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Belle Catherine

Belle Catherine

Titel: Belle Catherine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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saisit sa grande cape noire et s'en enveloppa comme la cloche de la chapelle sonnait le premier coup de la messe. Elle descendit l'escalier, traversa la salle des gardes où Fortunat était occupé à astiquer une longue épée tandis que deux archers s'évertuaient à ranimer un feu plus que languissant. Au seuil du logis elle s'arrêta un instant pour humer l'air frais. La tempête avait cessé, laissant derrière elle un ciel bien net, d'un joli bleu doux. L'air avait des transparences de cristal et charriait des senteurs de bois mouillé et d'herbe neuve. La cour, le vieux fayard aux branches tordues et tout l'immense paysage étaient lavés de frais. Catherine s'imprégna durant quelques secondes de tout ce renouveau, puis se dirigea lentement vers la chapelle. Elle jeta un regard à la tour Saint-Jean, muette et silencieuse, puis à la tour Guillot.
    Mais, là non plus, aucun signe de vie. Des servantes qui se rendaient aussi à la messe s'écartèrent pour la laisser passer et firent la révérence sur son passage. Elle reconnut parmi elles la grosse fille des étuves, mais s'éloigna sans la regarder.
    Dans la chapelle, il régnait une humidité et une odeur de cave. Les énormes moellons des murs suintaient l'eau qui rouillait les ferrures et laissait de longues traînées d'un noir verdâtre sur le bois antique du vieux crucifix. Catherine frissonna en gagnant le banc seigneurial où personne ne l'attendait. Le curé de Carlat, qui officiait ordinairement au château, commença la messe dès qu'elle fut arrivée. C'était un petit vieillard fragile et timide qui se tenait voûté le plus souvent et semblait toujours sous le coup de quelque terreur. Mais il avait de doux yeux compatissants et Catherine, qu'il avait déjà entendue en confession, savait que son âme avait quelque chose d'angélique et débordait de pitié pour les malheureux humains accrochés à leurs péchés.
    Elle s'agenouilla, ouvrit le lourd missel aux ferrures d'argent posé devant elle et s'efforça de suivre le service divin.
    Mais son esprit était ailleurs. Il tournait autour d'Arnaud invisible, de Marie prisonnière et aussi de sa belle-mère. Qu'est-ce qui retenait cette femme, pieuse jusqu'au fanatisme, d'assister à la messe ? Catherine croyait encore entendre dans son oreille les sanglots de la vieille dame. Ce n'étaient pas, comme l'avait supposé un peu gratuitement Sara, des larmes de soulagement, ou de reconnaissance, mais bien des sanglots de désespoir et de souffrance... Pourquoi ?
    L'impatience de se lancer dans le combat s'empara de la jeune femme et elle accueillit l'« ite missa est » avec un soupir de soulagement. Un dernier signe de croix, une dernière génuflexion, et Catherine tourna les talons. À pas rapides, elle sortit de la chapelle. Fortunat faisait les cent pas sous le porche. En apercevant la jeune femme, il vint à elle.
    — Monseigneur vous attend, dame Catherine... commença-t-il, mais elle l'interrompit d'un geste sec.
    — Va devant, je te suis...
    Elle lui emboîta le pas en silence. Il lui semblait qu'en parlant elle gaspillerait les forces accumulées depuis l'aube, depuis qu'elle savait devoir se préparer à cette entrevue. Tout en marchant, elle marmottait entre ses dents une prière, un peu incohérente peut- être, mais si Dieu ne s'y retrouvait pas dans le pauvre cœur humain, qui donc s'y retrouverait ?
    A la suite de Fortunat, Catherine traversa la cour, s'engagea dans l'étroit escalier de pierre sans rampe qui menait au chemin de ronde. Bientôt l'on quitta le grand air de la cour pour le hourdis et l'interminable galerie couverte qui ourlait les courtines, suivait la courbe des tours et couronnait la forteresse d'un chemin de feu quand l'ennemi attaquait. C'est sur ce chemin qu'elle trouva Arnaud. Armé de toutes pièces, appuyé au créneau, l'air sombre, il scrutait la vallée sur laquelle se déchiraient les brouillards du matin, révélant les creux, ouatés de verdure tendre, les ruisseaux, les toits roussis où fumaient les cheminées, les bœufs roux foncé qui, deux par deux, s'en allaient au champ, unis sous le même joug.
    Il était seul et, tourné vers l'horizon, il ne bougea pas quand les pas de son écuyer et ceux de la jeune femme firent résonner les planches épaisses du hourdage. Peut-être était-ce pour se donner un ultime instant de réflexion qu'il semblait ne rien entendre ? Peut-être ne se sentait-il pas prêt encore pour cette minute où il lui faudrait

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