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Belle Catherine

Belle Catherine

Titel: Belle Catherine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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le pauvre seigneur ! se lamentait la nourrice.
    Tant bien que mal, aidée de Sara, elle débarrassait le prisonnier des haillons boueux et puants qui adhéraient à son corps amaigri. On aurait dit que le malheureux avait séjourné dans une fosse à purin, mais, en arrachant du dos et de la poitrine de Montsalvy les derniers lambeaux d'étoffe, Mahaut rencontra de la difficulté et, comme elle insistait, du sang perla sur la peau grise de crasse.
    — Il est blessé ! souffla Catherine le cœur révulsé.
    Sa main tremblante se posa sur le front d'Arnaud,
    repoussant les cheveux trop longs.
    — On n'en viendra jamais à bout de la sorte, marmotta Mahaut. Sara, descendez aux cuisines et dites qu'on nous monte un baquet à lessive, un grand ! et plusieurs seaux d'eau chaude. Il faut lui donner un bain.
    Sara disparut, mais aussitôt Xaintrailles, suivi de Jacques Cœur, s'encadra dans la porte. Soucieux, il marcha jusqu'au lit et se planta derrière Catherine qui s'était mise à détacher, elle aussi, avec d'infinies précautions, les lambeaux d'étoffe collés. Elle lui jeta un coup d'œil rapide.
    — Où l'avez-vous trouvé pour qu'il soit dans cet état ? Dans une oubliette ?
    — Presque ! Au fond d'une ignoble fosse où l'eau de la Loire suintait. Le sol de boue ne devait jamais sécher. Il était enchaîné à même le sol, les ceps aux pieds et aux mains, dans une obscurité complète. On lui passait sa nourriture...
    enfin, ce qu'on appelait sa nourriture, par un trou. La porte était scellée. Il a fallu l'enfoncer. Le geôlier qui le gardait était une épouvantable brute, un bossu à la peau noire, fort comme un Turc, qu'il a fallu trois hommes solides pour maîtriser.
    — Qu'en avez-vous fait ?
    Que fait-on d'un rat ? On l'écrase. Je l'ai égorgé sur place et je l'ai laissé dans l'in-pace, avant d'emporter Montsalvy. Je vous avoue que tout d'abord j'ai cru qu'Arnaud était mort. Il ne bougeait pas. Mais j'ai vu qu'il respirait encore faiblement.
    J'aurais tout donné, pour avoir un médecin sous la main. Un de mes hommes avait un peu étudié chez les moines. Il lui a fait prendre un peu de lait, un bouillon chaud, mais nous n'avions pas le temps de nous attarder plus longtemps. Il fallait faire vite. On l'a emballé du mieux qu'on a pu avec un manteau et je l'ai ramené sur mon cheval en le tenant comme un enfant, jusqu'aux abords de Bourges où j'ai trouvé, chez un métayer de maître Jacques, cette charrette, ce bois et cet accoutrement. Et Dieu m'est témoin, Catherine, que, tout au long de la route, j'ai tremblé de ne vous ramener qu'un cadavre. Il faudra que La Trémoille et sa clique paient pour avoir osé faire ça.
    — Pour le moment, fit Catherine durement, il s'en tire avec un geôlier égorgé...
    — ... vingt hommes d'armes abattus et un château en flammes ! acheva Xaintrailles tranquillement. Pour qui me prenez-vous ? On fait ce qu'on peut, que voulez-vous ? Mais j'avais beau être pressé, j'ai pris tout de même le temps de mettre le feu.
    — Pardonnez-moi ! fit Catherine sans lever les yeux.
    Deux valets apportaient à grand-peine le baquet à lessive dans lequel on plaça un drap et que l'on emplit d'eau chaude.
    Pendant ce temps, maître Jacques, immobile, avait contemplé le rescapé sans mot dire. Ses yeux allaient du grand corps inerte au profil pur de Catherine qui se détachait sur la flamme des bougies, à ses longs cils qui mettaient sur sa joue des ombres si douces. Mahaut, de l'autre côté du lit, rencontra son regard et secoua les épaules.
    — Il faudrait un médecin, dit-elle d'un ton de reproche. Et le plus vite sera le mieux.
    Jacques Cœur tressaillit comme un homme que l'on éveille brutalement. Il se dirigea lentement vers la porte.
    — J'y vais moi-même, dit-il seulement.
    Il sortit, étouffant un soupir.
    Pas une seule fois depuis qu'il était entré dans la chambre, Catherine n'avait paru s'apercevoir de sa présence. Elle avait rejoint, dans son univers de souffrances, cet homme à moitié mort qui n'était plus que l'ombre de lui-même...
    Avec d'infinies précautions, Catherine, Xaintrailles et Sara enlevèrent Arnaud du lit et le plongèrent dans le baquet où Mahaut venait de jeter un plein flacon d'huile aromatique et un petit fagot de racines de guimauve. Le corps émacié dont la peau grise adhérait fortement à des muscles diminués disparut sous l'eau fumante. A ce moment, Arnaud ouvrit ses yeux qui apparurent rouges avec d'étranges

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