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Belle Catherine

Belle Catherine

Titel: Belle Catherine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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Ventadour, la petite troupe réduite à six cavaliers parcourait sous d'incessantes rafales de vent le haut plateau de la Châtaigneraie, au sud d'Aurillac. Cette fois, le plein cœur de l'Auvergne était atteint et les yeux de Catherine s'ouvraient sur ces vieilles montagnes noires et rudes, si austères en hiver, mais où l'inaltérable et sombre verdure des sapins mettait une douceur. Elle avait vu des torrents dévalant les côtes, des lacs bleu nuit, inquiétants par leur silence et leur eau sombre, et des forêts qui semblaient ne devoir jamais finir.
    Grâce à l'air vif, grâce aussi aux provisions fournies par l'Espagnol et dont on avait pu emporter une certaine quantité, grâce enfin à sa robuste constitution, elle avait repris ses forces avec une étonnante rapidité. Deux jours après avoir mis son fils au monde, elle reprenait place sur Morgane, malgré les objurgations inquiètes d'Arnaud.
    — Je me sens forte ! lui disait-elle en riant. Et puis, nous avons assez traîné comme cela à cause de moi. J'ai hâte d'arriver.
    On avait fait halte une journée à l'abbaye bénédictine de Saint-Géraud qui commandait Aurillac et dont le seigneur-abbé était un parent d'Arnaud. Là, le jeune Montsalvy avait reçu le baptême des mains de l'abbé d'Estaing. D'un commun accord, ses parents lui avaient donné le nom de Michel, en souvenir du frère d'Arnaud, jadis massacré par la populace parisienne et que Catherine avait follement tenté de sauver.
    — Il lui ressemblera, affirmait Arnaud en examinant son fils, comme il prenait plaisir à le faire bien souvent.
    D'ailleurs, il est blond, comme lui... et comme toi, ajoutait-il avec un regard à sa femme.
    Avoir donné le jour à ce qu'Arnaud jurait devoir être une copie conforme de Michel de Montsalvy, qu'elle avait adoré au premier regard, emplissait la jeune femme d'une joie profonde et grave. L'enfant lui devenait plus cher encore.
    Pour un bébé âgé d'une semaine à peine, le petit Michel faisait preuve d'une belle vitalité. Le voyage, malgré le froid et les chutes de neige, ne semblait pas l'incommoder. Continuellement niché dans le vaste giron d'une Sara rayonnante pour qui l'hiver n'existait plus qu'en fonction de ses effets possibles sur le poupon, chaudement enveloppé, un voile léger sur sa minuscule figure, il dormait à poings fermés les trois quarts du temps, ne s'éveillant que pour réclamer son repas d'une voix perçante. Les voyageurs, alors, faisaient halte dans quelque coin abrité et l'enfant passait des bras de Sara à ceux de Catherine. Ces moments-là étaient pour la jeune mère des instants merveilleux. Elle avait le sentiment profond qu'il était bien à elle, fait de sa chair et de son sang. Lés doigts minuscules s'agrippaient au sein gonflé qu'on lui offrait et la petite bouche ronde tétait avec une ardeur qui inquiétait Arnaud.
    — Jeune drôle ! grommelait-il, une fois au château on te trouvera une vigoureuse nourrice ! Si on te laisse faire, tu dévoreras ta mère.
    — Rien ne vaut pour un bébé le lait maternel ! objectait Sara doctorale.
    — Ouais ! Chez nous, les garçons ont toujours eu des nourrices. Nous sommes de grands dévoreurs dans la famille et nos mères peuvent rarement suffire. Moi, j'avais deux nourrices ! concluait-il triomphalement.
    Ces petites escarmouches amusaient Catherine qui connaissait bien la raison profonde qu'avait son époux de prôner les nourrices. Arnaud avait bien de la peine à respecter le temps rituel des couches qui oblige un mari à observer l'abstinence charnelle jusqu'aux relevailles. La nuit venue il laissait, bien à contrecœur, Catherine dormir auprès de Sara et du bébé. Quant à lui, malgré la fatigue de la chevauchée, il s'en allait arpenter les environs, ne rentrant qu'au bout d'une heure ou deux. Catherine, d'ailleurs, connaissait bien l'expression affamée qu'il avait, en la regardant et, lorsqu'elle faisait boire Michel, il demeurait planté devant elle, le regard rivé à sa gorge découverte, cachant ses mains derrière son dos pour qu'elle ne les vît pas trembler.
    Le matin même de ce jour qui ne devait pas s'achever sans que l'on fût enfin au but, Arnaud avait à moitié assommé Escornebœuf qu'il avait surpris, embusqué derrière une porte, tandis que Catherine allaitait Michel. Le colosse n'avait pas entendu venir j Montsalvy. Le visage apoplectique, il se tenait ; accroupi, l'œil au trou de la serrure au-delà de laquelle la jeune femme, se

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