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Catherine et le temps d'aimer

Catherine et le temps d'aimer

Titel: Catherine et le temps d'aimer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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coude, un chemin montant accablé de soleil, puis, au tournant, la grâce orientale de deux hautes portes, en équerre. Morayma, qui avait attendu Catherine en haut du chemin, lui désigna celle qui s'ouvrait de front.
    — La porte Royale. Elle ouvre sur le Sérail, le palais du Calife.
    Nous prendrons plutôt celle-ci, la Porte du Vin, pour gagner directement le harem en traversant la ville haute, la cité administrative d'Al Hamra.
    Mais, comme le regard de Catherine s'attardait à la muraille, reliant trois donjons pourpres, qui s'élevait sur la gauche, la vieille eut un mince sourire.
    Tu ne viendras jamais dans cette partie-ci. C'est l'Alcazaba, la forteresse qui fait Al Hamra imprenable. Vois cette énorme tour qui, là-bas, domine le ravin ! Admire en elle la puissance de ton futur maître. C'est le Ghafar, la pièce maîtresse de notre défense. Bien souvent, la nuit, tu entendras sonner la cloche qui le surmonte. Ne t'en effraye pas, Lumière de l'Aurore. Cela ne signifie pas un danger, mais seulement le temps d'irrigation de la plaine que la cloche règle pendant la nuit... Allons vite maintenant, la chaleur se fait intolérable et je veux que tu sois fraîche pour les yeux du Maître...
    Catherine frémit. Apparemment, on ne lui laisserait pas beaucoup le temps de respirer avant de la présenter au Calife. Mais, en cette matière comme en quelques autres, elle était décidée à laisser les événements jouer leur rôle et à les exploiter simplement au mieux.
    La longue piscine aux mosaïques d'azur et d'or du harem baignait dans une atmosphère brumeuse et parfumée lorsque Catherine, poussée par Morayma, y pénétra, les yeux encore lourds de sommeil.
    Sur l'ordre de la vieille juive, elle avait dormi deux heures après son repas et ses oreilles bourdonnaient. Un vacarme de volière en folie emplissait la salle où une cinquantaine de femmes babillaient toutes à la fois. Une frise d'esclaves, noires le plus souvent, entourait la vasque pleine d'eau tiède et bleue, où s'ébattaient une troupe de jolies filles, riant, criant, piaillant et s'amusant le plus souvent à s'éclabousser. La piscine offrait le spectacle d'une tempête minuscule, mais son eau était si transparente qu'elle ne cachait rien, ou bien peu, du corps des baigneuses. Toutes les couleurs de peaux se montraient dans ce cadre fastueux et charmant. Bronze foncé des filles d'Afrique aux hanches minces, aux seins pointus, ivoire doux des Asiatiques, albâtre rosé de quelques Occidentales voisinaient avec l'ambre des Mauresques.
    Catherine vit des chevelures noires, rousses, acajou et même d'un blond presque blanc, des yeux de toutes nuances, entendit des voix de tous les registres. Mais
    son entrée sous l'égide de la Maîtresse du Harem fit taire tout ce monde et calma instantanément l'agitation de la piscine. Toutes les femmes s'immobilisèrent, tous les regards se tournèrent vers la nouvelle venue que Morayma en personne dévêtait prestement sur le dallage chatoyant et Catherine, avec un frisson désagréable, vit que l'expression de toutes ces femmes était rigoureusement la même : l'hostilité totale.
    Catherine en eut conscience immédiatement et en éprouva un malaise. Tous ces yeux ennemis qui la détaillaient car ceux des esclaves n'étaient pas moins hostiles que ceux de leurs maîtresses, la brûlaient comme des charbons incandescents. Cependant Morayma flaira l'atmosphère aussi rapidement. Sa voix dure s'éleva.
    — Celle-ci s'appelle Lumière de l'Aurore. C'est une captive achetée à Almeria. Tâchez qu'il ne lui arrive rien de fâcheux, sinon les nerfs d'hippopotame siffleront ! Je n'admettrai ni le bord trop glissant de la piscine, ni le malaise dans le bain, ni l'indigestion de sucreries, ni la corniche qui se détache subitement, ni la vipère égarée dans les jardins, ni aucun autre accident ! Souvenez-vous-en ! Et toi, va prendre ton bain.
    Un murmure de mécontentement accueillit ce petit discours que Catherine n'avait pu écouter sans un léger frisson, mais personne n'osa protester. Néanmoins, en trempant le bout de son pied nu dans l'eau parfumée du bain, Catherine eut l'impression de descendre dans une fosse pleine de serpents. Tous ces corps minces et luisants en avaient la souplesse dangereuse et toutes ces bouches aux lèvres fraîches semblaient prêtes à cracher le venin.
    Elle nagea quelques instants sans enthousiasme. On s'écartait d'elle avec méfiance et elle n'avait aucune envie de

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