Odyssée
aussitôt à
Hektôr :
Hektôr, et vous, chefs des Troiens et des Alliés, c'est une honte de fuir vers Ilios, vaincus, à cause de notre l‚cheté, par les braves Akhaiens.
Voici qu'un des Dieux s'est approché de moi, et il m'a dit que le très-puissant Zeus nous était propice dans le combat. C'est pourquoi, marchons aux Danaens, et qu'ils n'emportent pas sans peine, jusqu'aux nefs, Patroklos mort.
Il parla ainsi, et il s'élança parmi les premiers combattants, et les Troiens firent face aux Akhaiens. Et Ainéias blessa d'un coup de lance Leiokritos, fils d'Aris bas, et brave compagnon de Lykomèdès. Et le brave Lykomèdès fut saisi de compassion en le voyant tomber. B s'approcha, et, lançant sa pique brillante, il perça dans le foie le Hippaside Apisaôn, prince des peuples, et il rompit ses forces. Le Hippaside était venu de la fertile Paioniè, et il était le premier des Paiones, après Astéropaios. Et le brave Astéropaios fut saisi de compassion en le voyant tomber, et il se rua en avant pour combattre les Danaens, mais vainement, car les Akhaiens se tenaient tous, hérissés de lances, autour de Patroklos. Et Aias les exhortait ardemment, et il leur ordonnait de ne point s'écarter du cadavre en s'élançant hors des rangs, mais de rester autour de Patroklos et de tenir ferme. Le grand Aias commandait ainsi ; et la terre était baignée d'un sang pourpré, et tous tombaient les uns sur les autres, Troiens, Alliés et Danaens ; mais ceux-ci périssaient en plus petit nombre, car ils n'oubliaient point de s'entr'aider dans la mêlée. Et tous luttaient, pareils à un incendie ; et nul n'aurait pu dire si Héhos brillait, ou Sélènè, tant les braves qui s'agitaient autour du Ménoitiade étaient enveloppés d'un noir brouillard.
Ailleurs, d'autres Troiens et d'autres Akhaiens aux belles knèmides combattaient à l'aise sous un air serein ; et là se répandait l'étincelante splendeur de Hélios, et il n'y avait de nuées ni sur la terre, ni sur les montagnes. Et ils combattaient mollement, évitant les traits de part et d'autre, et séparés par un large espace. Mais, au centre, sous le noir brouillard, les plus braves, se frappant de l'airain cruel, subissaient tous les maux de la guerre. Et là, deux excellents guerriers, Thrasymèdès et Antilokhos, ne savaient pas que l'irréprochable Patroklos f˚t mort. Es pensaient qu'il était vivant et qu'il combattait les Troiens au fort de la mêlée, tandis qu'eux-mêmes luttaient pour le salut de leurs compagnons, loin du Ménoitiade, comme Nestôr le leur avait ordonné, quand il les envoya des nefs noires au combat.
Et, pendant tout le jour, le carnage continua autour de Patroklos, du brave compagnon du rapide Aiakide, et tous avaient les genoux, les pieds, les mains et les yeux souillés de poussière et de sang. De même qu'un homme ordonne à ses serviteurs de tendre une grande peau de boeuf tout imprégnée de graisse liquide, et que ceux-ci la tendent en cercle, et que, sous leurs efforts, la graisse pénètre dans la peau ; de même, de tous les côtés, les combattants traînaient çà et là le cadavre dans un étroit espace, les Troiens vers Ilios et les Akhaiens vers les nefs creuses ; et un affreux tumulte s'élevait, qui e˚t réjoui Athènè et Arès qui irrite le combat.
Ainsi Zeus heurta, tout le jour, la mêlée des hommes et des chevaux sur le cadavre de Patroklos.
Mais le divin Akhilleus ignorait la mort du Ménoitiade, car les hommes combattaient, loin des nefs, sous les murailles de Troiè. Et il pensait que Patroklos reviendrait vivant, après avoir poussé jusqu'aux portes de la Ville, sachant qu'il ne devait point renverser Ilios sans lui, et même avec lui. Souvent, en effet, il l'avait entendu dire à sa mère qui lui révélait la pensée de Zeus; mais sa mère ne lui avait pas annoncé un si grand malheur, et il ne savait pas que son plus cher compagnon périrait.
Et tous, autour du cadavre, combattaient, infatigables, de leurs lances aiguÎs, et s'entre-tuaient. Et les Akhaiens cuirassés disaient :
- ‘ amis ! il serait honteux de retourner vers les nefs creuses ! que la noire terre nous engloutisse ici, plutôt que de laisser les braves Troiens entraîner ce cadavre vers leur Ville et remporter cette gloire Et les Troiens magnanimes disaient :
- ‘ amis ! si la Moire veut que nous tombions tous ici, soit ! mais que nul ne recule !
Chacun parlait ainsi et animait le courage de ses compagnons, et ils
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