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Le Japon

Le Japon

Titel: Le Japon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Collectif
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cessé de faire ces derniers mois, les défendeurs patientèrent.
    « À Sugamo, Yoshio Kodama, qui attendait d’être mis en accusation ou d’être relâché, écrivit dans son journal qu’il avait, ce jour-là, jeté un œil à sa fenêtre et avait aperçu Tojo monter dans le bus. Pendant la guerre, il avait souvent vu Tojo conduire sa berline à travers l’esplanade du Palais impérial accompagné d’une escorte, en tant que Premier ministre et ministre de la Guerre de l’empire. “Maintenant, lorsque je le vois être embarqué dans un bus gardé à l’avant et à l’arrière par des membres de la police militaire américaine, j’ai l’impression que tout cela n’a guère de sens, écrit Kodama. Mais je suppose qu’à la lumière de l’histoire, cela est tout à fait significatif 52 .” »
    Le témoignage du dernier empereur de Chine, Puyi, qui avait été placé par les Japonais à la tête de l’État fantoche du Mandchoukouo est un des temps forts du procès. Puyi, avant de tomber dans l’oubli pour n’être ressuscité que par le film de Bernardo Bertolucci, Le Dernier Empereur , est alors un personnage célèbre.Détenu par les Soviétiques, il est acheminé tout spécialement à Tokyo pour témoigner. La salle est comble lorsqu’il est appelé à la barre, et il est le seul témoin à être directement interrogé par le procureur en chef, Joseph Keenan. Mais, face à la confusion de sa déposition, l’accusation renoncera à utiliser son témoignage.
    Le moment le plus marquant demeure toutefois l’interrogatoire de Tojo. L’ancien Premier ministre déclare d’abord que pas un Japonais n’aurait désobéi à la volonté de l’empereur : cela revient à faire endosser à Hiro-Hito la responsabilité du déclenchement de la guerre du Pacifique… Le lendemain, il se ravise et prétend avoir agi contre l’avis de son souverain. On apprendra plus tard que c’est une intervention des Américains auprès de l’avocat de Tojo qui l’a amené à couvrir l’empereur en se sacrifiant.
    Les accusés sont assistés au minimum de deux avocats, un Japonais et un Américain. À la différence du procès de Nuremberg, seuls des individus sont visés. Aucune institution n’est jugée à Tokyo, de telle sorte qu’il demeure difficile d’établir les responsabilités précises de l’état-major de l’armée de terre, du haut commandement de la marine ou du grand conseil impérial. En revanche, et toujours à la différence de Nuremberg, on a retenu à Tokyo comme chef d’accusation la responsabilité négative dans l’exécution des crimes, en d’autres termes le fait de ne pas avoir empêché que des crimes soient commis par des subordonnés. C’est un grave précédent en matière de droit international, qui va permettre de mettre en accusation des suspects contre lesquels il n’existe aucune preuve de responsabilité positive.
    Pour l’opinion japonaise, la condamnation à mort de Hirota Koki est la plus choquante : cet ancien Premier ministre considéré comme modéré n’avait pas réussi àempêcher le sac de Nankin ; c’est pour cette raison qu’il est exécuté. De son côté, Matsui Iwane, commandant de l’armée japonaise qui s’était jetée à l’assaut de la capitale chinoise à la fin de l’année 1937, est condamné pour son « refus de prise de responsabilité afin de réfréner des actes illégaux », c’est-à-dire pour ne pas avoir pu ou voulu empêcher de tels crimes.
    Or Matsui, semble-t-il, était absent durant l’essentiel du massacre. Malade et nommé commandant de l’ensemble du théâtre d’opérations chinois le 2 décembre, il avait été remplacé à Nankin par un oncle de l’empereur, Asaka Yasuhiko : c’est sous le commandement de ce dernier que les exactions ont été perpétrées. Asaka n’en est pas moins exonéré de toute poursuite, en raison de son appartenance à la famille impériale.
    Le déroulement du procès n’est pas allé sans heurts, ce qui explique aussi sa durée – deux ans et demi. Le juge australien Webb, nommé président du tribunal par MacArthur, critiqué par ses collègues pour son autoritarisme, est mis en cause par la défense pour avoir déjà enquêté en tant que procureur sur les crimes commis par les Japonais en Nouvelle-Guinée. Il en est de même du procureur philippin Delfin Jaranilla, dont on met en cause l’impartialité car il avait participé, en tant que prisonnier des Japonais, à la

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