Une histoire du Canada
d’un référendum provincial. Mais à mesure que le référendum s’éloigne, la logique soutenant la présence du BQ disparaît, comme le démontrent les élections de 2000.
Pendant les années 1990, la principale opposition face aux libéraux provient du Parti réformiste, fondé et dirigé par Preston Manning, un albertain. son attrait semble se limiter aux provinces de l’Ouest et encore là, il lui faut lutter pour maintenir une tête de pont dans certaines grandes villes comme vancouver et Winnipeg. en 2000, dans une tentative pour 17•nouveaumillénaire,nouvelunivers
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transcender son identification régionale, le Parti réformiste adopte l’appellation d’alliance canadienne17. Manning espère s’attirer le vote progressiste-conservateur et, conjointement, une certaine présence dans les provinces de l’atlantique et au Québec mais le chef progressiste-conservateur, Joe Clark, qui a pris la succession de Jean Charest, entré en politique provinciale au Québec en 1998, s’oppose fermement à cette idée. dans sa quête, Manning s’offre lui-même en sacrifice, perdant le poste de chef de l’alliance canadienne en faveur d’un ministre progressiste-conservateur de la province d’alberta, stockwell day. Celui-ci se révèle un bien mauvais chef pour l’alliance canadienne, commençant pas perdre les élections de 2000 face à Jean Chrétien puis son poste de chef en raison du mécontentement au sein de son propre parti.
Pendant toutes les années 1990, le nPd demeure tout au fond de la cave ; il ne parvient à obtenir que treize députés au terme des élections tenues en 2000. (il traîne comme un boulet l’impopularité des gouvernements nPd en Colombie-Britannique et en Ontario.) Pour de nombreux électeurs néo-démocrates, il est évident que les libéraux représentent un meilleur choix, surtout face à une alliance ouvertement de droite. Les libéraux le comprennent très bien et passent leurs campagnes électorales à démoniser l’opposition. Cette stratégie est encore favorisée par le dossier du gouvernement progressiste-conservateur d’extrême droite de Mike Harris en Ontario (1995–2005)18.
Gâtés par leurs opposants, les libéraux ont en outre la chance de pouvoir manipuler les enjeux politiques à leur avantage. Mis à part le séparatisme québécois, la vie politique des années 1990 est dominée par la lutte contre le déficit. depuis le milieu des années 1970, le Canada a connu une succession ininterrompue de déficits, qui ont progressivement aggravé la dette nationale et réduit la capacité du gouvernement fédéral de dépenser dans d’autres domaines que le service de la dette. Les séparatistes québécois soutiennent que la dette canadienne fait obstacle à la prospérité du Québec, autre argument, et argument de poids, pendant la période préparatoire au référendum de 1995. Le quotidien The Wall Street Journal a l’audace d’appeler le Canada un pays du tiers-monde en raison de l’ampleur de sa dette ; au Canada même, l’opinion publique décide que la réduction de la dette constitue une priorité.
Les libéraux ont pris le pouvoir en 1993 avec des aspirations légèrement réformistes. Leur intention était de dépenser davantage et non moins, mais ils ont été ébranlés par la perspective de voir le Canada se heurter au « mur de la dette » et cesser de gagner de l’argent sur les marchés internationaux. À leur corps défendant, Chrétien et son ministre des Finances, Paul Martin (fils et homonyme du ministre des affaires extérieures de Pearson, Paul Martin père) doivent modifier leurs objectifs financiers. À
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de très rares exceptions près, le gouvernement dépensera moins. il réduit de façon draconienne les paiements de transfert aux provinces, ce qui signifie que ces dernières auront moins d’argent à dépenser en santé, bien-être et éducation. il y a longtemps que les politiciens fédéraux se plaignent de voir les provinces s’attribuer tous les mérites et bénéficier de l’avantage politique des subventions fédérales. C’est maintenant au tour des provinces de recueillir le blâme des réductions dans les services. si, sur un plan philosophique, ces réductions peuvent être agréables à imposer pour des gouvernements de droite comme celui de Harris en Ontario, la baisse des largesses fédérales a certes pour effet d’amplifier l’impact de leurs politiques et contribue sans
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