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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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culotte. Dans un sac qu’il portait à la main droite se trouvait la tête du
corsaire. Il avait aussi plusieurs dagues à la ceinture et une petite arquebuse
pendue du côté opposé à l’alfange d’Hamid. Avec audace, élevant la voix, il
demanda à plusieurs soldats de garde qu’il rencontra où était la tente de
Brahim. Il l’atteignit, entra sans réfléchir, résolu, l’épée dégainée. Peu lui
importait que ce fût l’époux de sa mère ! Cette fois, les supplications
d’Aisha ne l’arrêteraient pas. Mais la tente qu’on lui avait indiquée était
vide : il n’y avait plus rien à l’intérieur. Il allait rengainer son arme
quand un bruit dans son dos l’obligea à se retourner, l’épée à nouveau prête au
combat. Il vit sa mère, immobile, à l’entrée.
    — Que cherches-tu ? demanda Aisha.
    Hernando découvrit son visage.
    — Mon fils !
    Aisha se précipita vers lui, mais pour la première fois
Hernando se déroba à son étreinte.
    — Et Brahim ? questionna-t-il avec brusquerie. Et
Fatima ? Où sont-ils ?
    — Mon fils… Tu es vivant ! Et… libre ?
balbutia sa mère.
    Hernando observa les larmes qui coulaient sur les joues
d’Aisha.
    — Mère, où est Fatima ? lui redemanda-t-il, cette
fois avec douceur, en la prenant dans ses bras.
    — Ils ont fui. Ils sont partis se rendre aux chrétiens,
répondit-elle entre deux sanglots. Cette nuit, dès que le soleil s’est couché.
    La déception d’Hernando fut si manifeste qu’Aisha s’empressa
de continuer :
    — Le roi a dû réprimander ton beau-père à plusieurs
reprises. Il n’assistait plus aux conseils, ni même aux escarmouches
pour… – elle hésita – rester avec Fatima, lâcha-t-elle finalement.
Comme l’édit des chrétiens n’accorde la liberté qu’à deux personnes, Brahim a
choisi Fatima et notre fils aîné, Aquil. Ils ont aussi emmené Humam, à la
demande expresse de Fatima. Peut-être qu’un bébé de si peu de mois ne sera pas
pris en compte.
    — Fatima… Fatima est partie avec lui ?
    — Elle a dû obéir, mon fils. Brahim…
    — Et Musa ? l’interrompit-il.
    Il ne voulait pas connaître de détails supplémentaires.
    — Dans la tente d’à côté. C’était la seule où nous
avions le droit de…
    — Suivons-les ! ordonna-t-il en la coupant une
fois encore.
    Le jour se levait. Ils trouvèrent un troupeau de mules à
quelques mètres de la tente et Hernando décida de prendre l’une d’elles pour sa
mère. Le muletier, un Maure déjà vieux, se réveilla en sentant de l’agitation
parmi ses bêtes. Hernando le menaça de l’épée puis lui laissa la vie sauve et
le força à les accompagner sur une partie du trajet afin qu’il ne puisse
dénoncer leur fuite. Enfin, lorsqu’ils furent suffisamment loin, il le remit en
liberté.

 
22.
    Hernando, Aisha et Musa mirent deux jours pour parcourir la
distance qui les séparait de Padul, où se trouvait le camp de don Juan
d’Autriche. Pendant le trajet, ils rejoignirent des centaines de Maures qui
venaient se rendre. Le prince avait exigé que tous ceux qui transitaient par
les Alpujarras dans ce but portent une croix blanche sur l’épaule droite.
Ainsi, de loin, on voyait de longues files de gens avancer sur de nombreux
chemins, comme des processions de grandes croix blanches tissées sur les vêtements
d’hommes, de femmes et d’enfants qui traînaient les pieds en silence, abattus,
épuisés, affamés et malades, ayant perdu l’illusion fugace d’avoir retrouvé
leur culture, leur terre… et leur Dieu. Tous connaissaient leur destin :
l’exode dans les différents royaumes du monarque chrétien, loin de Grenade,
comme cela s’était passé pour les Maures de l’Albaicín et de la vega.
    Ils se trouvaient dans les environs de Lanjarón lorsqu’il
commença à faire nuit. La lumière se mit à décliner et certains s’arrêtèrent
là, vite rejoints par d’autres. Il n’y eut ni cris de joie, ni fête, ni
danses ; on alluma peu de feux de camp et les gens se préparèrent à dormir
à la belle étoile. Les quelques provisions que chacun avait pu emporter dans sa
fuite constituèrent le seul repas. Personne n’appela à la prière.
    Hernando mâcha un morceau de pain, prit la mule et dit au
revoir à sa mère.
    — Où vas-tu ?
    — J’ai quelque chose à faire. Je reviendrai, mère,
tenta-t-il de la rassurer devant son regard préoccupé.
    Il se dirigea vers l’imprenable château de

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