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L'archipel des hérétiques

L'archipel des hérétiques

Titel: L'archipel des hérétiques Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mike Dash
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réclama cette compensation en 1635, mais n'obtint manifestement
pas satisfaction, car elle dut réitérer sa requête trois ans plus tard, en
1638. La mère de Pelsaert, qui avait alors environ soixante-cinq ans, mourut à
la fin de cette année, vraisemblablement sans avoir vu un florin de cette somme
pour laquelle son fils avait tant payé de sa personne.
    Wiebbe Hayes, que Pelsaert avait promu au grade de
sergent, avec un salaire mensuel de dix-huit florins, reçut d'autres
récompenses à son arrivée à Batavia.
    Il fut engagé comme officier dans l'armée de la Compagnie,
avec le statut de porte-étendard. C'était une promotion prodigieuse, pour
quelqu'un qui s'était embarqué pour les Indes au grade de simple soldat, mais
dans le cas de Hayes, elle était plus que méritée. En sa qualité de
porte-étendard, son salaire fut porté à quarante florins, soit à peu près
l'équivalent de celui de Jeronimus Cornelisz - assorti de la promesse d'accéder
par la suite à de plus hautes responsabilités, « dans la mesure des postes à
pourvoir et en fonction de son mérite ».
    Les Défenseurs aussi se virent récompenser. Tous les
soldats de Hayes furent faits cadets, avec un salaire mensuel de dix florins.
Le cadeau n'est peut-être pas tout à fait aussi généreux qu'il y paraît,
puis-qu'en tant que soldats ils gagnaient déjà huit ou neuf florins. Le salaire
des marins fut augmenté dans les mêmes proportions et, de surcroît, le Conseil
des Indes gratifia tous ceux qui « avaient fait preuve de loyauté et avaient
pieusement résisté au mal » d'une prime équivalant à deux mois de salaire -
soit entre dix et vingt florins par personne 45 .
    Les vingt-quatre marins du Sardam , qui avaient aidé
Pelsaert à mater la mutinerie, se virent offrir une cagnotte de « cent pièces
de huit », soit environ deux cent quarante florins qu'ils se partagèrent.
    La trace de Hayes se perd après son arrivée à Batavia. Les
archives de Winschoten 46 , sa ville natale, ne mentionnent plus rien
le concernant, mais elles sont si incomplètes qu'il est impossible de se
prononcer sur son éventuel retour. Il aurait aussi bien pu aller s'établir dans
une autre ville, où il aurait pris femme... ou déménager dans une grande
agglo-mération, telle qu'Amsterdam. Il en avait désormais les moyens. Mais il
est tout aussi plausible que le vainqueur de Jeronimus soit mort quelque part
aux Indes, soit au combat, soit dans l'exercice de ses nouvelles fonctions, sur
une île lointaine, terrassé par quelque maladie tropicale 47 .
    Fin décembre 1629, Gijsbert Bastiaensz prit le temps
d'écrire une longue lettre destinée à ce qui lui restait de famille en
Hollande. Curieusement, son récit de la mutinerie, quoique parfois filandreux
et frisant l'incohérence (il l'avait rédigé en toute hâte pour que le document
puisse partir avec la flotte qui devait prochainement appareiller pour la
Hollande), est le seul témoignage indépendant des événements du Cimetière du Batavia. A sa lecture, il apparaît que le pasteur était encore loin de
s'être remis du calvaire qu'il avait enduré dans l'archipel (« Nous sortons
d'une épreuve si douloureuse que nous en avons encore l'esprit troublé »,
écrit-il à ses proches), et qu'il cherchait refuge dans la religion :
    « Je m'en suis remis à la Providence du Seigneur, qui
éprouve ses enfants selon ses propres voies, conclut-il. Et par la grâce de
Dieu, j'ai recouvré quelques forces et quelque vigueur, car, vu mon état de
faiblesse, je ne tenais plus qu'à peine debout. »
    Mais il n'était pourtant pas au terme de ses épreuves.
L'attention de Jacques Specx et du Conseil de Justice de Batavia fut attirée
par le rôle qu'il avait joué dans les événements. Les autorités tenaient à
s'assurer que le pasteur avait réellement fait tout ce qui était en son pouvoir
pour arrêter Jeronimus et sa bande de tueurs, et voulaient comprendre comment
un représentant de l'Église réformée en était arrivé à signer un pacte
d'allégeance à un hérétique. Tous les documents ayant trait aux actions du
pasteur furent remis au procureur qui passa près de quatre mois à étudier
l'affaire. Bastiaensz dut attendre le printemps 1630 pour se voir acquitter par
le Conseil de l'Église de Batavia. Mais cela n'avait apparemment pas suffi à
lever tous les soupçons du gouverneur général car, entre le 18 et le 22 avril,
Specx se heurta à trois occasions aux sommités religieuses, à qui

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