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Jean sans peur

Jean sans peur

Titel: Jean sans peur
Autoren: Michel Zévaco
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gorge.
    – Alors, dit Laurence, je vais vous lire ce qui est écrit sur ce parchemin. Écoutez, Jean de Bourgogne…
    On vit Laurence d’Ambrun se rapprocher de Jean sans Peur. On entendit le murmure de sa voix qui lisait le parchemin. Mais nul ne put saisir un mot distinct. À mesure qu’elle lisait le parchemin… l’acte de mariage !… la preuve matérielle du sacrilège !… la preuve écrite et signée d’un crime plus terrible alors que le parricide et le régicide !… à mesure donc qu’elle lisait, on vit le duc de Bourgogne se courber comme sous une main invisible, on vit son front ruisseler de sueur, et ses yeux s’égarer, on le vit palpiter et panteler, on l’entendit demander grâce !…
    Laurence d’Ambrun replia le parchemin et le mit dans son sein. Alors elle prononça :
    – Jean de Bourgogne, voulez-vous que je relise à voix haute ?
    – Grâce ! râla Jean sans Peur. Laurence, pardonne à celui qui t’aima !…
    – Je ne lirai donc pas ! Mais vous, dites au roi le nom du meurtrier de son frère.
    Jean sans Peur, d’un mouvement lent et raide, se tourna vers Charles VI. À coup sûr, il était fou en cette minute. L’arrivée du roi, la fanfare, l’invasion de la garde royale, l’écroulement subit de son rêve de puissance lui avaient déjà asséné un coup terrible. L’apparition du spectre avait désorganisé, émietté, balayé ce qu’il y avait encore en lui de volonté. La lecture de cet acte qu’il croyait anéanti depuis des ans acheva de l’affoler. Il éprouva le vertige de l’horreur. Il eut la sensation de tomber dans un gouffre. Les yeux morts, la voix pâteuse, le geste indécis, il murmura :
    – Sire, le meurtrier de votre frère le duc d’Orléans…
    – Eh bien ! hurla le roi. Parlez donc enfin, par Notre-Dame ! Qui est-ce ?…
    – C’est moi !…
    – Vous ! rugit Charles VI.
    – Moi !…
    À ce mot effrayant, il y eut d’abord comme un coup de silence, – la sensation inverse d’un coup de tonnerre. Puis, un vaste murmure qui se gonfla, monta, éclata, se déchaîna en clameurs furieuses. Et dans cette rumeur faite d’horreur, de terreur, de stupeur, grinça la voix du roi qui jetait l’ordre :
    – Arrêtez-le ! Arrêtez le duc de Bourgogne !…
    Il y eut une formidable poussée de la garde royale. Savoisy s’avançait, en hurlant :
    – Votre épée, seigneur duc, votre épée !
    En un instant, Jean sans Peur fut entouré par ses gentilshommes, disparut derrière un étincelant rempart de cuirasses, hérissé d’épées. Ce groupe, tout d’une pièce, se mit en route vers la porte, harcelé par les archers, grondant, frappant, faisant gicler le sang et, une minute plus tard, Jean sans Peur avait gagné la grande cour d’honneur de l’Hôtel Saint-Pol.
    *
    * *
    Comment Jean sans Peur fut amené à s’avouer hautement coupable du meurtre, comment il fut poussé à cet acte de folie que l’histoire déclare incompréhensible et se contente d’attribuer au remords, nous avons tenté de l’expliquer.
    Comment Jean sans Peur put sortir de l’Hôtel Saint-Pol, c’est un événement qui demeure encore mystérieux.
    On dit pourtant qu’une rude bataille fut livrée par les deux cents Bourguignons à la grand’porte de l’Hôtel Saint-Pol ; on dit que cette bataille dura environ vingt minutes et que plus de cinquante Bourguignons y mordirent la poussière. On dit que les survivants, groupe farouche et redoutable encore, plaçant, au milieu d’eux leur duc insensible, inerte, incapable d’une volonté de défense, tentèrent un suprême assaut et qu’ils allaient tous être égorgés, lorsque la porte, enfin, s’ouvrit, et que le pont-levis s’abattit.
    Les Bourguignons, poussant ensemble un rugissement de joie, se lancèrent sur la porte ouverte et disparurent dans la rue Saint-Antoine.
    Dix minutes plus tard, Jean de Bourgogne, au milieu des siens, galopait sur la route de Dijon, abandonnant les émeutiers, Caboche et plus de deux mille Bourguignons qui se retirèrent comme ils purent. Il paraît que pendant plusieurs jours, éperdument, Jean sans Peur galopa, et que de minute en minute, il regardait derrière lui, et qu’à toutes les questions, à toutes les exhortations, à toutes les imprécations, il répondait seulement :
    – Le spectre ! Voyez si le spectre ne nous suit pas !…
    Mais qui ouvrit la grand’porte de l’Hôtel Saint-Pol ? Qui baissa le pont-levis ?…
    On raconte
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