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Le Lys Et La Pourpre

Le Lys Et La Pourpre

Titel: Le Lys Et La Pourpre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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ès
langues étrangères.
    — Monseigneur, dis-je en lui faisant un second salut
tout aussi profond que le premier, en fait de langues étrangères, Votre
Éminence n’a rien à envier à personne…
    J’aurais pu ajouter qu’outre le grec et le latin, le
cardinal connaissait l’italien et l’espagnol, mais j’arrêtai mon compliment
avant qu’il ne tombât dans la flatterie, laquelle Richelieu abhorrait. Non
qu’il fût le moindrement modeste, tout le rebours, mais étant accoutumé dans
les occasions à se décerner à lui-même, quoique toujours en termes voilés, les
plus magnifiques éloges, il jugeait disconvenable et quasi insultant ceux qu’on
lui adressait. Il était fort haut, en effet, non de par sa lignée, car il était
né de noblesse campagnarde, mâtinée de bonne bourgeoisie, mais par son
caractère propre et la conscience qu’il avait de ses grands talents.
    — Savez-vous, mon cousin, reprit Louis, que lorsque
j’ai disgracié Schomberg, d’Orbieu a eu l’audace de se rendre dans son
appartement pour le consoler de sa solitude ? Et l’ayant consolé, il me
rapporta une lettre où Schomberg me priait de diligenter une enquête du
Parlement sur la façon dont il avait ménagé sa charge de surintendant des
Finances. Que pensez-vous, mon cousin, de la conduite du comte en ce
prédicament ?
    — Sire, dit le cardinal avec un sourire, un acte se
juge se deux façons. Primo, par les risques qu’il vous fait encourir. Secundo, par les résultats qu’on obtient.
    — Le risque était grand, dit Louis. Je pouvais
disgracier d’Orbieu.
    — Mais, Sire, dit Richelieu, vous ne l’avez pas fait.
    — En effet, dit Louis. Son geste ne m’a pas déplu. J’ai
diligenté l’enquête demandée et Schomberg en est sorti blanc comme neige.
    — Le résultat est donc excellentissime ! dit le
cardinal, qui aimait les superlatifs à l’italienne. Sire, poursuivit-il, avec
votre permission, je voudrais poser une question au comte d’Orbieu.
    — Posez-la, mon cousin.
    — Comte, reprit Richelieu, estimez-vous que Schomberg
ait été un bon surintendant des Finances ?
    Je tournai ma langue en bouche avant de répondre, étant très
conscient qu’une réponse, selon la philosophie cardinalice, se jugeait de deux
façons : primo par les risques qu’elle vous faisait encourir, secundo par les résultats qu’on en obtenait. Mais n’ayant pas l’esprit aussi profond
que celui du cardinal, j’optai pour la sincérité.
    — Éminence, dis-je, Monsieur de Schomberg est un très
honnête homme et un très bon soldat, mais il ne connaît pas les finances.
    — Bravo, bravissimo, Comte ! dit Richelieu, c’est
tout justement ce que pense Sa Majesté ! Aussi, remettant Schomberg en sa
charge de surintendant des Finances, Sa Majesté a décidé de lui adjoindre
d’ores en avant Monsieur de Marillac et Monsieur de Champigny qui tous deux
sont orfèvres en la matière.
    Je fus au comble de la joie d’apprendre que Schomberg allait
retrouver sa charge de surintendant et me trouvant en même temps bien assuré
que le cardinal n’avait pas été étranger, ni à ce retour en grâce, ni à la
désignation de Marillac et de Champigny, j’admirai l’habileté avec laquelle le
cardinal, le résultat obtenu, attribuait au roi le mérite de ses propres
décisions.
    — Sire, dis-je, avec un profond salut, je suis très
heureux que Votre Majesté ait rétabli Monsieur de Schomberg.
    — Cette affaire est terminée à ma satisfaction, dit le
roi en jetant un œil à la montre-horloge qu’il tira de l’emmanchure de son pourpoint.
    Après quoi, il se leva avec pétulance. À ce ton rapide et à
la vivacité de ses mouvements j’entendis qu’il brûlait de partir pour la
chasse, la pluie ayant cessé.
    —  Sioac, dit-il en supprimant l’« r »
de mon nom, comme il faisait en ses maillots et enfances (grand signe meshui de
ma faveur), vous irez vous-même, à mes frais, quérir Monsieur de Schomberg en
Anjou pour lui annoncer ce qu’il en est de mes intentions et le ramènerez
céans. Monsieur du Hallier vous baillera un de mes carrosses et une forte
escorte.
    Du Hallier faisait partie comme son frère, Monsieur de
Vitry, Déagéant, Tronçon, moi-même et quelques autres de la conspiration que
Louis avait conçue et menée à bien pour exécuter Concini, et éloigner sa propre
mère de ce pouvoir auquel, au grand dol et dommage de son fils, elle se
cramponnait. Après l’exécution

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