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Catherine et le temps d'aimer

Catherine et le temps d'aimer

Titel: Catherine et le temps d'aimer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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ragoût dont la sauce embaumait et, enfin, plusieurs sortes de gâteaux luisants de miel et hérissés d'amandes. De quoi nourrir Gauthier lui-même !
    Je ne pourrai jamais manger tout cela ! fit-elle avec une timidité qu'expliquait la carrure de Fatima, mais la baigneuse ne s'émut pas pour autant.
    — Tu y mettras le temps qu'il faut, mais il faut que tu manges tout
    ! Comprends-moi bien, Lumière de l'Aurore": ton maître Abou-al-Khayr t'a confiée à moi pour que je fasse de toi la plus belle créature de tout l'Islam. Et j'ai ma réputation à soutenir. Tu ne sortiras d'ici que lorsque ton corps sera devenu aussi suave qu'un sorbet à la rose !
    — Je ne sortirai d'ici, répéta Catherine. Que veux-tu dire ?
    — Que tu ne quitteras cette maison que pour entrer au lit de ton maître et faire ses délices, affirma tranquillement la négresse. Cet appartement sera le tien jusqu'à ce jour. Tu y seras servie, soignée, surveillée comme...

    — Comme une oie à l'engrais ! s'emporta Catherine. Mais je ne veux pas ! Je vais périr d'ennui ici !
    — Tu n'auras pas le temps ! Tu es belle mais affreusement maigre, ta peau est sèche. Il y a beaucoup à faire. Et puis tu pourras te promener dans le jardin, prendre le frais le soir, sur la terrasse. Enfin, dûment voilée et sous bonne escorte, te promener de temps en temps dans la ville. Crois-moi, tu n'auras pas le temps de t'ennuyer !
    D'ailleurs, la durée de ton séjour dépendra de ta bonne volonté. Plus vite tu seras prête et plus vite tu sortiras... encore que je ne comprenne guère ta hâte de recevoir les caresses du petit médecin qui a beaucoup de cervelle, mais pas beaucoup de muscles et qui doit être un piètre amant. Mange !
    Et sur cette injonction, Fatima sortit, laissant Catherine partagée entre la fureur et l'envie de rire. Comment Abou avait-il osé la cloîtrer chez cette femme ? Il s'était bien gardé de lui dire qu'elle ne reviendrait chez lui qu'une fois remise en possession de tous ses charmes car il savait bien comment elle aurait réagi. D'ailleurs, il n'était pas difficile de deviner qu'en la confiant à ce mastodonte noir il entendait la mettre à l'abri de ses propres impulsions et se donner à lui-même le temps de réfléchir. Au fond, c'était astucieux ! Le mieux était d'obéir.
    Docilement, elle avala le contenu de son plateau, but avec méfiance d'abord puis avec un plaisir croissant le thé à la menthe, chaud, fort et bien sucré... et là-dessus s'endormit tout naturellement.
    Quand elle s'éveilla, elle trouva Fatima debout près de son divan, souriant de toutes ses fortes dents blanches.
    — Tu as dormi deux heures ! lui annonça-t-elle triomphalement.
    Et tu as tout mangé : c'est bien ! Nous nous entendrons. Maintenant nous pouvons continuer.
    Extraite de son divan par deux servantes qui la portaient aussi précautionneusement qu'un vase de cristal, Catherine fut amenée dans la salle d'épilation où une spécialiste la débarrassa de tout duvet superflu à l'aide d'une pâte épaisse à base de chaux et d'orpiment tandis qu'une coiffeuse enduisait sa chevelure d'un henné léger qui, une fois ôté, laissa dans ses cheveux de merveilleux reflets d'or roux.
    Après quoi, on la remit aux mains de Fatima en personne. La baigneuse frotta d'une huile parfumée tout le corps de sa cliente puis se mit à la masser. Cette fois, Catherine se laissa faire avec un réel plaisir. Les mains noires de Fatima pouvaient avoir une fermeté implacable ou une étonnante douceur. Sans doute, pour l'encourager, l'Éthiopienne déclara, tout en malaxant énergiquement le ventre de la jeune femme :
    — Quand j'en aurai fini avec toi, tu pourras rivaliser même avec la princesse Zobeïda, la perle du harem.
    Le nom fit sursauter Catherine, qui brusquement devint attentive puis demanda, sans avoir l'air d'y attacher d'importance :
    — J'en ai entendu parler. Tu la connais ? On la dit très belle !...
    Certes, je la connais. Elle s'était même confiée à mes soins, après une maladie. C'est la plus belle panthère de tout l'Orient. Elle est cruelle, sauvage, ardente mais belle ! oh oui ! admirablement belle ! Elle ne l'ignore pas d'ailleurs. Zobeïda est orgueilleuse de son corps dont elle connaît la perfection, de ses seins sur lesquels on pourrait mouler des coupes sans défaut... et ne les cache guère. Dans l'enceinte de ses appartements et de son jardin privé, elle ne porte guère que des mousselines fort transparentes et des

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