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Belle Catherine

Belle Catherine

Titel: Belle Catherine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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une somnambule qu'il fronça les sourcils et recula... Comprenant que Sara était prise d'une de ces étranges crises de clairvoyance au cours desquelles le voile de l'avenir se déchirait devant elle, Catherine avait cessé de pleurer et retenait sa respiration. La voix de la bohémienne s'éleva, monocorde :
    — Ta puissance a des pieds d'argile et de cendre, Gilles de Rais... Il y a du sang, des flots de sang autour de toi, tellement de sang qu'il t'engloutit et te submerge... Il y a des hurlements de douleur, des bouches qui crient vengeance, des mains qui appellent la justice. Et la justice viendra... en son temps... Je vois une grande ville près de la mer... une foule énorme... un triple gibet ! J'entends le son des cloches et des prières... Tu seras pendu, Gilles de Rais... et le feu dévorera ton corps !
    La voix prophétique s'éteignit. Alors, avec un cri de terreur, le seigneur de Rais s'enfuit en courant...
    Toute la nuit, les échos du château retentirent du bruit du banquet et de la fête. Dans la grande salle, Gilles, sa famille et ses capitaines festoyaient, mais, dans les cuisines, les salles de gardes et les dépendances, les hommes d'armes menaient joyeuse vie avec les servantes. Les cris, les rires et les chansons à boire parvenaient à percer même l'épaisseur des murs de Champtocé montaient des cours, des escaliers jusqu'à la chambre où les yeux secs mais le cœur serré, Catherine cherchait en vain un moyen d'échapper à sa prison.
    — Pourquoi ne t'ai-je pas écoutée, répétait-elle inlassablement à Sara, pourquoi suis-je venue dans ce guêpier ?
    J'aurais dû courir à Bourges, voir la Reine à tout prix...
    — Tu ignorais le traquenard tendu. Tout était bien combiné. Le premier corps de garde t'aurait arrêtée, jetée dans quelque basse-fosse.
    — En suis je plus avancée entre les murs de ce château ? Je suis prise et bien prise. Jusqu'à mon corps, déjà alourdi, qui me tient captive. Comment faire, comment sortir ?
    — Calme-toi, murmura Sara en caressant doucement les cheveux dénoués de la jeune femme, calme- toi, je t'en supplie. Dieu t'enverra un secours, j'en suis certaine. Il faut espérer, prier... et guetter l'occasion favorable. La première chose, vois-tu, est de sortir d'ici. Ensuite...
    — Ensuite courir au secours d'Arnaud et...
    — Tu veux dire courir à Sully ? Risquer de tomber entre les mains de La Trémoille pour le seul plaisir d'être dans les mêmes prisons que lui ? Que non pas ! Chercher un refuge, oui ; et ensuite celui qui saura vous défendre et faire entendre raison au Roi... même s'il faut courir jusqu'en Provence pour demander justice à Madame Yolande. Essaie de te reposer, ma mignonne, l'esprit est plus clair quand il est plus dispos. Je suis là, près de toi. Je veillerai sur toi. À nous deux, nous en sortirons...
    Bercée par la voix de sa vieille amie, Catherine, peu à peu, s'apaisa, reprit courage. Mais, au lever du jour, un poing ferré ébranla la porte. Comme dans un cauchemar, Catherine vit des hommes d'armes envahir sa chambre. Le cri qu'elle poussa fut sans écho. Avant qu'elle ait pu seulement protester, Sara avait été arrachée de ses bras, malgré les efforts qu'elle faisait pour la retenir, entraînée dans le couloir...
    — Monseigneur Gilles m'a donné l'ordre d'arrêter la sorcière ! cria le sergent en laissant retomber derrière lui la lourde porte de chêne.
    Catherine, alors, comprit qu'elle était seule, définitivement abandonnée de tous et du Ciel même. Secouée de sanglots, désespérée, elle s'écroula parmi ses oreillers.
    La crise de désespoir ne fut que passagère. Catherine ne s'y était abandonnée que parce que cette nuit d'angoisse lui avait fait toucher le fond de son courage. Mais l'instinct combatif était trop solidement ancré en elle pour qu'elle ne relevât pas la tête et ne se jetât pas à corps perdu dans la bataille. Une colère folle bouillonnait dans sa tête, réchauffant ses muscles épuisés, renvoyant au cœur le sang qui se glaçait dans ses veines, jouant le rôle salutaire d'un révulsif. Elle sauta de son lit comme on s'évade, fit une toilette rapide et assez sommaire, se contentant de baigner d'eau son visage gonflé par les larmes et de savonner ses mains. Mais elle prit son temps pour se coiffer, lustrant et relustrant ses cheveux, surtout pour laisser à ses traits le temps de redevenir normaux. Catherine savait depuis longtemps que sa beauté était sa meilleure

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