pas à sa volonté. Pour qu’elle aille jusque-là, il faut qu’elle me haïsse ! Si vous voulez bien m’excuser…
    Il jeta sa serviette, se leva et quitta la salle à manger suivi par tous les regards. Guy voulut le suivre mais son hôtesse le retint :
    — Non. Il est préférable de le laisser supporter seul ce coup dur. Vous aussi, Adalbert ! Vous pouvez servir, Cyprien !
    Le repas débuta dans la consternation… On chipota jusqu’à ce qu’Eulalie, visiblement mécontente, surgisse pour demander ce que l’on avait à reprocher à son pâté en croûte à la façon de Houdan.
    — Rien du tout, ma bonne Eulalie, répondit la marquise, mais nous venons d’apprendre une mauvaise nouvelle et…
    — Justement, il faut manger ! Avec tout le respect que je dois à madame la marquise, quand une tuile vous tombe dessus, il faut être solide sur ses jambes pour se ramasser et on n’est pas solide si on laisse son estomac descendre dans ses talons !
    — Elle a raison ! approuva Adalbert en s’y attaquant sérieusement. D’autant que c’est délicieux. Eulalie, quand nous aurons fini auriez-vous l’obligeance de me préparer un plateau que je monterai à M. Aldo ?
    — Je vais y aller tout de suite ! proposa Cyprien.
    — Merci, mais il est préférable que ce soit moi ! Allons, vous autres ! J’irai dans un moment !
    — Je suis désolé, murmura Guy un peu désorienté par ce petit drame ménager. J’aurais dû attendre le café…
    — Non ! Après tout ce n’est pas plus mal, reprit M me de Sommières. Nous allons pouvoir échanger nos points de vue et je vais commencer la première : j’ai peine à croire que Lisa ait pris cette décision seule et en plein libre arbitre… La femme que nous avons vue à Zurich, Plan-Crépin et moi, ne ressemblait guère à celle que nous connaissons et aimons.
    — C’est vrai, renchérit celle-ci. Elle faisait penser à un zombie ! Et même en tenant compte de ce qu’elle venait d’endurer et endurait encore, notre Lisa à nous est à l’opposé de la cliente du docteur Morgenthal.
    — Sans doute, mais elle n’est plus là-bas et je trouve incroyable qu’elle ait pu prendre cette effarante décision dans la demeure de sa grand-mère et auprès de ses enfants ! C’est… c’est monstrueux !
    — Il y a peut-être une explication, fit Adalbert soudain songeur. En nous annonçant que Lisa était rentrée à Vienne, Guy a mentionné une infirmière de ladite clinique venue avec elle et chargée de veiller au suivi du traitement qu’on lui a prescrit. Cela me paraît excessif ! Elle ne rentrait pas seule dans une maison vide mais dans un palais peuplé de serviteurs qui l’ont vue grandir, auprès d’une grand-mère aimante et attentive avec tous les médecins de Vienne à portée de la main, sans oublier l’escouade qui s’occupe des gamins ! Et elle aurait besoin d’une étrangère pour « veiller à son traitement » ? Allons donc !… Et j’aurais assez tendance à ajouter : « Foutaises ! »
    — À quoi pensez-vous ? murmura M. Buteau. Cette femme serait chargée de lui administrer une drogue ?
    — Et pourquoi pas dès l’instant où nous avons affaire à une résurgence des Borgia ? Si le cousin Gaspard est copain avec « César », pourquoi les deux ne le seraient-ils pas avec ce docteur Morgenthal, neurologue pour ne pas dire psychiatre de son état ? Il me semble que ça se tient, non ? Donnez-moi cet objet, poursuivit-il à l’adresse de Cyprien qui revenait portant un plateau chargé. Je vais essayer de remettre les idées d’Aldo dans le bon sens !
    M me de Sommières tira son mouchoir et fit semblant de se moucher peut-être afin d’essuyer une larme indiscrète :
    — Tâchez au moins d’obtenir qu’il reste tranquille encore quelque temps ! Songez que sa convalescence est loin d’être achevée !
    — Ça c’est une autre histoire ! Vous le connaissez : si le sol commence à lui brûler les chaussures, personne n’y pourra rien. Tout ce que je peux vous promettre c’est de ne pas le lâcher d’une semelle…
     
    Assis dans un fauteuil au coin de la fenêtre, les coudes aux genoux et une cigarette qui se fumait toute seule au bout de ses doigts, Aldo regardait le parc sans le voir. Il n’entendit pas davantage les deux coups brefs frappés par

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