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Histoire De France 1758-1789, Volume 19

Histoire De France 1758-1789, Volume 19

Titel: Histoire De France 1758-1789, Volume 19 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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Dieu que d'écraser le Luthérien? l'impie, le moqueur outrageant qui se riait des rois mêmes, qui regardait impudemment dans les Cabinets de Versailles? Frédéric nommait ses levrettes ses marquises de Pompadour.
    Le roi ne restait lucide que pour ses petits trafics, ses petites spéculations. Un jour, il adressa ce mot à son homme d'affaires: «Ne placez pas sur le roi : on dit que ce n'est pas sûr.»
    La seule ressource qu'apportât Choiseul, c'était la banqueroute.
    Banqueroute d'un homme d'esprit, d'abord sur ceux qu'on haïssait, traitants et fermiers généraux. Cela ne déplaisait pas. On aimait assez qu'à la turque, le règne fût inauguré en étranglant quelques pachas.
    Ne pouvant pas les payer, il restait un expédient, c'était de les assassiner.
    Cent millions mangés d'avance étaient dus aux receveurs généraux. Pour payement, on les écrasa. Une compagnie de banquiers fut autorisée à tirer sur eux, s'engageant à fournir au roi trois ou quatre millions par mois pour un armement maritime, un grand coup qu'on méditait.
    Et les fermiers généraux payés en même monnaie, éreintés. On leur devait cent cinquante millions. On frappa sur eux soixante-douze mille actions de mille francs, qui réduisirent de moitié leurs bénéfices.
    Ce ne fut pas fait sans adresse. Choiseul flattant l'opinion, caressant Voltaire, les salons, le parti philosophique, fit ce tour par un philosophe. Il prit un homme de lettres, un simple maître des requêtes, le fit contrôleur général. Homme d'esprit, homme d'affaires, Silhouette avait lu, voyagé, vécu à Londres, travaillé à la Compagnie des Indes. Il avait, près des philosophes, le mérite d'avoir traduit quelque chose des libres penseurs, Pope, Warburton et Bolingbroke. C'était un parleur agréable, dit Grimm, d'équivoque mine, l'air double, coupable et faux. Il n'avait nul expédient que ceux où Machault avait échoué,—impôt sur tous (rejeté),—pensions réduites (impossible).Tout cela facile à prévoir. Nul résultat à attendre qu'une tempête de sifflets.
    L'heureuse idée de Choiseul pour gazer son crime d'Autriche, c'était de faire que la France tournât le dos au levant, ne regardât qu'à l'ouest vers le grand spectacle qu'il lui préparait. Idée neuve. C'était celle qui a toujours échoué, la vieille, l'éternelle Armada de 1585, qu'on remet toujours à flot. Sans doute, un coup de surprise n'est pas impossible. Jeter un Charles XII dans Londres, comme le rêvait Alberoni, c'est hasardeux, mais non absurde. Les plans les plus insensés sont ceux d'un Philippe II, qui, par de longs préparatifs, met un grand peuple en éveil, en demeure d'organiser ses puissantes résistances. Que dire de ces constructions étranges de bateaux plats que Choiseul imagina en 1759 pour l'amusement des Anglais? que Bonaparte imita.
    La grande flotte qui devait couvrir le passage des bateaux, était préparée au plus loin, à Toulon. Pour rejoindre Brest et rallier l'autre escadre, que de chances elle avait contre elle! La longue navigation, l'écartement des vaisseaux, les coups violents, capricieux, qu'on a au golfe de Gascogne, la rencontre de l'ennemi qui, dans un pareil voyage, rôdant autour, comme un requin, mordrait de manière ou d'autre. Tempêtes de l'Armada, ou défaites de Trafalgar, c'est ce qui ne pouvait manquer.
    Au lieu de concentrer l'effort, on le divisait; à la fois, on attaquait les trois royaumes. Le corsaire Thurot, de Dunkerque, devait passer en Irlande. De Brest, Aiguillon menait douze mille hommes en Écosse. Soubise,avec une armée (pas moins de cinquante mille hommes), sur les fameux bateaux plats, devait cingler du Havre à Londres.
    À la grandeur d'un tel projet on devait tout sacrifier. Le vieux ministre de la guerre, Bellisle, annonça, dès janvier, qu'on n'enverrait aucun secours aux colonies. La flotte anglaise, avant avril, nous prit déjà la Guadeloupe. Au Canada, l'intrépide Montcalm, de Nîmes, sans renfort et sans espoir, lutta jusqu'au mois de septembre; il fut tué, le pays perdu. Dans l'Indoustan, notre Irlandais Lally, un fou furieux, qui n'avait que de la bravoure, avait remplacé Dupleix. Il avait neutralisé l'homme capable, gendre de Dupleix, l'excellent général Bussy. Il avait par ses barbaries, ses emportements, son mépris pour les croyances indigènes, mit l'Inde entière contre nous. Il échoua devant Madras en février 1759, et de plus en plus déclina devant l'ascendant de lord

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