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Le maréchal Ney

Le maréchal Ney

Titel: Le maréchal Ney Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric Hulot
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allié. Il lui avait recommandé : « Il faut éviter les grandes batailles, travailler les flancs de l’ennemi, l’obliger par là à faire des détachements, le harasser par des marches et des contremarches... Qu’il y ait beaucoup de cosaques, partout. »
    En des termes légèrement différents, le Prussien Clausewitz tenait le même langage. Il préconisait « d’évacuer tout le pays jusqu’à Smolensk et de ne commencer la guerre pour de bon que dans cette région ».
    Mais si, dans les mois qui suivirent l’ouverture de la campagne, les armées russes reculèrent, ce fut moins par calcul délibéré que par crainte d’affronter Napoléon en rase campagne.
    *
    Ney reçut sa lettre d’affectation pour le troisième corps d’armée français le 9 janvier 1812. Sa prise de commandement eut lieu le 29 février, alors que ses régiments étaient déjà en marche. De ce seul fait, il lui fallut un certain temps pour connaître tous ses officiers, lui qui estimait nécessaire d’avoir un contact personnel avec eux. Comme tous les autres, le troisième corps était en sureffectifs et ne comptait pas moins de quarante et un mille hommes : une petite armée à lui tout seul. Les Français n’y étaient que vingt-deux mille. Il comprenait une division de treize mille Wurtembergeois, formant une unité indépendante par rapport au corps complet de même nationalité, trois mille Portugais et autant d’Illyriens : Serbes, Albanais, Monténégrins. Sa parfaite connaissance de l’allemand allait servir Ney pour commander cette mini-tour de Babel.
    Parmi ses divisionnaires, il retrouva le général Marchand avec qui il n’était pas dans les meilleurs termes. Lorsqu’il se vit confier la division wurtembergeoise, celui-ci estima que « ce n’était pas un très beau cadeau » et le dit. Aussi cette affectation n’améliora-t-elle pas leurs relations. Mais la surprise du maréchal fut de découvrir qui lui avait été attribué comme chef d’état-major, sans qu’on lui eût demandé son avis : Jomini ! Napoléon avait estimé que les deux officiers formaient un bon tandem et que, par son caractère pondéré et sa science militaire profonde, le Suisse modérerait et canaliserait l’impétuosité de son patron.
    Il avait fallu aller le chercher au fond de son canton natal et le convaincre de rallier l’armée française. Cela n’avait pas été facile, car Jomini gardait rancune à Ney de la manière dont celui-ci l’avait écarté. Pour le décider, Napoléon avait dû le nommer général de brigade avec promesse de passer rapidement divisionnaire. Encore cela n’eût peut-être pas suffi à ébranler Jomini si la nouvelle guerre qui allait commencer et les préparatifs dont il avait recueilli les échos n’avaient passionné le stratège et le théoricien.
    Ney et lui eurent la sagesse et l’intelligence d’oublier leurs griefs. Ils se comportèrent d’emblée comme de vieux amis. Jomini, comme le maréchal, ne tarda pas à mépriser les Wurtembergeois, piètres soldats. Envers les Portugais et les Illyriens, leur opinion fut franchement mauvaise. Brigands plutôt que militaires, jugèrent-ils. Le chef d’état-major recommanda de ne les envoyer au feu qu’avec circonspection et de préférence pour des missions de sacrifice. Pendant toute la traversée de l’Allemagne, il fallut les faire encadrer par la gendarmerie pour les empêcher de piller ou de déserter. Avec de telles troupes, Ney ne ressentait pas l’élan des campagnes précédentes.
    Le 1 er avril, après une marche de deux mois, le troisième corps atteignit l’Oder et le traversa sans prendre de repos. La progression avait été plus lente que ne l’avaient prévu les ordres de Berthier et il se comptait un nombre anormalement élevé de traînards.
    Le 8, Alexandre adressa un ultimatum à Napoléon, le sommant d’évacuer la Prusse et la Poméranie suédoise, et de replier ses troupes au-delà de l’Elbe. Pour peu qu’il le voulût, c’était l’occasion pour Napoléon d’entamer des pourparlers de paix. Il n’en fut rien. Effectivement, la Grande Armée avait continué à faire route vers l’est.
    Par ses tergiversations Napoléon avait perdu un temps précieux, car la période où le terrain est opérationnel en Russie, entre le dégel de printemps et les pluies d’automne, est relativement courte. À présent qu’ils étaient en Pologne et que le ravitaillement se trouvait déjà moins bien assuré, les

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