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La Liste De Schindler

La Liste De Schindler

Titel: La Liste De Schindler Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Thomas Keneally
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parut pas troubler Oskar. Pour lui, la pudeur était un concept aussi difficilement concevable que, disons, l’existentialisme. Les deux voyeurs malgré eux apprécièrent beaucoup, de leur côté, les formes de la jeune fille.
    Ils s’excusèrent et partirent aussitôt, hochant la tête et riant comme des écoliers. Oskar, imperturbable, continuait à folâtrer au-dessus d’eux.
    Il n’y eut pas d’épidémie. Biberstein rendit grâces au ciel et surtout à la station d’épouillage. Quand la dysenterie disparut, il rendit grâces à la nourriture. Son témoignage figure dans les archives de Yad Vashem : au début de leur séjour dans le camp, la ration quotidienne dépassait deux mille calories par personne. Dans toute l’Europe en proie à un terrible hiver, seuls les juifs de Brinnlitz étaient aussi bien nourris.
    On ne servait pas que de la soupe. Il y avait aussi du porridge. Un prisonnier se rendait régulièrement au petit moulin construit sur la rivière dans laquelle avaient été déversées les caisses de liqueurs d’Oskar. Mundek Korn se rappelle qu’une fois là-bas, il suffisait de ficeler le bas du pantalon et de le remplir de flocons d’avoine par la ceinture. Certes, on n’avait pas la démarche très assurée quand on passait au retour devant les sentinelles. Une fois dans le camp, deux gaillards vous soulevaient au-dessus d’un chaudron dans lequel s’écoulait la précieuse nourriture.
    Les faux laissez-passer étaient la spécialité de Moshe Bejski et de Josef Bau qui travaillaient dans le bureau de dessin. Oskar s’y rendit un matin avec, en main, des documents frappés du cachet des services de ravitaillement du gouvernement général de Pologne. Ses meilleurs contacts pour obtenir de la nourriture au marché noir se trouvaient encore à Cracovie. Il faisait les arrangements par téléphone. Mais pour que les vivres passent la frontière, il fallait des papiers d’accompagnement émis par le secrétariat à l’Alimentation du gouvernement général. Oskar indiqua à Bejski le cachet apposé sur les documents qu’il avait en main.
    —  Vous pouvez m’en faire un comme ça? demanda-t-il.
    Bejski était passé maître dans l’art de fabriquer des faux à l’aide de toute une panoplie de rasoirs et de lames soigneusement effilées. Il allait bientôt remettre à Oskar le premier des cachets « officiels » fabriqués à Brinnlitz, ces fameux cachets qui deviendraient l’emblème de la contre-bureaucratie. Car il y en aura beaucoup d’autres : cachet du gouvernement général, du gouverneur de Moravie, cachets pour les autorisations de circuler qui allaient permettre aux prisonniers de conduire des camions jusqu’à Brno ou Olomouc et d’y faire provision de pain, d’essence, de farine, de tissu ou de cigarettes. La réserve de nourriture était tenue par Leon Salpeter, un pharmacien de Cracovie qui avait été membre du Judenrat de Marek Biberstein. Il y stockait les lots misérables expédiés de Gröss-Rosen par Hassebroeck, plus tout le reste : légumes, céréales, farine, etc., achetés au marché noir grâce à l’argent d’Oskar et au talent de faussaire de Bejski.
    « Brinnlitz, racontera un des anciens prisonniers, ce n’était pas la joie. Mais à côté des autres camps, c’était le paradis. » Les prisonniers savaient qu’on manquait partout de nourriture et qu’en dehors du camp, peu de gens mangeaient à leur faim.
    Et Oskar ? Est-ce qu’Oskar calquait ses propres rations sur celles des prisonniers ?
    Cette question m’a toujours valu une réponse amusée. « Oskar ? Mais pourquoi l’aurait-il fait ? Il était Herr Direktor. Qui aurait bien pu lui reprocher ses repas ? » Réponse suivie d’une petite moue au cas où on aurait eu l’air un peu dubitatif. « Mais vous ne comprenez pas. On était tellement reconnaissant d’être là ! On savait bien ce qui se passait ailleurs. »
    Oskar, comme au tout début de son mariage, avait à nouveau la bougeotte. Il s’absentait de Brinnlitz assez souvent. Stern, qui faisait en quelque sorte office d’intendant, l’attendait parfois toute la nuit. Emilie veillait avec lui. Itzhak ne s’est jamais formalisé des vadrouilles d’Oskar comme en témoigne un discours qu’il prononcera après la guerre. « Il circulait de jour comme de nuit, pas seulement pour trouver de la nourriture pour les juifs de Brinnlitz – grâce à de faux papiers forgés par un de ses prisonniers –, mais

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