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Belle Catherine

Belle Catherine

Titel: Belle Catherine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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lutter face à face contre son amour.
    Fortunat s'avança, seul, murmura quelque chose tout bas. Alors, la statue de fer vêtue se tourna lentement vers Catherine tandis que Fortunat s'esquivait. Sous la visière relevée du heaume d'acier noir, la jeune femme vit luire les yeux sombres de son mari. Il la regardait sans rien dire. Elle appela à elle tout son courage et, pour briser ce silence qui s'éternisait, l'étouffait, elle dit, très doucement :
    — Tu m'as demandée ? Me voici...
    Il ne fit pas un geste vers elle. Un pied appuyé au créneau, il laissait le soleil arracher des éclats sinistres à sa funèbre carapace et jouait avec une longue dague armoriée, timbrée de son épervier héraldique, qu'il avait prise à sa ceinture.
    Soudain, il parut prendre son parti de quelque chose, releva la tête, se redressa et fit face à sa femme.
    — Je t'ai demandé de venir pour te dire adieu !
    Elle n'avait pas prévu cela et recula d'un pas. Dans la douce lumière du voile blanc ses yeux se creusèrent, sa bouche trembla d'angoisse.
    — Adieu ? Tu veux que je m'en aille ?
    Il eut un pâle sourire, aussitôt effacé.
    — Non, Catherine. Tu dois rester ! C'est moi qui vais partir. Partir pour ne jamais plus revenir. J'ai voulu que tu le saches...
    — Tu veux partir ? Tu veux partir ?...
    Elle répétait ces paroles sans parvenir à leur donner un sens clair. Une invincible fatigue envahit tous ses membres et, cherchant instinctivement un appui, elle se laissa glisser, assise entre les énormes merlons. Enfin la signification claire de cette étrange déclaration parvint à percer les brumes où s'enfonçait son esprit.
    — Partir ! répéta-t-elle. Mais pourquoi ? Et pour aller où ?
    II se détourna d'elle, reprit la contemplation du paysage, haussa les épaules.
    — Où, je n'en sais encore rien... peut-être vers la Provence ! Il y a là-bas, au bord d'une mer plus bleue que le ciel d'été, des châteaux blancs entourés d'étranges fleurs où il doit faire bon vivre.
    — Mais, si tu veux vivre là-bas, moi je veux bien ! Et si tu veux partir, partons. Je suis prête.
    De nouveau le douloureux sourire. Il baissa la tête, sa voix se fit plus sourde.
    Je sais que je vais te faire du mal, qu'il te faudra être courageuse, Catherine. Mais je sais aussi que tu n'as jamais manqué de courage et je pense que, lorsque deux êtres se sont trompés, il vaut mieux avoir le courage d'en finir avant qu'il soit trop tard. Je ne veux pas t'emmener là-bas. C'est Marie que j'emmènerai !
    Assommée, Catherine se laissa aller contre la pierre. Le visage baissé d'Arnaud était crispé comme celui d'un martyr dans l'arène, mais il ne tournait pas les yeux et sa voix ne faiblissait pas. Il avait dit : « C'est Marie que j'emmènerai », calmement, froidement. C'était là une décision mûrement pesée.
    — Marie ! articula Catherine. C'est Marie que tu veux emmener ? Mais pourquoi ?
    La réponse vint, immédiate, foudroyante.

    — Je l'aime !
    Et comme Catherine, écrasée sous l'énormité de ces mots, ne réagissait pas, il poursuivit, d'une voix sourde :
    — Vois-tu, il arrive que l'on se trompe dans la vie. Marie et moi, nous nous connaissions depuis toujours et... je n'avais jamais pensé à elle autrement que comme à une très petite fille. Toi, tu m'as ébloui et je t'ai voulue, mais...
    quand nous sommes revenus, je l'ai revue et elle avait changé. Nous sommes de la même race, elle et moi, Catherine.
    C'est cela qu'il te faut comprendre.
    La furieuse poussée de colère qui s'enfla en elle ranima Catherine. Les mots affreux frappaient sa tête comme des coups de marteau. Ils n'étaient pas vrais, j ils ne pouvaient pas être vrais ! D'ailleurs, ils sonnaient faux ! Elle se dressa, les poings serrés.
    — Tu l'aimes, dis-tu ? Tu oses me dire cela à moi ? As-tu oublié tout ce qui nous a liés depuis dix ans... dix ans !
    Étais-tu fou, ou bien ne savais-tu pas ce que tu disais ? Si c'est elle que tu aimes, en vérité tu as une étrange façon d'aimer. À coups de fouet ?
    Il devint blême et, sous la visière relevée, les ombres de son visage parurent se creuser davantage. Les narines se pincèrent et la bouche se serra au point de n'être plus qu'un mince trait rouge.
    On frappe un chien qui a commis une faute et pourtant on l'aime ! Je t'ai dit que nous étions de même race, elle et moi.
    Elle pouvait comprendre ce châtiment. Elle l'avait mérité en me désobéissant. Je lui avais donné l'ordre

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