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La mort bleue

La mort bleue

Titel: La mort bleue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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*
    Quelques heures plus tard, le souper se déroula dans une atmosphère fort agréable. D’un côté, Évelyne semblait déterminée à considérer une promenade sous les arbres comme un nouveau départ de sa vie conjugale. De l’autre, Thomas et Élisabeth affichaient des airs de nouveaux mariés. Au moment du dessert, Thomas se crut autorisé à demander :
    â€” Patron, comme j’ai été un convalescent très sage, pourrais-je aller au bureau demain?
    Ses yeux ne se portaient pas sur le directeur du grand magasin, mais sur son épouse.
    â€” Crois-tu que ce soit vraiment nécessaire? demanda la femme, hésitante.
    â€” Tout de même, je dois voir ce qui se passe dans cette entreprise. Je continue d’en être le propriétaire. Puis ce garçon-là meurt sans doute d’envie de connaître sa nouvelle rémunération.
    Du doigt, il désignait son fils. Celui-ci acquiesça de la tête.
    â€” C’est vrai, j’aimerais cela. J’espère qu’elle sera généreuse et rétroactive pour les deux dernières semaines.
    â€” Considère plutôt cela comme ta période d’essai. Un apprentissage…
    â€” Un autre apprentissage? Cela ne finira jamais!
    Thomas gardait les yeux sur son épouse. Celle-ci accepta finalement :
    â€” Tu pourras y aller demain et, si tu es très sage, tu iras de nouveau une autre journée, plus tard cette semaine.
    â€” Merci patron, conclut-il avec un clin d’œil.
    Après le souper, la soirée s’écoula lentement. Une tasse de thé tiède à portée de la main, Thomas loucha plusieurs fois en direction de l’armoire à boisson. Si les choses ne changeaient pas bientôt pour lui, la réserve de cognac amassée pour faire face à la prohibition durerait pendant des années. Afin de se donner de meilleures chances de réaliser un autre projet, il préféra se tenir coi.
    * * *
    Peu avant dix heures, au moment où les rideaux s’assombrissaient tout à fait dans la chambre à coucher, il se trouvait étendu dans le lit conjugal. Élisabeth revint de la salle d’eau, fort séduisante dans sa chemise de nuit toute blanche, largement soulignée de dentelle, confectionnée de lin fin. Quand elle prit place près de lui, il murmura :
    â€” Tu sais, je pense que tu es plus belle que le jour de notre première rencontre, il y a un peu plus de vingt-deux ans.
    Elle jeta un regard amusé sur son compagnon, bien certaine de l’orientation prochaine de la conversation :
    â€” Nous irons voir un opticien, ta vue baisse, si tu trouves une femme de quarante ans plus belle qu’à ses dix-huit ans.
    â€” J’apporterai une ancienne photographie de toi : il me donnera raison sans hésiter.
    La main de l’homme caressa la lourde chevelure d’un blond foncé, aux teintes vieil or dès que le soleil la touchait. Un examen attentif permettait de repérer quelques fils argentés, tout au plus. Au moment où sa bouche trouvait l’autre bouche, les doigts s’aventurèrent sur la poitrine, soupesèrent un sein rond, bien dessiné par le tissu de la chemise de nuit.
    â€” Je ne sais pas si c’est une bonne idée, dit-elle à voix basse.
    â€” Je ne mange presque plus, je n’ai pas bu une goutte de cognac depuis deux semaines. Le médecin a confirmé que tout va bien…
    â€” Le docteur Hamelin a dit que tu te portais mieux. Toutefois, il a aussi souligné l’importance de prendre soin de toi, d’éviter de trop grandes fatigues et des émotions fortes.
    De sa main, elle saisit les doigts vagabonds, les porta à ses lèvres pour les embrasser. La caresse de la bouche sur sa peau ne réduisit en rien les appétits de son époux.
    â€” Voyons, «cela » ne se compare pas à une longue journée au magasin, ou à une interminable campagne électorale.
    â€” Tu sais combien j’aimerais aussi. Mais je ne prendrai pas le risque de nuire à ta santé. Auparavant, il faudra avoir la permission du médecin.
    â€” La permission? Il faut maintenant recevoir l’autorisation du docteur, après celle du curé? Nous sommes mariés depuis plus de vingt ans.
    Thomas élevait un peu la voix, au point où sa femme posa sa paume sur sa bouche.
    â€” Chut! Nous ne sommes pas

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