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La pierre et le sabre

La pierre et le sabre

Titel: La pierre et le sabre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eiji Yoshikawa
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aucune
directive ; et comme il est impossible de savoir quand nous nous
rencontrerons de nouveau, je vous serais reconnaissant de me conseiller un peu.
    La bouche édentée de l’abbé laissa
échapper le rire crépitant qui lui était familier.
    — Vous n’avez donc pas encore compris ? demanda-t-il. Que vous êtes trop fort est la seule chose que j’aie
à vous enseigner. Si vous continuez à vous enorgueillir de votre force, vous ne
vivrez pas jusqu’à trente ans. Eh quoi ? Vous avez bien failli vous faire
tuer aujourd’hui. Pensez-y, et décidez de votre conduite à l’avenir.
    Musashi garda le silence.
    — ... Vous avez accompli
quelque chose, aujourd’hui, mais ce n’était pas du travail bien fait. Comme
vous êtes encore jeune, je ne saurais véritablement vous en blâmer ; mais
c’est une grave erreur de croire que la Voie du samouraï ne consiste qu’en un
déploiement de force... Toutefois, j’ai tendance à commettre la même faute ;
aussi ne suis-je pas vraiment qualifié pour vous parler de la question. Vous
devriez étudier la voie que Yagyū Sekishūsai et le seigneur Kōzumi
d’Ise ont pratiquée. Sekishūsai était mon maître, et le seigneur Kōzumi
le sien. Si vous les prenez pour modèles, et tentez de suivre la voie qu’ils
ont suivie, vous avez des chances d’arriver à connaître la vérité.
    Quand la voix de Nikkan se tut,
Musashi, qui, profondément plongé dans ses pensées, avait gardé les yeux fixés
à terre, les leva. Le vieux prêtre avait déjà disparu.
     
     
     
Le fief de Koyagyū
     
    La vallée de Yagyū s’étend au
pied du mont Kasagi, au nord-est de Nara. Au début du XVII e siècle, y vivait une petite communauté
prospère, trop importante pour être qualifiée de simple village, mais ni assez
nombreuse ni assez active pour être appelée une ville. On aurait pu tout
naturellement la nommer le village de Kasagi ; au lieu de quoi ses
habitants l’appelaient le domaine de Kambe, nom hérité de l’époque révolue des
grands domaines seigneuriaux privés.
    Au milieu de la communauté se
dressait la Grande Maison, château qui servait à la fois de symbole de
stabilité gouvernementale et de centre culturel de la région. Des remparts de
pierre, évoquant d’anciennes forteresses, l’entouraient. Les gens de la région,
ainsi que les ancêtres de leur seigneur, s’y trouvaient confortablement établis
depuis le X e siècle, et le
gouverneur actuel était un gentilhomme campagnard dans la meilleure tradition,
qui répandait la culture parmi ses sujets, et se trouvait prêt à tout moment à
risquer sa vie pour défendre son territoire. Mais en même temps, il évitait
avec soin de se mêler sérieusement aux guerres et aux rivalités des seigneurs
des autres régions. Bref, il s’agissait d’un fief paisible, doté d’un
gouverneur éclairé.
    Ici, nulle trace de la dépravation
ou de la dégénérescence liées aux samouraïs libres ; c’était tout
différent de Nara, où on laissait aller à vau-l’eau d’anciens temples célèbres
dans l’histoire et dans la légende. Les éléments subversifs n’étaient tout
simplement pas autorisés à pénétrer dans la vie de cette communauté.
    Le décor lui-même combattait la
laideur. Les montagnes de la chaîne de Kasagi n’étaient pas d’une beauté moins
saisissante à la tombée du jour qu’au lever du soleil ; l’eau était pure
et claire – idéale, disait-on, pour faire le thé. Les fleurs de
prunier de Tsukigase étaient proches, et les rossignols chantaient de la saison
de la fonte des neiges à celle des orages ; leurs sonorités de cristal
étaient aussi limpides que les eaux montagnardes.
    Un poète a jadis écrit qu’« à
l’endroit où naît un héros, montagnes et rivières sont fraîches et claires ».
Si nul héros n’était né dans la vallée de Yagyū, ces paroles du poète
eussent été vides de sens ; mais ce lieu avait effectivement vu naître des
héros. Les seigneurs de Yagyū eux-mêmes en fournissaient la meilleure
preuve. Dans cette grande maison, même les serviteurs étaient des nobles.
Beaucoup venaient des rizières, s’étaient distingués au combat, et étaient
devenus des assistants loyaux et compétents.
    Yagyū Muneyoshi Sekishūsai,
maintenant qu’il s’était retiré, résidait dans une maisonnette montagnarde, à
quelque distance derrière la Grande Maison. Il ne manifestait plus aucun
intérêt pour le gouvernement local, et

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