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L'Héritage des Cathares

L'Héritage des Cathares

Titel: L'Héritage des Cathares Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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œil, dis-je. Il a ruiné ta vie. Maintenant, la sienne t’appartient.
    Elle me regarda et fronça les sourcils, incrédule. Son visage prit une expression de profond dégoût.
    —    Si tu me proposes cela, c’est que tu n’as rien compris à ce que je suis devenue, murmura-t-elle. Le mal qu’il m’a fait n’a pas ruiné ma destinée. Il m’a permis de trouver ma vie. Sans cela, je n’aurais découvert ni ma foi, ni ma vocation. Sa méchanceté m’a mise sur la voie.
    —    Pernelle, insistai-je. Tu as l’occasion de te venger.
    Blême, elle toisa Onfroi et fit non de la tête.
    —    Non occides; qui autem occiderit, reus erit iudicio, dit-elle d’une voix éteinte. Si enim dimiseritis hominibus peccata eorum, dimittet et vobis Pater vester caelestis 1 . Fais de lui ce que tu veux. Quant à moi, je préfère préserver la vie que la prendre. Même celle de si viles créatures.
    Elle tourna les talons et disparut dans le noir. Elle ne se retourna même pas lorsque je tranchai moi-même la gorge d’Onfroi. Je n’éprouvai aucun remords à envoyer ce monstre en enfer. Un monstre qui, somme toute, n’était guère différent de moi.
    Quand je retournai auprès de Montbard, les Parfaits avaient commencé à franchir le pont.
    —    Cette Esclarmonde est bien mystérieuse, lui dis-je. Elle semblait surprise que vous soyez chrétien. Comme si le fait d’avoir porté cette cassette faisait obligatoirement de vous un hérétique. Vous y comprenez quelque chose ?
    —    Absolument rien. dit-il en secouant la tête, l’air hébété. Mais mordieu, une fois à Quéribus, j’entends bien y voir clair.
    Sans rien ajouter, il enfourcha son cheval. Je montai sur Sauvage, qui m’avait été ramené, et lui emboîtai le pas à la suite des Parfaits et de nos hommes. Vers la Vérité, qui était plus près de moi que je n’aurais pu l’imaginer et dont la nature était insoupçonnable.
    1
    Tu ne tueras point ; celui qui tuera mérite d’être puni par les juges. Si vous pardonnez aux hommes leurs offenses, votre Père céleste vous pardonnera aussi. Évangile selon Matthieu 5,21 ; 6,14.

Chapitre 21 Vers Montségur
    Lorsque nous eûmes franchi l’Aude, notre route fut tranquille. Pour l’instant, les croisés étaient concentrés de l’autre côté, mais tout cela changerait sous peu, j’en avais la conviction. Nous décidâmes de ne pas passer par Montlaur, qui était trop proche de Carcassonne, et descendîmes droit vers Peyrepertuse. Je vis peu Pernelle, qui chevauchait auprès des Parfaits. La vue d’On-froi lui avait causé un grand choc et elle semblait préférer la compagnie des siens. L’offre que je lui avais faite en toute bonne foi y était sans doute aussi pour quelque chose.
    Pendant tout le voyage, Montbard ne quitta pas dame Esclarmonde. De temps à autre, je saisissais des bribes de leur conversation. Ils se racontèrent ce qu’il était advenu d’eux depuis leur seule rencontre, vieille de plus de vingt ans, mais pour autant que je puisse en juger, ni l’un ni l’autre ne mentionna la cassette. La Parfaite parla longuement de ses quatre enfants, lui raconta dans quelles circonstances elle avait perdu son mari, Jourdain, seigneur de l’Isle-Jourdain, voilà dix ans, et comment elle s’était vouée tout entière à l’église cathare, prêchant d’une cité à l’autre. Elle lui confirma aussi qu’elle avait financé les travaux de fortification de Montségur avec son frère et je faillis tomber de cheval lorsqu’elle mentionna la somme qu’elle y avait consacrée, qui aurait amplement suffi à acheter plusieurs fois toute la seigneurie de Rossal. J’entendis aussi Montbard poser moult questions sur la foi des cathares, auxquelles Esclarmonde répondit avec patience.
    Après sept jours de route, nous arrivâmes de bon matin devant la citadelle de Peyrepertuse qui, comme la plupart des places fortes cathares, était perchée au sommet d’une crête rocheuse telle une couronne sur la tête d’un souverain. La construction semblait être une parfaite fusion entre la roche naturelle et la pierre de maçonnerie. On aurait dit qu’elle avait surgi à demi construite de la montagne puis été complétée par des maçons de grand talent. Nous gravîmes le sentier étroit et fûmes hélés au pied de l’enceinte par des gardes perchés sur le rempart.
    —    Qui va là ? demanda-t-on d’un ton autoritaire.
    —    Gondemar, sieur de Rossal, répondis-je,

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