Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

Les Filles De Caleb

Titel: Les Filles De Caleb Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
Vom Netzwerk:
Emilie revit dans ce geste l’attitude du curé Grenier lors de sa représentation de Noël. Le curé Grenier avait ainsi caché ses rires. Henri venait de cacher ses pleurs. Si Emilie avait pu, elle l’aurait consolé. Du regard, elle essaya de lui faire savoir qu’elle venait de comprendre toute la générosité de sa rupture.
    Henri changea le sujet de discussion. Il reporta toute son attention vers Antoinette. Celle-ci, remise de ses émotions, proposa une partie de cartes, ce qu’Ovila approuva chaudement. Quelque chose dans l’attitude d’Emilie l’avait troublé et il était bien content qu’on lui offre de s’occuper les mains et l’esprit.
    La soirée se poursuivit sans autres nuages. Émilie avait retrouvé sa bonne humeur, Henri aussi. Antoinette était resplendissante. Son plaisir fut à son comble lorsque, sachant qu’elle passerait l’été à Trois-Rivières, Henri lui glissa:
    «Je sais que je devrai aller à Trois-Rivières à plusieurs reprises cet été. Avec votre permission, Antoinette, j’irais vous visiter. »
    La soirée s’acheva joyeusement. Ovila avait raconté à Henri le souvenir qu’il avait de lui comme inspecteur.
    «Épousailles? qui peut me donner le singulier d’épousailles? disait-il en imitant l’accent d’Henri. Crois-le ou non, Henri, je me suis toujours rappelé de la réponse: «Il n’y a pas de singulier à épousailles. Souvenez-vous de cela! Il y a toujours deux personnes qui se marient!»
    La partie de cartes terminée, Henri se leva, prit son chapeau et demanda un dernier verre d’eau qu’Antoinette lui versa.
    «Émilie, pourrais-je vous voir deux minutes? Il y a une petite chose que je voudrais vérifier dans votre cahier d’appel. »
    Émilie et lui demeurèrent dans la classe pendant qu’Antoinette et Ovila sortaient pour s’occuper de l’attelage.
    «Je suis désolé de t’avoir blessée, Émilie. Je t’ai prêté plus de mauvaise volonté à mon égard que tu n’en avais eue. Mais je rumine cette histoire depuis si longtemps que je crois en avoir déformé les faits.
    —        J’aurais dû parler plus vite.
    —        L’incident est clos, ma chère, et comme dit le philosophe, la vie continue.»
    Il se dirigea vers la sortie, regarda Antoinette par une des fenêtres. Antoinette et lui. Deux enfants seuls. Deux enfants élevés dans les communautés. Oui, Antoinette et lui pourraient peut-être découvrir ensemble les joies d’une famille.
    «Émilie, tu as été une étoile filante dans ma vie. Les gens disent que si on aperçoit une étoile filante, il faut s’empresser de faire un vœu. J’ai fait mon vœu ce soir. » Il pointa Antoinette d’un mouvement de tête. «Mon désir c’est d’arriver au port. Je crois que le marin que je suis, en errance sur une mer déchaînée depuis tant de mois, vient enfin d’apercevoir son étoile du Nord.» Il se racla la gorge, fit un sourire moqueur et ajouta: «A ton avis, Emilie, cette phrase était-elle assez poétiquement tournée?»
    Ils éclatèrent de rire. Oui, Henri Douville était quelqu’un de vraiment spécial.
    «Une dernière chose, Émilie. Si par hasard tu revoyais au doigt d’Antoinette cette bague que tu as déjà portée pendant quelques minutes, aurais-tu l’amabilité...
    —        De quelle bague est-ce que tu parles, Henri?»
    Antoinette, qui savait depuis longtemps qu’elle aurait immensément de chagrin à quitter l’école du rang du Bourdais, sa première maison depuis des années, le fit finalement beaucoup plus facilement qu’elle ne l’avait cru. Elle s’en allait allègrement vers une autre vie. Une vie, elle l’espérait, avec Henri. Émilie s’était bien gardée de lui révéler les propos d’Henri. Elle s’était simplement réjouie de voir qu’Antoinette nourrissait à son égard des sentiments sans équivoque. Toute à sa joie, Antoinette n’avait pas vu les tourments d’Émilie.
    Antoinette avait offert à Émilie de rester avec elle jusqu’à la dernière journée. Émilie lui avait répondu, avec douceur, qu’elle préférait être seule pour quitter l’école. Elle n’avait pas eu besoin d’en dire davantage. Antoinette avait compris. Henri était venu la chercher, arrivant tout en sueurs et aussi poussiéreux que d’habitude. Il avait hissé le maigre bagage d’Antoinette — une valise et un petit lit de fer — sur le banc arrière de sa calèche.
    Émilie et Antoinette étaient restées seules à

Weitere Kostenlose Bücher