Une histoire du Canada
nationalistes s’enrôlent – l’éminent politicien Olivar asselin, par exemple. Le cousin de Bourassa, talbot Papineau, se joint également à l’armée et incite son parent à participer à un débat dans la presse, qui fait grand bruit, sur les avantages et les inconvénients de la participation à la guerre. et malgré la réticence de Hughes à encourager des unités entièrement canadiennes-françaises, plusieurs bataillons francophones sont formés, dont le plus populaire, le 22e bataillon (aujourd’hui le royal 22e), existe encore.
en 1916, alors que rien ne laisse présager la fin des combats, la politique canadienne a atteint une impasse. Le recrutement ne se fait plus qu’au goutte à goutte et les appels de plus en plus fervents au sacrifice, à la justice et à la cause commune trouvent peu d’écho. avec l’appui de Laurier, le gouvernement Borden obtient une prolongation d’un an du mandat du Parlement, qui devait prendre fin à l’automne 1916. À ce point, la popularité de Borden est en baisse et il est peu probable que Laurier acceptera une autre prolongation. au début de 1917, en dépit de la guerre, la politique reprend de la vigueur.
pOLiTiqUE, ARGEnT ET mUniTiOnS
Le leadership incertain du premier ministre, sir robert Borden, semble exacerber les problèmes du Canada. Borden, un néo-écossais qui a déjà été un avocat canadien de premier plan, est chef du Parti conservateur depuis 1900. avant sa victoire en 1911, il a survécu à deux défaites électorales aux mains de Laurier ; en 1915, tout semble indiquer que les prochaines élections se solderont par une autre défaite.
L’approche de Borden en ce qui concerne la vie et la politique est lente et méthodique. ses prises de position et son programme électoral semblent indiquer qu’il est un réformateur et, au cours des trois premières années de son mandat, ses réalisations sont peu nombreuses. en 1914, il fait ce que les circonstances exigent, mais se sert des politiciens – les ministres – de son cabinet au lieu de prendre des initiatives audacieuses.
Ces derniers représentent un atout incertain qui semble s’amenuiser. Le Parti conservateur est sur son déclin en 1915 et 1916. alors qu’on assiste 272
UnE HIsTOIRE dU Canada
à la chute des gouvernements conservateurs au Manitoba et en Colombie-Britannique, il semble possible d’en faire davantage. Mais quoi ?
Borden est un peu moins léthargique en ce qui a trait aux problèmes politiques causés par son ministre de la défense, sir sam Hughes. il ne faut pas beaucoup de temps pour que ce dernier suscite le mécontentement au sein de ses troupes. des histoires circulent au sujet du ministre – les contrats d’approvisionnement qu’obtiennent ses amis (vrai), le favoritisme à l’égard de son fils, qui devient général comme son père (indiscutable) et son comportement capricieux et excentrique. On dit qu’il a remis un brevet d’officier à un serveur qui lui avait offert un service rapide. La véracité de l’histoire n’a pas vraiment d’importance ; l’histoire est plausible et on y croit.
Le cas le plus notoire est celui des fusils ross, un fusil de précision fabriqué à Québec. Bien qu’il soit difficile à charger, qu’il se bloque fréquemment et qu’il ne fonctionne pas dans la boue, Hughes le préfère au fusil britannique, le Lee-enfield. Les troupes réagissent en se procurant des Lee-enfield partout où ils peuvent, tout en maudissant le ministre d’avoir choisi le ross.
dès lors, Hughes affaiblit le gouvernement, même au sein de ses partisans. On lui attribue la responsabilité d’un scandale qui éclate à propos d’entrepreneurs liés à la fabrication d’obus d’artillerie, considérés comme défectueux et insuffisants.
Borden réagit en dépouillant graduellement Hughes de son autorité en nommant en 1916 un nouveau ministre pour l’armée outre-mer. au grand soulagement de Borden, Hughes donne sa démission. son erreur a été de supposer que la conduite d’une armée en temps de guerre ne nécessitait rien de plus que les méthodes éprouvées de la vieille politique – favoritisme et népotisme assaisonnés de patriotisme. Borden sait que ce n’est plus suffisant et que son gouvernement ne pourra survivre à moins de faire preuve d’une plus grande capacité de professionnalisme et d’objectivité.
Borden est mal à l’aise avec de nombreuses tâches simples de la politique. il ne s’entend pas
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