Les chasseurs de mammouths
ne cessaient de les fasciner. Plus ils apprenaient, et plus leur intérêt
s’en trouvait stimulé. Elle était capable d’apprécier le silex et le façonnage
des outils : les pointes que leur avait montrées Wymez étaient selon elle
les plus remarquables qu’elle eût jamais vues, tant par leur beauté que par
leurs qualités utilitaires. Mais elle n’avait jamais entendu discuter le sujet
dans les moindres détails. Elle se rappela alors la fascination qu’avait
exercée sur elle le savoir médical et l’art magique de la guérison. Les moments
passés avec Iza et Uba, lorsque la guérisseuse leur enseignait sa science,
comptaient parmi ses souvenirs les plus heureux.
Ayla vit Nezzie émerger de l’abri. Elle se leva aussitôt pour
voir si elle pouvait lui être utile. Les trois hommes, quand elle les quitta,
lui sourirent et firent quelques remarques, mais, à son avis, ils n’allaient
même pas se rendre compte de son absence.
Ce n’était pas entièrement vrai. Aucun des trois ne fit de
commentaires à voix haute, mais leur conversation s’interrompit un instant,
tandis qu’ils la suivaient des yeux.
C’est une magnifique jeune femme, pensait Wymez. Elle est
intelligente, elle possède des connaissances étendues et elle s’intéresse à
beaucoup de choses. Si elle était mamutoï, elle serait d’un prix élevé. Quel
statut elle vaudrait à l’homme auquel elle s’unirait et, par suite, à ses
enfants !
Les pensées de Danug étaient à peu près du même ordre, bien qu’elles
ne fussent pas aussi clairement formulées dans son esprit. Il lui venait de
vagues idées à propos du Prix de la Femme, de l’Union et même de relations
charnelles, mais il ne croyait pas avoir la moindre chance. Il désirait surtout
ne pas s’éloigner d’elle.
Le désir de Jondalar était plus violent. S’il avait pu trouver
un prétexte valable, il se serait levé pour suivre Ayla. Toutefois, il ne
voulait pas s’accrocher à elle. Il se rappelait ses propres réactions quand
certaines femmes mettaient trop d’acharnement à s’attirer son amour. Chaque
fois, elles avaient fait naître en lui le désir de les éviter et elles avaient
éveillé sa pitié. Il ne voulait pas de la pitié d’Ayla. Il voulait son amour.
Une amère gorgée de bile lui monta à la gorge lorsqu’il vit l’homme
à la peau sombre sortir de l’abri et sourire à la jeune femme. Il s’efforça de
la ravaler, de maîtriser sa colère, sa frustration. Jamais il n’avait connu
pareil sentiment et il s’en détestait. Ayla, certainement, le prendrait en
horreur, ou, pis encore, en pitié, si elle savait ce qu’il ressentait. Il
tendit la main vers un gros rognon de silex et, d’un coup de percuteur, le
fendit en deux. La pierre était défectueuse, tout entière veinée de blanc par
le calcaire friable dont elle était gainée. Jondalar s’acharna sur elle, la
brisa en fragments de plus en plus petits.
Ranec vit Ayla quitter l’aire des tailleurs de pierre pour
se diriger vers l’habitation semi-souterraine. Toutes les fois qu’il la
rencontrait, il ne pouvait le nier, son émoi, son désir allaient croissant. Dès
les premiers moments, il avait été attiré par les formes parfaites qui
flattaient son sens artistique, non seulement à cause de sa beauté, mais aussi
de la grâce subtile et spontanée de ses mouvements. Il avait un œil infaillible
pour de tels détails et il ne décelait pas en elle la moindre pose, la moindre
affectation. Elle se comportait avec une maîtrise d’elle-même, une assurance
qui semblaient totalement naturelles : elles devaient être innées,
pensait-il, de sorte qu’il émanait d’elle une qualité pour laquelle il ne
trouvait pas d’autre nom que « présence ».
Il la gratifia d’un sourire chaleureux. Ayla ne pouvait aisément
l’ignorer : elle lui rendit son sourire avec la même chaleur.
— Vous a-t-on rempli les oreilles de silex ? demanda
Ranec.
Le ton même de la remarque la rendait quelque peu désobligeante.
Ayla saisit la nuance, sans être pour autant vraiment sûre de sa
signification : pour elle, il s’agissait d’une plaisanterie.
— Est vrai. Ils parlent de silex. Façonner outils. Pointes.
Wymez fait pointes magnifiques.
— Ah, il vous a sorti tous ses trésors, hein ? Tu as
raison : elles sont magnifiques. Je ne suis pas toujours sûr qu’il en ait
conscience, mais Wymez est plus qu’un artisan. C’est un artiste.
Le front d’Ayla se
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