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Rive-Reine

Rive-Reine

Titel: Rive-Reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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vœu.
     
    – Eh bien, monsieur, ce soir, mon âme est joyeuse. J’ai vu à Berne mon père heureux, à l’aise dans une belle maison, au milieu de ses livres, avec une épouse aimante et attentive.
     
    – Je conçois que cela vous rassure et suffise à vous rendre heureuse, admit Axel.
     
    – Ce qui me rend heureuse, aussi, c’est d’avoir retrouvé Alexandra, et cette maison de Rive-Reine, où vous avez su faire à l’étrangère que je suis une place douillette. J’ai raconté à mon père les promenades avec le professeur Chantenoz et Alexandra, notre première partie de pêche, où son enseignement me fut bien utile ! Et, aussi, les soirées avec vos amis où l’on discute, où l’on joue, où l’on rit. Celles où, comme ce soir, vous me demandez de jouer, dit Élise.
     
    – Alors, jouez votre état d’âme, s’il vous plaît de me le faire partager, Élise.
     
    Axel se reprit aussitôt, confus d’avoir appelé la jeune fille par son prénom.
     
    – Pardonnez cette familiarité…, ça m’a échappé, dit-il.
     
    M lle  Delariaz sourit, sans se rendre compte que son regard d’un bleu limpide traduisait une intime satisfaction.
     
    – Ce n’est pas la première fois que vous me donnez mon petit nom, sans même vous en apercevoir, monsieur.
     
    – Sans m’en apercevoir, vous dites ! fit Métaz, gêné.
     
    – Dorénavant, appelez-moi Élise… sciemment, dit-elle en attaquant, après un bref instant de concentration, la sonate Clair de lune , de Beethoven.
     
    Axel écouta religieusement cette pièce célèbre, s’abandonnant au charme romantique qui en émanait. Il applaudit et complimenta la pianiste, qui, à son grand étonnement, rabattit le couvercle du clavier, marquant ainsi la fin du concert. Axel s’attendait à ce que s’ensuivît le rite du thé, mais M lle  Delariaz demanda subitement la permission de se retirer. Un peu déçu, Axel s’inclina sans un mot, lui voyant les yeux pleins de larmes. « Comme elle est émotive ! » pensa-t-il en rallumant sa pipe.
     
    Quelques jours plus tard, alors qu’il choisissait, place du Marché, avec Louis Vuippens, l’emplacement de l’infirmerie qu’il fallait prévoir pour accueillir, lors de la fête des Vignerons, d’éventuels accidentés et les dames victimes de coups de chaleur, Axel raconta à son ami l’effet produit sur Élise par la musique de Beethoven.
     
    – Quelle pièce ? demanda le médecin, du ton dont il usait pour questionner ses patients afin de formuler son diagnostic.
     
    – La sonate Clair de lune , répondit Axel, docile.
     
    – Holà ! Holà ! Sais-tu qui en est la dédicataire et ce que cette musique veut traduire ?
     
    – Non ! Aucune idée ! fit Axel.
     
    – Beethoven dédia sa sonate à Giuletta Guicciardi, de qui il était amoureux, pour exprimer « son ardent désir de félicité conjugale », comme disent ses biographes ! Tu saisis le message ?
     
    – Quel message ? Tu plaisantes, non ? Je ne corresponds certainement pas à l’idée qu’Élise se fait d’un époux. Je la vois femme de pasteur avant longtemps. D’ailleurs, les deux fiancés avec lesquels elle a rompu étaient tous deux ministres du Saint-Évangile, m’a dit Martin.
     
    – Preuve qu’elle ne veut pas d’un pasteur, mon petit !
     
    – En tout cas, je devrais réfléchir avant de lui suggérer le titre d’une pièce pour piano, dit Axel.
     
    – La prochaine fois, demande-lui de te jouer la Lettre à Élise , coquin ! Tu verras bien si elle pleure ou si elle rit !
     
    Les deux amis, eux, riaient encore en entrant à l’hôtel de la Ville-de-Londres pour se désaltérer.
     

    Blaise, ayant été informé que le cercueil contenant les restes de sa fille arriverait à Calais fin mai, décida d’aller l’accueillir avec un fourgon spécial. Il tenait à conduire lui-même Adrienne jusqu’au caveau familial des Fontsalte. Axel lui offrit spontanément de l’accompagner. Le général accepta avec émotion et déclara qu’il ferait préparer une grande voiture dès que la date du transfert serait précisée par les autorités anglaises. Restait à résoudre le choix du cocher. Axel proposa Lazlo, qui, en peu de temps, avait acquis sa confiance et son estime.
     
    – Le Tsigane vénérait Adrienne. Il a conduit toutes ses voitures à travers l’Europe, vécu toutes ses aventures. Il me paraît tout désigné pour tenir les rênes lors de ce dernier voyage, dit

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