La Collection Kledermann
infernale dedans…
— Veillez donc sur les gens ! Je me tue à te dire qu’il contient un mouvement d’horlogerie !
— En tout cas ça n’a pas éclaté !
— Reste tranquille, je vais voir de près !
Passant carrément par la fenêtre, Adalbert sauta dans le jardin où il s’approcha prudemment de son objectif.
— On aurait dû le munir d’un couvercle de lessiveuse en guise de bouclier ! observa Plan-Crépin.
— … et chercher un appareil photo pour immortaliser la scène ? proposa Aldo, ce qui lui valut un coup d’œil stupéfait :
— On dirait que ça va mieux ! Si vous pouvez plaisanter…
— Nous autre Morosini avons l’habitude de plaisanter jusque sur l’échafaud ! Mais c’est vrai que je me sens moins abattu ! C’est bien la preuve que l’inaction m’est préjudiciable. Si je dois continuer à faire de la chaise longue je deviendrai fou…
Adalbert, cependant, revenait avec son trophée qu’il déposa sur une table. Marie-Angéline lui présenta une paire de ciseaux pour couper les ficelles. Ce qu’il fit avec un luxe infini de précautions. De même pour écarter le papier d’emballage car il avait raison sur un point : on entendait effectivement un inquiétant tic-tac.
— Tout le monde à l’abri, je vais faire sauter la soupape…
Il avait pris la canne d’Aldo et s’était emparé d’un fauteuil pour s’en faire un rempart. Celui-ci haussa les épaules et, repoussant son ami, ouvrit la boîte qui révéla son contenu : un gros réveil Jaz qu’il tendit à Adalbert :
— Tu avais raison pour le mouvement d’horlogerie !
— Voyons le reste !
Le reste, c’était un paquet enveloppé de papier blanc qu’il déballa vivement : il y avait là son passeport, son portefeuille tel qu’il était quand on l’en avait dépouillé, y compris l’argent et les photos de Lisa et de ses enfants, son carnet de chèques, son porte-cigarettes armorié en or, sa montre, son briquet, sa bague ancestrale à la sardoine gravée, enfin la petite mais forte loupe de joaillier qui ne le quittait jamais.
— Une plaisanterie de potache ! sourit-il, que je pardonne volontiers : je n’aurais jamais cru retrouver un jour tout cela !
— Il y a aussi un billet ! dit Plan-Crépin en le lui tendant.
Peu de mots mais qui suffirent à souffler la timide flamme de joie qui lui était venue :
« On ne vous restitue que ce qui vous appartient à l’exception de votre anneau de mariage. Vous n’en avez plus besoin… »
La douleur fut si vive qu’il ferma les yeux afin de retenir ses larmes. Il sentit alors la main d’Adalbert se poser sur son épaule :
— On te le rendra un jour, crois-moi ! C’est ce qu’il faut te dire et surtout ne donne pas à ces salauds la satisfaction de te voir souffrir !
— Tu en as de bonnes ! Il me semble que j’entends quelqu’un ricaner derrière mon dos.
Dans un mouvement de colère, il allait balayer de la surface de la table les emballages quand Marie-Angéline s’y opposa :
— Vous les avez assez tripotés tous les deux alors maintenant n’y touchez plus : je reviens !
Elle disparut un instant, revint équipée de gants de caoutchouc neufs empruntés à la cuisine et d’un sac en papier où elle fourra l’ensemble, y compris le malfaisant billet :
— On va confier ces machins à nos gardiens de nuit quand ils arriveront afin que l’un d’entre eux retourne au Quai des Orfèvres. Le laboratoire de la police repérera peut-être des empreintes digitales instructives !
— Quelle présence d’esprit ! admira Aldo. À ce propos, ne croyez-vous pas qu’il serait temps de leur rendre leur liberté ? Je me sens pleinement capable de me défendre. D’ailleurs on m’a accordé la grâce de me rendre mon passeport, ce qui me posait un sérieux problème et j’ai de plus en plus envie d’aller faire un tour en Suisse…
— Vous n’êtes pas un peu fou ? protesta Plan-Crépin.
— … juste un aller-retour à Zurich ! Une seule nuit au Baur-au-Lac pour échanger quelques mots avec Ulrich, le portier ! Je veux l’adresse des Borgia et, à moi, il la donnera !
Adalbert approuva :
— D’accord, mais je t’y conduis en voiture et on opère dans la discrétion. En outre, ce n’est pas le moment de nous séparer de tes anges gardiens, on va même s’entendre pour qu’ils nous donnent un coup de main et agissent comme si de rien n’était.
— Ne rêvez pas, Adalbert ! Ils n’accepteront jamais à moins qu’ils n’aient
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