Une histoire du Canada
dire dans celle-ci, offense les nationalistes québécois de tout crin, y compris les libéraux provinciaux, qui joignent leur voix à celle de la majorité séparatiste du PQ à l’assemblée législative provinciale pour condamner toute idée de la sorte. Le droit du Québec à l’autodétermination est absolu, semble-t-il, quelle que soit la façon dont les Québécois choisissent de l’exercer15.
durant les élections fédérales de juin 1997, Chrétien et son ministre des affaires gouvernementales nouvellement élu, stéphane dion, défendent le renvoi à la Cour suprême et, parallèlement, l’idée que l’ensemble du Canada doit avoir son mot à dire dans la question de la séparation du Québec. au terme de ces élections, Chrétien et les libéraux améliorent leur situation au Québec, à l’instar des progressistes-conservateurs, sous la direction de leur nouveau chef, Jean Charest. Bien entendu, le renvoi à la Cour suprême n’a pas empiré la situation des libéraux au Québec.
Quand elle finit par rendre son arrêt sur cette question en août 1998, la Cour suprême convient que l’ensemble des Canadiens ont un intérêt envers ce qui se passe au Québec. seul, le Québec n’a aucunement le droit de se séparer en vertu des lois autant nationales qu’internationales.
d’autre part, si le Québec finit par voter en faveur de la séparation, le reste du Canada devra négocier le retrait envisagé. Chrétien y voit une victoire et soutient qu’à l’avenir, en cas de référendum, il faudra proposer une question sans détours aux Québécois. de son côté, Lucien Bouchard, le premier ministre du Québec, le prend comme une justification du fait que le reste du Canada devra finir par respecter une décision favorable à la séparation prise par la majorité des Québécois.
Bouchard devra attendre avant de poser la question. Comme il le dit, il souhaite des « conditions gagnantes » et elles ne sont pas en place. de l’avis des fervents partisans de la séparation, Bouchard est trop souple, trop porté aux compromis et n’a aucun penchant vers les formes les plus extrêmes 466
UnE HIsTOIRE dU Canada
et exclusives du nationalisme québécois. Bouchard mène le Parti québécois à la victoire sur les libéraux provinciaux en 1998 mais ne considère pas cette victoire comme un mandat en vue de la tenue d’un autre référendum. La passivité du premier ministre dans le dossier de la souveraineté provoque du mécontentement au sein des militants péquistes et joue sans l’ombre d’un doute un rôle dans la précipitation de la démission de Bouchard à titre de premier ministre et de son retrait de la politique en 2001. son successeur, Bernard Landry, est un vétéran du séparatisme, scrupuleusement orthodoxe sur la grande question de l’indépendance ; pourtant, lui aussi hésite et, avec Landry comme premier ministre, il est évident qu’un troisième référendum n’est pas imminent.
il se peut que Bouchard et Landry se laissent influencer par des signes évidents de lassitude au sein de l’électorat québécois. Quand, en juin 2000, après l’arrêt de la Cour suprême, Chrétien et dion font adopter une Loi sur la clarté par le Parlement, qui souligne les conditions dans lesquelles le Canada pourrait accepter un vote portant sur la séparation, le premier ministre s’efforce de mobiliser l’opinion publique québécoise contre cette loi. Les résultats des sondages indiquent plutôt que les Québécois ne considèrent pas déraisonnable la position d’Ottawa à l’effet que la question devrait être claire et que la majorité devrait être supérieure à une majorité simple de 50 pour cent plus une voix. Quand, en novembre 2000, Chrétien tient de nouvelles élections générales, il améliore encore la position de son parti au Québec, défaisant le Bloc Québécois séparatiste par 44,2 pour cent contre 39,9 pour cent16.
UnE pOLiTiqUE ExTRêmE
La décennie qui suit 1993 est inhabituelle, voire unique en son genre dans l’histoire politique canadienne. au cours de trois élections, en 1993, 1997 et 2000, le parti libéral remporte de nettes majorités à la Chambre des communes sur une opposition qui ne peut entretenir le moindre espoir réaliste de lui infliger la défaite. Le Bloc Québécois ne vise pas le pouvoir à l’échelon national. son rôle, soutient-il, se borne à représenter le Québec en cas de victoire inévitable du séparatisme au terme
Weitere Kostenlose Bücher