Le prix de l'indépendance
oncle. Sa grand-mère Benedicta était sans doute la seule à pouvoir le faire. Penser à oncle Hal lui rappela soudain son cousin Henry et sa gorge se serra.
Adam avait dû apprendre la nouvelle, lui aussi, mais il ne pouvait rien faire pour son frère. Pas plus que lui, que le devoir appelait dans le Nord. Cependant, son père et oncle Hal avaient sûrement un plan…
Son cheval redressa brusquement la tête et s’ébroua. Un homme se tenait sur le bord de la route, un bras levé pour lui faire signe.
William retint sa monture et scruta le sous-bois au cas où des complices seraient tapis derrière les arbres, prêts à détrousser l’innocent voyageur. Le bas-côté était relativement dégagé et la première ligne de troncs était trop dense et touffue pour que quelqu’un s’y cache. Il s’arrêta à distance respectueuse de l’inconnu, un vieil homme au visage sillonné de rides et aux cheveux d’un blanc pur tressés dans la nuque. Il s’appuyait sur un grand bâton.
— Je vous souhaite le bonjour, monsieur, déclara William.
— Moi pareillement, jeune homme.
Ce devait être un gentleman car il avait fière allure, ses vêtements étaient de qualité et il avait un bon cheval que William apercevait entravé et paissant non loin de là. Il se détendit légèrement.
— Où allez-vous ainsi, monsieur ? demanda-t-il poliment.
Le vieillard, un Ecossais à en croire son accent, haussa les épaules :
— Cela dépend un peu de ce que vous m’apprendrez, jeune homme. Je suis à la recherche d’un homme nommé Ian Murray. Il me semble que vous le connaissez ?
Cette question déconcerta William. Comment le savait-il ? S’il connaissait Murray, peut-être ce dernier lui avait-il parlé de lui ? Il répondit prudemment :
— Je le connais en effet mais j’ignore où il se trouve.
— Ah non ?
L’homme le dévisageait avec une insistance déplacée. Ce vieux bouc le prenait-il pour un menteur ?
— Non, répéta-t-il d’un ton ferme. Je l’ai rencontré dans le Great Dismal il y a de cela quelques semaines, en compagnie de Mohawks. J’ignore où il est parti depuis.
— Des Mohawks… répéta l’homme, songeur.
William vit son regard s’arrêter sur la griffe d’ours accrochée à son cou.
— C’est un Mohawk qui vous a donné cette babiole ?
William se raidit, n’appréciant guère les connotations péjoratives du terme « babiole ».
— M. Murray me l’a apportée, de la part d’un ami.
— Un ami… reprit le vieil homme en scrutant attentivement William. Comment vous appelez-vous, jeune homme ?
— Je ne vois pas en quoi cela vous concerne, monsieur, répondit William que cet examen mettait mal à l’aise. Bonne journée !
Les traits de l’homme se durcirent et sa main se crispa sur le pommeau de sa canne quand William rassembla ses rênes. Juste avant de s’éloigner, il eut le temps de remarquer qu’il lui manquait deux doigts. Il crut un instant que le vieillard allait monter en selle à son tour et tenter de le rattraper mais, quand il se retourna, l’homme était toujours debout sur le bas-côté, à l’observer.
Cela ne changeait plus grand-chose mais, afin d’attirer le moins possible l’attention, William jugea préférable de glisser la griffe d’ours sous sa chemise où elle se balança à l’abri des regards aux côtés de son rosaire.
Titre original : An Echo in the Bone
© Diana Gabaldon, 2009
Publié avec l’accord de l’auteur, c/o BAROR INTERNATIONAL, INC., Armonk, New York, USA
© Presses de la Cité, un département de, 2010 pour la traduction française
EAN 978-2-258-08958-7
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