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L'archipel des hérétiques

L'archipel des hérétiques

Titel: L'archipel des hérétiques Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mike Dash
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à ses supérieurs.
Le 13 juillet, Ariaen fut arrêté et mis aux fers dans un cachot de la
forteresse, suivi de peu par Jan Evertsz 27 .
    Aucun des documents relatant l'arrestation du maître
d'équipage ne nous est parvenu, mais les accusations portées contre lui
devaient être suffisamment graves pour qu'il soit soumis à un interrogatoire
sévère, qui dut être mené par le fiscaal, Anthonij Van Diemen 28 ,
ou l'un de ses adjoints. Étroitement ligoté à son siège, dans un cachot perdu
au fin fond de la forteresse, le maître d'équipage dut être confronté aux
accusations du commandeur et aux preuves retenues contre lui. La parole
de l'accusé ne suffisait généralement pas et, en cas de dénégations, si
l'affaire était jugée suffisamment grave, le suspect était généralement soumis
à la question -c'est-à-dire à la torture.
    Cette procédure était on ne peut plus légale, bien que,
selon la loi hollandaise, des aveux arrachés sous la torture n'aient pas suffi
à établir la culpabilité d'un suspect. Les juges étaient tenus de laisser au
prisonnier le temps de retrouver ses esprits, avant de lui demander
confirmation de ses déclarations. Seule une telle confession faite « de plein
gré », et au maximum un jour après l'application de la torture, constituait une
preuve valide de culpabilité. Naturellement, en cas de rétractation, les juges
n'en restaient pas là, et ordonnaient d'autres séances de torture, de plus en plus
poussées, comme l'avait déjà expérimenté le peintre Torrentius. Et comme en
dernier ressort le résultat était inévitablement le même, le zèle des juges
hollandais à exiger des aveux faits « de plein gré » n'était qu'un genre de
feuille de vigne juridique.
    Rares étaient ceux qui résistaient longtemps au bourreau,
et ce ne fut pas le cas d'Evertsz. Le maître d'équipage du Batavia passa
rapidement aux aveux et reconnut sa participation à l'attaque contre Creesje
Jansz. Vu ce qu'Evertsz savait du rôle qu'avait joué le capitaine dans les
événements survenus à bord du bâtiment et, en particulier, de ses projets de
mutinerie, on aimerait avoir de plus amples détails sur ce qu'il a pu en dire à
ses tortionnaires dans son cachot. Mais il n'en est resté aucune trace écrite.
Cependant, bien qu'il soit très possible que le nom de Jacobsz 29 ait
été prononcé concernant « les insolences et les offenses très graves, voire
monstrueuses, qui furent commises sur le susdit bâtiment », le seul compte
rendu qui nous soit parvenu (et qui est signé du conseiller Anthonij Van
Diemen) confirme que seul Evertsz fut condamné à la pendaison pour l'agression.
    Le nom de Jeronimus Cornelisz n'apparaît nulle part. Qu'en
conclure ? Que le maître d'équipage ignorait tout des liens de complicité qui
unissaient les deux hommes ? Qu'il avait préféré ne rien dire de la mutinerie
pour échapper à des peines encore plus lourdes, ou qu'il craignait encore plus
l'intendant adjoint que les tortionnaires qui lui appliquaient la question... ?
Rien ne permet d'en décider.
    Nous en savons davantage sur les charges portées contre le
capitaine. Les minutes du Conseil des Indes font état de deux chefs
d'accusation :
    « Attendu qu'Ariaen Jacobsz, chef navigateur du Batavia ,
navire ayant sombré dans un naufrage, s'est notoirement laissé déporter de la
route prévue par pure négligence - et attendu qu'une répugnante agression a été
publiquement commise sur ce même bateau, à son instigation... décision a été
prise par Son Honneur [Coenl et le Conseil d'arrêter le susdit navigateur et de
le faire comparaître en procès ici même, pour qu'il puisse répondre des
accusations portées contre lui. »
    A la différence d'Evertsz, il ne semble pas que le
capitaine ait été soumis à la question - soit à cause de son rang, qui le protégeait,
soit parce qu'aux yeux du gouverneur général et du Conseil, sa culpabilité ait
été moins clairement établie que celle du maître d'équipage. Mais en l'espèce,
dans une telle affaire, ils n'avaient même pas besoin de s'en remettre aux
accusations de Pelsaert : il était d'emblée évident que Jacobsz était
responsable de toutes les fautes de navigation qui avaient entraîné la perte du Batavia. Et en sa qualité d'officier responsable du quart la nuit du drame,
le capitaine en était doublement responsable. Qu'il ait ou non trempé dans les
« offenses monstrueuses » commises contre Creesje Jansz, il risquait la

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