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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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Lanjarón qui se
dressait sur une colline rocheuse de presque six cents aunes au sud du village
qui dominait les terres ; trois des quatre côtés de la forteresse
donnaient dans le vide, sur d’impressionnants précipices de roches. Le château
avait été construit, comme beaucoup d’autres, à l’époque nasride, et s’était
retrouvé à moitié détruit après la première révolte des Alpujarras en l’an
1500, quand les Maures s’étaient soulevés contre la dure politique du cardinal
Cisneros, qui prendrait fin avec la trahison des accords de paix de Grenade par
les Rois Catholiques.
    Tandis qu’il traversait le camp, il chercha des yeux Brahim
et Fatima : ils avaient beau avoir fui au coucher du soleil, ils ne
pouvaient avoir voyagé à la seule lumière de la lune et s’étaient forcément
arrêtés au cours de cette première nuit d’avance qu’ils avaient sur eux. Mais
il ne parvint pas à les reconnaître parmi la multitude d’ombres qui bougeaient,
affligées. Peut-être étaient-ils plus loin déjà, à Tablate, où certains
s’étaient dirigés pour passer la nuit.
    Il effectua le trajet jusqu’à la forteresse sous la lumière
ténue et dorée de la lune. La mule, experte, avançait avec prudence, cherchant
un endroit ferme où poser les pattes… comme la Vieille. Qu’était donc devenue
la pauvre Vieille ? Sentant la nostalgie affluer, il repoussa cette
pensée. Et le chevalier ? Était-il vivant ? Il aurait aimé connaître
son identité, mais le chrétien s’était quasiment évanoui après avoir asséné le
coup qui l’avait délivré de ses chaînes. Dans tous les cas, sans lui, sans sa
soif de liberté, peut-être n’aurait-il pas fui et serait-il galérien à bord du Cheval
Rapide de Barrax… ou mort, comme Yusuf. Au souvenir du garçonnet, il
ressentit une terrible angoisse. Il leva les yeux vers l’imposante silhouette
du château et soupira. Après tous ces mois de souffrances, les gens se
rendaient. À nouveau. À quoi bon tant de morts et de malheurs ? Ce château
défendrait-il encore un jour les aspirations d’un peuple outragé et
opprimé ?
    Il grimpa jusqu’au château en ruine. Il mit pied à terre,
tête basse, et attendit que ses yeux s’habituent à la nouvelle obscurité. Il
opta pour le bastion encore debout, sur le côté sud de la forteresse, et s’y
dirigea.
    Il tâcha de deviner où se trouvait La Mecque. Quand il crut
l’avoir trouvée, il ramassa du sable et se lava avec. Il leva ses yeux bleus au
ciel : des yeux différents de ceux qui avaient contemplé l’alfange d’Hamid
pour la première fois. Leur éclat juvénile avait disparu, voilé par une
expression de douleur.
    — Il n’y a pas d’autre Dieu que Dieu et Mahomet est
l’envoyé de Dieu.
    Il récita à voix basse, en un murmure, tenant par les deux
bouts l’alfange d’Hamid au-dessus de sa tête, dans son fourreau.
    Combien de fois avait-il refusé, devant Barrax, de prononcer
cette profession de foi ?
    — Hamid, je suis là, susurra-t-il.
    Il écouta le silence autour de lui.
    — Je suis là ! cria-t-il.
    Le cri résonna sur les collines et les vallons, le
surprenant lui-même. Qu’était devenu l’uléma ? Il attendit quelques
instants et aspira un grand bol d’air.
    — Allah est grand ! hurla-t-il de toute la force
de ses poumons.
    Seuls les sommets silencieux lui répondirent.
    — J’ai promis que cette épée ne tomberait entre les
mains d’aucun chrétien, ajouta-t-il d’une voix tremblante.
    Il l’enterra au pied du bastion, le plus profondément
possible, se déchirant doigts et ongles pour creuser la terre au moyen d’une
petite corne qu’il avait prise dans le camp. Puis il pria, sentant la présence
d’Hamid à ses côtés, comme tant de fois à Juviles. Enfin, grâce à une pierre et
à la corne, il frappa les boulons de ses fers qu’il réussit à faire sauter,
faisant apparaître ses chevilles décharnées.
     
    Il était plus de midi quand le groupe d’Hernando arriva au
camp de don Juan d’Autriche. À un quart de lieue, les femmes découvrirent leurs
têtes et leurs visages, et cachèrent dans leurs vêtements leurs bijoux
interdits. Dans un grand champ aux abords de Padul, les Maures étaient
accueillis par plusieurs compagnies de soldats.
    — Rendez vos armes ! criaient-ils en les obligeant
à former des rangs. Quiconque lève une arquebuse, une arbalète ou empoigne une
épée, mourra sur l’instant !
    Devant chacune des

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