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Catherine des grands chemins

Catherine des grands chemins

Titel: Catherine des grands chemins Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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seul coup dans la chambre avec ce visage de douleur qu'elle n'avait plus quitté depuis le jour où Arnaud s'en était allé. Sara, qui suivait la marche des pensées sur le visage mobile de Catherine, entraîna Brézé qui sortit sans un mot mais à regret, cherchant à capter un regard qui ne le voyait plus. Catherine ne s'aperçut même pas de son départ. Seulement, lorsque Sara revint, elle comprit qu'il n'était plus là et leva sur sa vieille amie un regard de somnambule.
    — Il est parti ? - Et, comme Sara faisait signe que oui, elle ajouta amère : - Tu es contente ?
    — Oui, je suis contente... et surtout qu'il ait suffi d'évoquer dame Isabelle pour que tu t'en détournes. Je t'en supplie, Catherine, pour toi-même... et pour nous tous, ne laisse pas ce jeune et séduisant étourneau te tourner la tête. Tu crois te réchauffer au feu de cet amour
    ? Tu t'y brûleras si tu ne prends garde...
    Mais Catherine n'avait pas envie de discuter. Haussant les épaules, elle alla s'accouder à la fenêtre pour regarder la nuit. Les mots lui semblaient tout à coup si vides, si inutiles ! Ils résonnaient dans sa tête comme un battant de cloche. Elle avait besoin d'air, d'espace. A contempler à ses pieds la ville endormie, la douce campagne bleue, à sentir monter jusqu'à elle l'odeur vivante de la rivière, elle éprouva soudain une sorte de faim douloureuse, un sentiment de vide et de frustration...
    Le triomphe de ce soir lui laissait un arrière-goût amer. Certes, La Trémoille était abattu, durement puni, et sa femme ne l'était pas moins. Certes, les Montsalvy gagnaient sur tous les terrains. Mais, elle, Catherine, quelle était sa victoire ? Elle était plus seule que jamais et, si le Roi lui avait rendu rang et fortune, elle n'en profiterait guère. Avant peu elle repartirait pour son Auvergne sauvage afin d'y travailler encore à la gloire des Montsalvy. Mais dans la solitude encore !
    Au milieu de cette cour brillante, joyeuse, où chacun semblait se préoccuper surtout de saisir l'instant qui passe, on lui prêchait l'austérité, le dur devoir. Jeune et belle, l'amour lui était interdit... et cela juste au moment où elle en avait le plus besoin, au moment ou la soif de vengeance qui l'avait animée, soutenue jusqu'ici, s'était enfin apaisée.
    Se retournant brusquement, elle fit face à Sara et, avec colère, s'écria :
    — Et si j'ai envie de vivre, moi ? Si j'ai envie d'aimer, de ne plus être une morte vivante, un objet de respect et de vénération, mais une chair qui vibre, un cœur qui bat, un sang qui coule ! Si je veux exister enfin !
    Les yeux noirs de Sara soutinrent sans un mot le regard de Catherine, mais la pitié que la jeune femme y vit passer ne fit qu'exciter sa colère. Elle cria :
    — Alors ? Qu'as-tu à répondre ?
    — Rien, fit Sara sourdement. Personne ne t'en empêchera... pas même moi.
    — C'est bien ainsi que je l'entends. Bonsoir. Laisse- moi seule. Je veux être seule puisque c'est tout ce que l'on me laisse !
    Pour la première fois depuis bien longtemps, Sara, cette nuit-là, ne dormit pas dans la chambre de Catherine, mais dans le cabinet à robes voisin.
    Dans les jours qui suivirent, Pierre de Brézé ne quitta guère Catherine. Il portait son missel pour aller à la chapelle, s'asseyait auprès d'elle à table, l'accompagnait à la promenade et, le soir, bavardait longuement avec elle, dans l'embrasure d'une fenêtre pendant que jouaient les musiciens du roi et que les autres dansaient.
    Des sourires naissaient sur leur passage. La reine Marie avait même dit à Catherine, en faisant de la tapisserie auprès d'elle :
    — Pierre de Brézé est un bien charmant garçon, n'est-ce pas, ma chère ?
    — Charmant, Madame... Votre Majesté a tout à fait raison.
    — C'est aussi un homme de valeur. Il ira loin et je crois que celle qui l'élira pour époux ne fera point un mauvais choix.
    Catherine avait rougi et baissé la tête sur son travail, mais sa gêne n'avait pas duré. C'était autour d'elle comme une conspiration. Choses et gens semblaient la pousser vers Pierre et leur ménager des instants de solitude. Seul, sans doute, Cadet Bernard aurait pu s'interposer entre les deux jeunes gens, mais, par une sorte de miracle, le comte de Pardiac avait disparu. Il s'était rendu à Montrésor, chez Jean de Bueil.
    Quant à Sara, elle gardait avec Catherine l'attitude réservée d'une suivante bien stylée, mais ne lui adressait la parole que pour les choses

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