Odyssée
dissiper les lignes des guerriers, s'avança à
travers la mêlée et le bruissement des piques, cherchant de tous côtés le divin Pandaros. Et il rencontra le brave et irréprochable fils de Lykaôn, et, s'approchant, il lui dit :
- Pandaros ! o˘ sont ton arc et tes flèches ? Et ta gloire, quel guerrier pourrait te la disputer ? qui pourrait, en Lykiè, se glorifier de l'emporter sur toi ? Allons, tends les mains vers Zeus et envoie une flèche à ce guerrier. Je ne sais qui il est, mais il triomphe et il a déjà infligé
de grands maux aux Troiens. Déjà il a fait ployer les genoux d'une multitude de braves. Peut-être est-ce un Dieu irrité contre les Troiens à
cause de sacrifices négligés. Et la colère d'un Dieu est lourde.
Et l'illustre fils de Lykaôn lui répondit
- Ainéias, conseiller des Troiens revêtus d'airain, je crois que ce guerrier est le Tydéide. Je le reconnais à son bouclier, à son casque aux trois cônes et à ses chevaux. Cependant, je ne sais si ce n'est point un Dieu. Si ce guerrier est le brave fils de Tydeus, comme je l'ai dit, certes, il n'est point ainsi furieux sans l'appui d'un Dieu. Sans doute, un des Immortels, couvert d'une nuée, se tient auprès de lui et détourne les flèches rapides. Déjà je l'ai frappé d'un trait à l'épaule droite, au défaut de la cuirasse. J'étais certain de l'avoir envoyé chez Aidés, et voici que je ne l'ai point tué. Sans doute quelque Dieu est irrité contre nous. Ni mes chevaux ni mon char ne sont ici. J'ai, dans les demeures de Lykaôn, onze beaux chars tout neufs, couverts de larges draperies. Auprès de chacun d'eux sont deux chevaux qui paissent l'orge et l'avoine. Certes, le belliqueux vieillard Lykaôn, quand je partis de mes belles demeures, me donna de nombreux conseils. Il m'ordonna, monté sur mon char et traîné par mes chevaux, de devancer tous les Troiens dans les m‚les combats. J'aurais mieux fait d'obéir; mais je ne le voulus point, désirant épargner mes chevaux accoutumés à manger abondamment, et de peur qu'ils manquassent de nourriture au milieu de guerriers assiégés. Je les laissai, et vins à pied vers Ilios, certain de mon arc, dont je ne devais pas me glorifier cependant. Déjà, je l'ai tendu contre deux chefs, l'Atréide et le Tydéide, et je les ai blessés, et j'ai fait couler leur sang, et je n'ai fait que les irriter. Certes, ce fut par une mauvaise destinée que je détachais du mur cet arc recourbé, le jour funeste o˘ je vins, dans la riante Ilios, commander aux Troiens, pour plaire au divin Hektôr. Si je retourne jamais, et si je revois de mes yeux ma patrie et ma femme et ma haute demeure, qu'aussitôt un ennemi me coupe la tête, si je ne jette, brisé de mes mains, dans le feu éclatant, cet arc qui m'aura été un compagnon inutile !
Et le chef des Troiens, Ainéias, lui répondit :
- Ne parle point tant. Rien ne changera si nous ne poussons à cet homme', sur notre char et nos chevaux, et couverts de nos armes. Tiens ! monte sur mon char, et vois quels sont les chevaux de Trôs, habiles à poursuivre ou à
fuir rapidement dans la plaine. Ils nous ramèneront saufs dans la ville, si Zeus donne la victoire au Tydéide Diomèdès. Viens ! saisis le fouet et les belles rênes, et je descendrai pour combattre ; ou combats toi-même, et je guiderai les chevaux.
Et l'illustre fils de Lykaôn lui répondit:
Ainéias, charge-toi des rênes et des chevaux. Ils traîneront mieux le char sous le conducteur accoutumé, si nous prenions la fuite devant le fils de Tydeus. Peut-être, pleins de terreur, resteraient-ils inertes et ne voudraient ils plus nous emporter hors du combat, n'entendant plus ta voix.
Ayant ainsi parlé, ils montèrent sur le char brillant et poussèrent les chevaux rapides contre le Tydéide. Et l'illustre fils de Kapancus, Sthénélos, les vit ; et aussitôt il dit au Tydéide ces paroles ailées :
- Tydéide Diomèdès, le plus cher à mon ‚me, je vois deux braves guerriers qui se préparent à te combattre. Tous deux sont pleins de force. L'un est l'habile archer Pandaros, qui se glorifie d'être le fils de Lykaôn l'autre est Ainéias, qui se glorifie d'être le fils du magnanime Ankl˘sès, et qui a pour mère Aphroditè elle-même. Reculons donc, et ne te jette point en avant, si tu ne veux perdre ta chère ‚me.
Et le brave Diomèdès, le regardant d'un oeil sombre, lui répondit :
- Ne parle point de fuir, car je ne pense point que tu me persuades. Ce
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