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Catherine et le temps d'aimer

Catherine et le temps d'aimer

Titel: Catherine et le temps d'aimer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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Plus que jamais, elle éprouvait un impérieux besoin de solitude.
    Non pour songer à la lettre qu'elle avait laissée tomber à ses pieds tout à l'heure, ni pour se lamenter encore sur son sort. Elle voulait, cette fois, réfléchir, essayer de voir clair... L'appel de Philippe aurait du moins servi à la remettre d'aplomb. A cette heure, le cloître devait être vide...
    Malgré l'épaisseur des murailles, on entendait vaguement les voix des hospitaliers qui chantaient à la chapelle... Serrant son manteau autour d'elle, Catherine poussa la porte basse qui menait au promenoir, s'engagea sous les lourdes arcades en arc brisé, séparées par de solides contreforts habitués à supporter des toits chargés de neige. La lumière crue de la lune découpait en noir l'architecture sévère du cloître sur le fond blafard du jardin dévasté par l'hiver.
    Lentement, elle se mit à marcher, ombre silencieuse parmi les ombres dures des arcades. Le mouvement lui fit du bien. Il lui sembla qu'elle reprenait possession d'elle-même à mesure que la brûlante douleur de tout à l'heure faisait, peu à peu, place à la colère... Au bout d'un quart d'heure, Catherine découvrit en elle, furieux, exigeant, un âpre désir de revanche ! Fortunat avait cru l'abattre en lui dépeignant son époux délirant d'amour aux pieds d'une autre, il avait cru lui faire peur en lui dépeignant le sort des femmes chrétiennes au pays maure !
    Mais il ne la connaissait pas ! Il ne savait pas, ce malheureux, que pour atteindre le but qu'elle s'était fixé Catherine avait toujours été prête à tout, à risquer les pires dangers, à tuer s'il le fallait, à se vendre même s'il n'y avait pas moyen de faire autrement !
    Non, elle ne laisserait pas son époux à cette femme ! Elle avait acquis, trop chèrement, le droit de le revendiquer ! Que pesaient, dans la balance du destin, les sourires et les baisers de cette infidèle, en regard du poids terrifiant de ses larmes, de ses souffrances ? Et si Arnaud avait cru se débarrasser d'elle à jamais, il se trompait ! Il la croyait mariée, certes, mais était-ce une raison pour lui laisser, au cœur, l'horreur de le croire lépreux ? Il n'avait eu de pensée que pour sa mère, pas même pour son fils, et, voyageur allégé de tout bagage, s'en était allé porter allègrement son amour à la première venue...
    — Même si je dois travailler sous le fouet des esclaves, même si je dois subir la torture, gronda Catherine entre ses dents, j'irai là-bas, je le retrouverai !... je lui dirai que je n'ai pas d'autre maître que lui... que je suis toujours sa femme. Et nous verrons bien qui l'emportera, de moi ou de cette moricaude !
    A mesure que les pensées se faisaient plus violentes, la marche de Catherine s'accélérait. Elle se mit bientôt à arpenter le cloître rapidement, comme si elle n'avait pas, durant toute une journée, escaladé la montagne. Le manteau volait derrière elle comme un drapeau noir.
    — J'irai là-bas ! J'irai à Grenade ! lança-t-elle tout haut. Et je voudrais bien savoir qui m'en empêcherait !
    — Chut ! dame Catherine ! fit une voix derrière l'un des piliers !...
    Si vous voulez aller là-bas, il ne faut pas le crier sur les toits... et il faut vous dépêcher.
    Un doigt sur les lèvres, la longue silhouette maigre de Josse Rallard surgit auprès d'elle. Il portait un paquet sous le bras et jetait, de temps en temps, un coup d'œil derrière lui. Catherine le regarda avec étonnement.
    — Je vous croyais endormi ! fit-elle.

    — D'autres aussi le croyaient ! Dame Ermengarde et aussi votre ami le seigneur-peintre ! Ils ne se sont pas méfiés de moi ! Et, bien qu'ils aient parlé bas, je les ai entendus.
    — Que disaient-ils ?
    — Que tout à l'heure, quand tout dormirait au moustier, et quand vous-même auriez enfin consenti à vous reposer, ils vous enlèveraient et vous ramèneraient en Bourgogne !
    — Quoi ? souffla Catherine abasourdie. Ils veulent m'enlever ?...
    De force ? Mais c'est monstrueux !
    — Non, fit Josse avec son curieux sourire à lèvres closes. À tout prendre, c'est même plutôt amical ! Tout d'abord, j'ai cru qu'ils avaient de mauvaises intentions... qu'ils voulaient vous tuer peut-être, et j'ai bien failli ne pas en écouter davantage. Mais ce n'est pas cela : ils veulent vous enlever pour vous sauver de vous-même, et malgré vous.
    Ils vous connaissent bien et ils ont peur que vous ne décidiez d'aller droit à Grenade où, selon

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