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Les foulards rouges

Les foulards rouges

Titel: Les foulards rouges Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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les sceaux appropriés, cosigné par le
cardinal Mazarin, Premier ministre, et Louis XIV, roi de France, occupait
la charge de général de police du royaume, créée à sa seule destination.
    Il détenait en permanence un pli signé du roi
obligeant quiconque, et jusqu’aux plus puissants ministres, à servir en toutes
choses, tous lieux, et toutes circonstances « le porteur du présent
document ».
    Mais tout cela ne grisait guère Jérôme de
Galand. Il s’acquittait de sa tâche avec un génie qu’on ne lui pouvait
contester, organisant les réseaux d’espionnage, formant agents d’influence et
agents provocateurs, établissant un fichier des partisans de la Fronde et de
leurs sympathisants tandis qu’un autre contenait les noms des sujets dont la
fidélité à la couronne se situait au-dessus de tout soupçon, créant un service
financier autonome à toute fin de rémunérer tous les quinze jours ses espions
réussissant ainsi à leur assurer une certaine sécurité qui hâtait leur sûreté
en le métier, inventant de toutes pièces une école où l’on formait des hommes
destinés à infiltrer le commandement du prince et de ses généraux tandis que, simultanément,
il cédait à une remarquable intuition en mettant au point un service de
contre-espionnage redoutablement efficace.
    Le roi et le Premier ministre n’en doutaient
point, Jérôme de Galand venait d’inventer la police moderne et l’espionnage des
temps à venir.
    Ils tenaient également pour certain qu’en
cette concurrence, les services du prince de Condé accumulaient un retard d’un
bon siècle. Pourtant, le chef de la Fronde, trop infatué de lui-même et sûr de
ses succès, n’en avait point conscience.
    Mais Jérôme de Galand, élevé au titre de baron,
se battait moins par amour de la monarchie que par haine de la Fronde. Ce
retour vers le féodalisme des temps révolus lui soulevait le cœur en cela qu’il
portait le germe de la division et le morcellement du royaume que le général de
police, secrètement, appelait « la Nation ». C’est pour cette raison
qu’il estimait profondément le comte de Nissac qui, sans jamais prononcer le
mot mille fois chéri de « République », en laissait suffisamment
deviner sur leur commune aspiration.
    Cependant, d’un point de vue strictement
professionnel, le baron de Galand, si brillant fût-il par ailleurs, gardait un
goût prononcé pour la police criminelle qui, selon lui, exigeait des qualités
précises : don de l’observation, esprit d’analyse, dispositions pour la
synthèse.
    Aussi observait-il longuement le corps de la
femme écorchée et retrouvée sur les marches d’une église de Saint-Maur.
    Cette fois, l’Écorcheur laissait sa besogne inachevée,
soit qu’il eût été dérangé, soit que la fatigue eût fait retomber son bras.
    De Galand réfléchit, envisageant avec la plus
grande froideur les deux hypothèses.
    Dérangé, l’Écorcheur ? Difficile à croire.
Le peu qu’on savait faisait état de gardes du corps, de lourd carrosse à six
chevaux, d’armoiries couvertes de boue séchée afin qu’on ne les pût reconnaître.
L’homme de la police criminelle savait que celui qu’il traquait appartenait à
la haute aristocratie et qu’un si puissant seigneur possédait d’évidence les
moyens d’assurer pleinement sa sécurité fût-ce, et même surtout, lorsqu’il
écorchait une femme.
    Même si, par esprit de prudence, le « premier
policier du royaume », comme disait de lui le Premier ministre, ne pouvait
totalement écarter cette hypothèse, il la considérait cependant comme très
improbable.
    Restait la fatigue. Physique, et peut-être
morale. La vanité de tout cela. Dans tous les cas, après trois années d’abstinence,
l’Écorcheur ratait en partie son retour.
    De Galand remarqua immédiatement que la
poitrine et le sexe ainsi que les régions voisines relevaient d’un « soin »
particulier. Faisant d’un geste retourner le cadavre par un de ses officiers, il
découvrit sans surprise que les fesses, elles aussi, montraient grand
acharnement du stylet de l’assassin. Après…
    Après, plus guère de rigueur. Aucun membre ne
restait intact mais certains, comme le bras gauche, à demi écorché seulement.
    — Lavez les parties du corps qui n’ont
point été écorchées. Faites un travail propre.
    Les officiers du général de police s’exécutèrent
aussitôt, avec grands soins et égards pour le cadavre posé sur une

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