Londres, 1200
coiffe
couverte de son.
— Un frère servant a fui, seigneur Guilhem,
et un chevalier a tiré l’épée contre moi. Il est mort, dit Regun sans émotion
apparente.
— Un de moins ! conclut sombrement
Guilhem.
— Qui que vous soyez, vous allez payer cher
ce crime ! gronda alors le chevalier âgé.
— Quel crime ?
Guilhem planta son regard dans le sien :
— Je suis le seigneur du château ! J’ai
droit de haute justice. Vous avez volé cette terre et je peux vous pendre
sur-le-champ à la poutre de ce moulin si l’envie m’en prend !
Il désigna une traverse qui soutenait un grand
auvent.
— Pitié, seigneur, supplia l’un des ouvriers.
Nous travaillons seulement ici.
— Vous n’êtes pas à l’ordre ?
— Non, seigneur.
— Alors vous êtes libres. Ne les attachez
pas, dit-il à l’intention des cathares. Quant aux autres, tentez quelque chose
et vous êtes morts.
Il s’adressa au templier âgé :
— Quel est votre nom, seigneur
chevalier ?
— Peyre Adhémar.
— Rostain de Preissac est au château ?
— Oui.
— Combien de chevaliers y a-t-il ?
— Suffisamment pour vous envoyer en
enfer !
— Nous verrons. Qui était celui qu’on a
tué ?
— Raymond de Bagnères. Il arrivait de la
commanderie pour chercher le blé.
— Jehan, videz cette charrette. À la place
des sacs, mettez toutes les armes que vous trouverez. Vous autres, fouillez le
moulin et l’église, ordonna-t-il aux cathares et aux archers. Que l’on attache
les prisonniers par le cou derrière la charrette. Et qu’ils soient tous
nu-pieds.
Les trois ouvriers s’étaient enfuis. La fouille du
moulin et de l’église prit un moment. Pendant que Locksley restait en
surveillance, Guilhem descendit à la rivière, qui n’était ni large ni profonde,
et la traversa. Il remonta de l’autre côté et aperçut le frère templier qui
courait vers le château.
De là où il était, il voyait parfaitement la
petite forteresse. Elle avait beaucoup changé depuis sa dernière visite.
Le château avait la forme d’un rectangle. Sa seule
tour était à peine plus haute que le reste de la courtine. Guilhem se souvenait
que la charpente de la grande salle avait été incendiée. Tout avait été rebâti
et le toit était désormais une terrasse crénelée qui rejoignait le chemin de
ronde. Les templiers avaient érigé de nouveaux hourds en bois qui n’étaient pas
terminés, car des échafaudages étaient encore dressés.
La palissade de bois avait aussi été réparée et un
fossé était creusé tout autour. Un pont dormant permettait de le franchir.
Guilhem vit le portail s’ouvrir et le fugitif se précipiter à l’intérieur.
Il entendit du bruit derrière lui et se retourna.
C’était Locksley.
— Nous sommes prêts.
Ils revinrent au moulin. Tout le monde était à
cheval sauf Geoffroi le tavernier et Thomas le cordonnier qui guideraient le
bœuf. Guilhem leva la tête vers le ciel nuageux. Le soleil était haut. Il
n’était pas loin de midi.
— Allons-y ! dit-il.
Le convoi descendit vers la rivière. Les templiers
suivaient par deux derrière le chariot empli d’armes, mains entravées et col
dans une corde.
Le bœuf traversa le cours d’eau lentement, mais
sans difficulté et le convoi remonta sur l’autre rive, en suivant un vague
sentier. À quatre cents pieds, la portée d’une flèche, Guilhem s’arrêta et
s’adressa à Peyre Adhémar.
— Seigneur Adhémar, lui dit-il, allez au
château avec mes prisonniers. Le seigneur Rostain de Preissac vous recevra.
S’il refuse, je serai obligé de vous pendre à ces arbres avec les cordes que
vous avez au cou.
— Vous êtes fou ! C’est vous que
l’archevêque d’Auch et la duchesse Aliénor feront pendre !
— Regardez ce couteau à ma ceinture ?
Savez-vous ce qu’il représente ? C’est l’investiture du fief. Je possède
charte signée et scellée d’Armagnac et de l’archevêque d’Auch me confiant ce
château. J’en suis le seul seigneur.
« Quand vous serez dans mon château,
poursuivit-il, je vous donne trois jours pour vous rendre. Au-delà, je prendrai
la place et tout le monde sera passé au fil de l’épée. Que Preissac ne tente
pas de prévenir votre commanderie. Mes archers abattront quiconque sortira.
— Vous n’êtes que onze ! Preissac vous
balayera ! répliqua le chevalier templier avec dédain.
À ce moment, deux cavaliers arrivèrent au galop.
C’était Alaric
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