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Même pas juif

Même pas juif

Titel: Même pas juif Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jerry Spinelli
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renseigné là-dessus.
    — Moi, j’ai six ans, a-t-elle précisé. Mais j’en aurai sept
    demain. Il y aura une fête. Tu veux venir ?
    J’ai dit oui. Sautant du perron, elle s’est approchée, s’est
    postée devant moi. Jusqu’à me toucher.
    — Tiens-toi droit ! m’a-t-elle ordonné.
    J’ai obtempéré. À travers ses mèches brunes qui bouclaient,
    je distinguais l’arrière de sa maison. Ses mains ont aplati les
    cheveux au sommet de sa tête et ont avancé vers moi, effleurant
    mon nez. Elle a reculé.
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    — Je t’arrive au nez, a-t-elle conclu. Tu dois avoir… (elle m’a
    observé en réfléchissant, un doigt pressé contre sa lèvre
    inférieure, dévoilant ses dents du bas, dont l’une manquait)…
    huit ans !
    Elle est partie en courant vers la porte arrière. Se
    retournant, elle a esquissé un geste dans ma direction et pipé
    d’une petite voix d’oiseau :
    — N’oublie pas… la fête, demain.
    Puis elle est rentrée.

    Lorsque je suis revenu, le lendemain, elle se tenait debout
    sur les marches, les mains sur les hanches, l’œil mauvais. Une
    cape de velours noir laissait deviner une robe rose qui lui
    tombait aux genoux. Un ruban rouge était perché sur sa tête, tel
    un petit chapeau. Elle s’est penchée vers moi, et j’ai noté que
    son ruban rouge se reflétait dans ses vernis noirs.
    — Tu es en retard, m’a-t-elle reproché.
    — C’est quoi, en retard ?
    — La fête devait commencer, mais je voulais t’attendre.
    Deux de mes amies sont déjà parties.
    Avec un grognement furibond, elle m’a hissé sur les
    marches et entraîné dans la maison.
    — Il est là ! a-t-elle crié à la cantonade.
    Des pas ont retenti, venant de toutes les directions, certains
    précipités, d’autres plus mesurés. Nous étions dans une pièce
    dotée d’une grande table. Sur celle-ci, de la nourriture. Il y avait
    des plats en verre remplis de biscuits et de bonbons, mais j’étais
    surtout fasciné par le gâteau qui trônait au centre. Je n’en avais
    jamais vu d’aussi beau. Rectangulaire, c’était un jardin de pâte
    d’amande. Il y avait des fleurettes en pâte d’amande bleue,
    jaune et verte, une petite maison en pâte d’amande rouge avec
    de la fumée en pâte d’amande bleue qui sortait de la cheminée,
    et il y avait même un petit animal en pâte d’amande qui
    ressemblait à un chien mais aurait pu tout aussi bien être un
    chat. Au milieu du gâteau, quelque chose était écrit dans un
    glaçage jaune.
    Des adultes se tenaient autour de la table, et trois autres
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    petites filles en robes brillantes qui rigolaient en me
    dévisageant. Tout à coup, une des dames s’est mise à planter des
    bougies blanches dans le gâteau. L’une d’elles a carrément
    transpercé la maisonnette rouge. Puis un homme s’est penché
    avec une allumette et en a frôlé chaque bougie jusqu’à ce qu’elle
    s’enflamme. J’étais sous le choc. Ils allaient incendier le gâteau !
    Il n’y avait pas une minute à perdre. J’ai soufflé sur le feu, j’ai
    attrapé le gâteau et me suis enfui en courant. Des rafales de
    neige tourbillonnaient devant mon visage.
    Lorsque j’ai raconté à Youri ce qui s’était passé, il a
    tellement ri qu’il est tombé sur son lit. J’aimais bien, quand
    Youri riait – ses cheveux roux paraissaient s’illuminer. Ensuite,
    il m’a expliqué ce qu’étaient les gâteaux d’anniversaire et les
    bougies, et j’ai rigolé moi aussi.
    D’avoir couru avait fendillé le magnifique gâteau, comme un
    trottoir bombardé.
    — Apparemment, a dit Youri, on va devoir le manger tout
    seuls.
    Mais avant, il a lu ce qui était écrit sur les lézardes. «Joyeux
    anniversaire, Janina », d’après lui. Trempant le doigt dans le
    glaçage jaune, c’est la première chose que j’ai mangée.
    Le jour d’après, j’ai volé dans une pâtisserie le plus beau
    gâteau que je pouvais trouver. J’ai attendu le crépuscule et l’ai
    porté jusqu’à la maison de Janina, la fille aux grands yeux. Je
    l’ai déposé sur le perron de derrière. Ai pris les bougies dans ma
    poche. Les ai plantées sur le gâteau. Les ai enflammées avec une
    allumette. Ai frappé à la porte et me suis sauvé.

    J’ai erré dans la ville le restant de la soirée. Ne suis pas
    rentré à la maison avant tard dans la nuit. En chemin, j’ai
    entendu des voix. À un carrefour, des feux brûlaient dans
    l’obscurité. D’abord, j’ai cru qu’une formidable

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