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Les autels de la peur

Les autels de la peur

Titel: Les autels de la peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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démentait les « diffamations et les calomnies des bellicistes Brissot et Guadet contre Robespierre ».
    Il ne s’en tint pas là. Toute la semaine suivante, il ne cessa d’accabler, soit à la tribune, soit dans le Défenseur de la Constitution, le petit journal qu’il venait de fonder, Brissot et toute la Gironde. Il allait fort loin contre eux. En particulier, attaquant leurs mesures en faveur de la discipline militaire, il n’hésitait pas à réclamer l’indépendance complète du soldat : il ne le voulai-subordonné aux officiers que pour l’exercice et la bataille. Il alla enfin trop loin lorsque, revenant à ses éternels attendrissements sur lui-même, il s’écria au club : « Perfides intrigants, vous vous acharnez à ma perte ! Mais je vous déclare que plus vous m’avez isolé des hommes, plus vous m’avez privé de communication avec eux, plus vous avez fortifié mon âme. » Dubon et Claude se regardèrent, suffoqués. Il s’identifiait àRousseau, maintenant ! Isolé des hommes, alors que toute la Société, se rangeant sous sa bannière, prenant hautement parti pour lui, venait à son appel de rompre avec la Gironde ! Ce soir, la voix aigre de l’orateur n’éveilla point les applaudissements sous la voûte de la vieille église. Et Tallien, dans une réponse assez rude, laissa transparaître une indignation qu’il n’était point seul à éprouver. Mais Danton, mettant au comble l’ébahissement de Claude, vola au secours de Maximilien. « Robespierre a raison, s’écria-t-il avec fougue. Il sera peut-être un temps, et ce temps n’est pas loin, où il faudra tonner contre ceux qui attaquent depuis trois mois une vertu consacrée par toute la Révolution, une vertu que ses ennemis d’autrefois avaient bien traitée d’entêtement et d’âpreté, mais que jamais ils n’ont calomniée comme ceux d’aujourd’hui ! » Dociles, les bons Cordeliers applaudirent, cette fois. Dubon haussa doucement les épaules.
    « Ah ! Danton et ses manigances ! murmura-t-il. Quand on saura de quel côté il veut se tourner, celui-là ? »
    Pas très difficile à comprendre pourtant, pensait Claude. Revenu de sa surprise, il découvrait quelque raison à cette manifestation déconcertante. Excessive, certes, mais le manque de mesure en toute chose, c’était Danton. Ce grand enthousiasme pour la vertu maximilienne, cette indignation contre ses détracteurs, cette amitié croissante entre deux hommes naguère cordialement ennemis et au fond toujours rivaux, on n’y pouvait point croire. Tout en eux, leurs qualités comme leurs défauts, s’opposait violemment. Et cependant entre eux pouvait se fonder, à défaut d’amitié, une alliance. Dans la situation présente, par opposition avec l’incohérente Gironde, tumultueuse, anarchique, voire suspecte à cause de ses associés, Robespierre apparaissait comme le seul personnage de confiance. Les démocrates : Legendre après Desmoulins, Marat même qui publiait quotidiennement son éloge, Hébert s’unissaient autour de lui. Or, Danton avait grand besoin d’une alliance, et il n’existait plus pour lui d’alliés possibles hors des Robespierristes. Après sa rupture fracassante avec les modérés de la Commune – rupture provoquée par sa vieille aversion pour La Fayette –, après sa prise de position, en mars, contre les Brissotins auxquels il en voulait, Claude s’en était bien rendu compte, de ne lui avoir pas au moins proposé un portefeuille, il demeurait seul avec ses Cordeliers dénués de vraie puissance et, de plus, évoluant eux-mêmes vers Robespierre. Étant donné son caractère, Danton devait non pas les suivre mais, bien entendu, les précéder.
    Devant cette coalition, la Gironde ne s’effondrait point commeClaude s’y était attendu aux derniers jours d’avril. Elle n’aurait pu tenir si la situation militaire avait empiré, mais Brunswick, et en cela Claude avait vu juste, n’exploitait pas son avantage. Peut-être attendait-il que le désordre intérieur lui facilitât la besogne, que les contre-révolutionnaires fussent prêts à déclencher la guerre civile. En tout cas, les choses à la frontière demeuraient sans changement. On avait reçu une lettre de Bernard. Il était à Soissons où son bataillon ne faisait rien d’autre que l’exercice. Ni ennemis en vue ni combats en perspective. Lise respira, momentanément.
    Le seul résultat des attaques jacobines était la démission du ministre

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